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Asie du Sud-Est : Hillary Clinton seule à la barre

La secrétaire d’Etat américaine reprend le chemin de l’Asie de l’Est où les disputes territoriales ne perdent rien de leur acuité. Une dernière grande tournée ?

Hillary Clinton s’est envolée le 30 août pour les îles Cook, où elle participe à un forum avant de gagner l’Indonésie, la Chine, Timor Leste, le sultanat de Brunei. Sa dernière étape sera Vladivostok, en Russie, afin d’y participer, sur l’île Rousski, au sommet annuel de l’Apec les 8 et 9 septembre. Elle y représentera le président Barack Obama, retenu par sa campagne électorale pour un deuxième mandat.

L’étape la plus importante de cette tournée sera vraisemblablement une visite à Pékin, les 4 et 5 septembre, dont le programme n’a pas encore été fixé. Mme Clinton compte aborder avec les dirigeants chinois, selon sa porte-parole Victoria Nuland, «un large éventail de sujets importants pour les relations sino-américaines» avant le renouvellement de la direction chinoise prévu à l’automne. «Nous continuons de réclamer, a-t-elle ajouté, des échanges multilatéraux à propos d’un Code de conduite en mer de Chine du Sud qui observe la loi internationale et le traité sur la Loi de la mer». Les eaux de la mer de Chine méridionale font l’objet de revendications non seulement de Pékin et de Taïwan mais aussi de quatre Etats de l’Asean (Vietnam, Philippines, Malaisie et Brunei).

Inaugurés par Bill Clinton en 1991, les sommets des 21 Etats ou entités de l’Apec (Asia-Pacific Economic Cooperation)  sont devenus les grands-messes annuelles d’une région qui regroupe 40% de l’humanité et représente 44% du commerce international. Elles ne sont pas l’occasion d’accords globaux mais d’échanges, notamment bilatéraux, qui ont une importance évidente. Mme Clinton ne rendra pas visite à deux alliés des Etats-Unis, le Japon et la Corée du Sud, séparés par un contentieux territorial.

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Société Thaïlande

Un député de Thaïlande explique l’attraction pour les maris farang

Sunai Julphongsathorn, un député du parti Peua Thaï, déclenche une controverse en prononçant un discours sur l’intérêt de se marier avec un Occidental.

Son discours, le 19 août, devant une assemblée d’un millier de Chemises rouges (adversaires de l’establishment traditionnel) dans la province de Samut Prakarn, est au centre d’une de ces tempêtes qui soufflent de temps à autre sur l’internet, balayant les réseaux sociaux et faisant s’agiter frénétiquement les souris et crépiter les claviers. Sunai Julphongsathorn, député du parti gouvernemental Peua Thaï et président de la Commission parlementaire des Affaires étrangères, a créé la controverse en expliquant pourquoi, selon lui, les femmes pauvres des campagnes thaïlandaises se mariaient à des farangs (Occidentaux), indiquant notamment que « les gouvernements européens vous donnent tout gratuitement » (à travers le système d’assistance sociale) et « vous paient pour apprendre leur langue ».

Ces propos ont été repris par le site anglophone www.coconutsbangkok.com et apparemment tirés de leur contexte, ce qui a occasionné la polémique. Selon le site Bangkok Pundit, qui analyse dans le détail le discours du parlementaire, le principal argument de son intervention est de mettre en relief la faiblesse de la politique gouvernementale thaïlandaise en matière d’assistance sociale et, par comparaison, l’excellent système européen dans ce domaine. Toutefois, Sunai semble avoir quelque peu dérapé en indiquant qu’apprendre une langue européenne avec un mari farang était facile car on apprenait « dans une position couchée » et qu’on se réveillait (supposément après la leçon) « en étant enceinte », alors qu’apprendre en position assise est beaucoup plus difficile. Après l’avalanche de critiques, Sunai a dit qu’il n’avait jamais eu l’intention d’insulter les femmes thaïlandaises.

