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Beaucoup de choses à changer et rester les mêmes au sein du leadership vietnamien

Auteur: Le Hong Hiep, ISEAS-Yusof Ishak Institute

«La politique est l’art du possible». Attribué au Prussien Otto Von Bismarck, ce fameux dicton implique que les politiciens doivent parfois faire des compromis les uns avec les autres pour parvenir à des solutions acceptables pour toutes les parties concernées. De tels compromis rendent possibles des solutions politiques apparemment impossibles. Cette sagesse éprouvée par le temps est bien démontrée dans les résultats du 15e Plénum du Comité central du Parti communiste du Vietnam (PCV).

Le 15e Plénum du Comité central du PCV, qui a eu lieu du 16 au 17 janvier 2021, a pris des décisions sur les principales positions politiques du Vietnam à adopter lors du prochain 13e Congrès national du Parti. Des informations informelles mais crédibles du plénum indiquent que le secrétaire général Nguyen Phu Trong restera à la tête du parti et que le Premier ministre Nguyen Xuan Phuc sera promu président de l’État.

Pendant ce temps, le poste de Premier ministre sera repris par Pham Minh Chinh, actuel chef de la Commission centrale du personnel et de l’organisation du CPV, et Vuong Dinh Hue, ancien vice-premier ministre et actuel secrétaire du parti de Hanoi, deviendra le nouveau président de l’Assemblée nationale.

L’approbation par le Parti du maintien du secrétaire général Trong, aujourd’hui âgé de 77 ans, malgré son âge avancé, sa santé fragile et la limite de son mandat est une surprise pour la plupart des observateurs du Vietnam.

Il a été suggéré en septembre 2020 qu’il pourrait y avoir une possibilité pour M. Trong de rester après le 13e Congrès, mais en tant que président de l’État plutôt qu’en tant que secrétaire général. En effet, si le Parti peut le traiter à nouveau comme un «cas spécial» pour l’exempter de la limite d’âge, la constitution du Parti prévoit que «le poste de secrétaire général ne peut être occupé par une personne pendant plus de deux mandats consécutifs».

Alors que M. Trong remplit son deuxième mandat de secrétaire général et que le parti n’a annoncé aucune intention de réviser sa constitution, la limite du mandat sera le plus grand obstacle pour lui de rester à la tête du parti. Mais la décision prise lors du 15e Plénum signifie que la révision de la constitution du Parti sera faite dès le congrès pour lui ouvrir la voie pour conserver le poste le plus élevé.

Le Premier ministre Nguyen Xuan Phuc devait également prendre sa retraite s’il ne pouvait pas obtenir le poste de secrétaire général. En effet, M. Phuc, aujourd’hui âgé de 67 ans, a dépassé la limite d’âge de 65 ans, et la norme est qu’une seule exemption d’âge est réservée au poste de secrétaire général. Mais le 15e plénum a décidé que cette fois-ci, M. Phuc serait également traité comme un cas particulier pour prendre la présidence de l’État.

Les dispositions prises pour que M. Chinh assume la fonction de Premier ministre et M. Hue la présidence de l’Assemblée nationale sont moins surprenantes. Cependant, la promotion de M. Chinh au poste de Premier ministre est également une rupture avec la tradition car, depuis 1986, ce poste a toujours été réservé à l’un des vice-premiers ministres de la législature précédente, poste que M. Chinh n’a jamais occupé.

Le fait qu’aucune des quatre premières positions ne soit détenue par un politicien du Sud signifie que le Parti a également décidé d’écarter une autre norme importante, celle de maintenir une représentation régionale équilibrée parmi les quatre premières positions du pays. Pour compenser cela, l’un des politiciens du Sud du prochain Politburo devrait devenir membre permanent du Secrétariat du Parti, la cinquième position politique dans la hiérarchie du PCV.

Tous ces changements sont sans précédent. La décision des dirigeants du Parti d’aller aussi loin pour enfreindre les normes établies pour effectuer ces changements montre qu’ils ont fait des compromis importants entre eux pour rendre possibles des solutions apparemment impossibles. Mis à part la convenance politique, leurs manœuvres politiques pour négocier des options limitées et surmonter les contraintes circonstancielles et institutionnelles doivent être reconnues. Le but ultime pour eux est de proposer une nouvelle structure de direction acceptable pour toutes les factions. Au cours de ce processus, l’institutionnalisation de la politique de succession du Parti peut temporairement passer au second plan.

Les décisions de leadership et les changements institutionnels apportés au 15e Plénum du CPV auront des implications importantes pour le CPV et la politique vietnamienne dans les années à venir. Les développements qui suivront le 13e Congrès national du CPV seront des indications importantes sur la manière dont le Parti gérera les conséquences possibles de son départ des normes établies, en particulier l’imprévisibilité et l’instabilité croissantes de sa politique de succession.

Pour l’instant, une question immédiate est de savoir si les décisions adoptées au 15e Plénum seront approuvées par les 1587 délégués participant au 13e Congrès national du Parti, qui se réunira du 25 janvier au 2 février 2021. Bien que la probabilité que certaines de ces décisions soient inversé au congrès est très faible, rien ne doit être tenu pour acquis. Après tout, les politiciens vietnamiens ont prouvé qu’ils maîtrisaient «l’art du possible». Des surprises de dernière minute, aussi improbables soient-elles, pourraient se reproduire.

Le Hong Hiep est membre de l’Institut ISEAS-Yusof Ishak.

Une version antérieure de cet article est apparue Ici sur Pivot.

Source : East Asia Forum


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