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Birmanie Politique

La Birmanie allège sa liste noire

Le gouvernement civil de Birmanie a retiré 2.000 noms de sa liste noire, sur laquelle il reste environ 4.000 interdits de séjour.

Un article de trois paragraphes à la dernière page du quotidien New Light of Myanmar du 28 août a annoncé la nouvelle : environ 2.000 noms ont été retirés de la mystérieuse liste noire, précisant qu’il y restait toutefois quelque 4.000 indésirables. C’est donc un geste limité du gouvernement civil du président Thein Sein, qui s’inscrit dans la logique de son appel au retour des exilés.

Des milliers de Birmans – fonctionnaires, membres des professions libérales ou journalistes – avaient quitté leur pays dans les années 1980 sous l’emprise de fer du régime militaire, idiosyncratique et corrompu de Ne Win. Après la grande révolte de l’été 1988, des milliers d’autres, pour la plupart des étudiants qui avaient participé aux manifestations, avaient aussi pris le chemin de l’exil pour échapper à la terrible répression qui avait suivi le coup d’Etat du 18 septembre de cette année-là. Placés sur la liste noire, ils ne pouvaient remettre le pied sur le sol birman sous peine d’être incarcéré.

Le contenu exact de cette liste noire n’est pas connu, mais on sait qu’il y figure aussi des étrangers, comme par exemple certains journalistes ainsi que l’actrice malaisienne Michelle Yeoh, laquelle a interprété le rôle de l’opposante Aung San Suu Kyi dans le film « The Lady » de Luc Besson. Chacun semble donc devoir vérifier par lui-même s’il y figure ou non. Cette levée partielle des interdictions de séjour pourrait inciter certains Birmans exilés à rentrer au pays à un moment où celui-ci a plus besoin que jamais de ses ressources humaines. Le départ des exilés sous le régime militaire avait en effet privé la Birmanie de ses forces vives et aggravé son enlisement économique.

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Politique Thaïlande

Thaïlande : tensions entre le gouvernement et l’armée

Le transfert de trois généraux, occupant de hautes fonctions au ministère de la Défense, témoigne d’un bras de fer  autour du prochain remaniement de la direction des forces armées.

En surface, c’est un simple conflit entre le ministre de la Défense de la Thaïlande et un haut fonctionnaire du ministère à propos d’une nomination. Derrière, il s’agit de la question fondamentale du pouvoir politique des militaires, dans un pays où, sous couvert de « sécurité nationale », les hommes en uniforme s’arrogent des droits très étendus et sans commune mesure avec ceux dont ils jouissent sous un régime démocratique. Le général d’aviation Sukumpol Suwanatat, ministre de la Défense, a transféré le 27 août trois hauts responsables du ministère à des postes subalternes, après que l’un d’entre eux – le général Sathian Phoemthongin – se soit publiquement opposé au choix du ministre pour son remplacement. Non seulement ce général a sollicité par voie de presse la cheffe de gouvernement Yingluck Shinawatra pour qu’elle bloque le nominé du ministre pour le poste de secrétaire permanent du ministère (l’équivalent d’un secrétaire général en France) mais, parallèlement, il a aussi transmis une plainte écrite à deux conseillers privés du roi, les anciens premiers ministres (et ex-chefs de l’armée de terre) Prem Tinsulanonda et Surayudh Chulanont.

La question qui se pose est de savoir pour qui roule l’audacieux Sathian ? Selon le quotidien The Nation, le ministre Sukumpol est un homme-lige de l’ancien premier ministre Thaksin Shinawatra, lequel s’est exilé en 2008 quelques mois avant d’être condamné par la Cour suprême pour abus de pouvoir. Il lui aurait même rendu visite récemment pour recueillir ses instructions. Les ennemis les plus tenaces de Thaksin sont clairement identifiés : le chef de l’armée Prayuth Chan-Ocha et les leaders du parti Démocrate d’opposition. Peut-on dès lors en conclure que le général Prayuth soit derrière la rébellion de Sathian ? The Nation semble hésiter à franchir ce pas, alors même que Sathian a déclaré, en apprenant son transfert : « Les chefs des forces armées vont connaître le même sort que moi ». Le remaniement annuel de la direction  des forces armées, annoncé officiellement le 1er octobre prochain, est en train de se jouer. Sans que l’on puisse déchiffrer précisément les manœuvres des uns et des autres, il est clair que, cette année, un bras de fer se joue dans ce cadre entre le « clan Thaksin » et le général Prayuth, un des piliers au sein du camp des adversaires de l’ancien premier ministre déchu, renversé par un coup d’Etat en septembre 2006 et dont la sœur cadette, Yingluck, dirige actuellement le gouvernement.

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Indonésie Politique

Indonésie : La traque de 3 Français soupçonnés de terrorisme

La police française aurait informé Jakarta que trois ressortissants français soupçonnés de terrorisme tentaient de se réfugier en Indonésie.

Ansyaad Mbai, patron de l’Agence nationale de lutte contre le terrorisme, a déclaré le 26 août au Jakarta Post que la police française avait averti l’Indonésie que trois Français tentaient de se réfugier dans le pensionnat musulman de Ngruki, à Solo (Surakarta, Java Central). Parmi eux figurerait Frédéric C. Jean Salvi, 41 ans, dit Ali, converti à l’islam voilà douze ans lors d’un séjour en prison, recherché par Interpol et qui aurait trempé dans des attentats anti-indonésiens en France. Salvi avait démenti voilà deux ans, dans un entretien accordé par courriel à France-Soir, toute activité terroriste.

A Ngruki, dans la banlieue de Solo, se trouve la fameuse école coranique Al-Mukmin fondée voilà plus de quarante ans par Abou Bakar Baachir, un prédicateur âgé de 73 ans et qui purge aujourd’hui une peine de 15 ans de prison pour avoir financé un camp d’entraînement de terroristes dans la province d’Atjeh, dans le nord de Sumatra. Baachir est censé avoir été l’émir de la Jemaah Islamiyah, groupe terroriste de l’Asie du Sud-Est lié à Al-Qaïdah, selon les services de renseignements occidentaux et indonésiens. Salvi aurait rencontré Baachir au Pakistan avant de se rendre en Indonésie y passer plusieurs années dans les milieux islamistes. A ce titre, selon Ansyaad Mbai, il figure depuis 2010 sur la liste des fugitifs les plus dangereux établie par Jakarta.

Salvi est soupçonné, selon le Jakarta Post, d’entretenir «des liens avec le réseau terroriste» responsable de la mort de sept personnes à Toulouse en mars 2012 et dont l’un des membres, Mohamed Merah, a été abattu par la police française. De son côté, Ngruki est considéré comme un foyer islamiste et plusieurs anciens élèves d’Al-Mukmin ont été impliqués dans des attentats terroristes, notamment celui qui a fait plus de 200 victimes à Bali en octobre 2002. «Nous surveillons de près le pensionnat de Ngruki et sommes en contact permanent avec les autorités françaises. Nous enquêtons sur la façon dont ces trois citoyens français sont rentrés en contact avec l’école et sur les raisons de leur projet de s’y rendre», a également déclaré Ansyaad Mbai, tout en ne fournissant aucune indication sur les deux compatriotes de Salvi.

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Analyse Cambodge Histoire Indonésie Politique

Indonésie : un parti influent prône le déni de mémoire

Si le public indonésien se pose de sérieuses questions sur les massacres de 1965, le Golkar, parti en tête dans les sondages, refuse ce devoir de mémoire.

«Que veulent-ils de plus ? Cela suffit, non ?». Telle est la réponse, selon le Jakarta Globe, de Leo Nababan, secrétaire général adjoint du Golkar, à propos des survivants des massacres de 1965-1966 en Indonésie (plus d’un demi-million de victimes) dont les droits civiques ont été progressivement restaurés depuis la chute de Suharto en 1998. Leo Nababan s’oppose à ce qu’un suivi officiel soit donné au rapport de Kommas HAM, la Commission nationale des droits de l’homme, qui a conclu quatre années d’enquête en estimant que la persécution et les meurtres des membres présumés du PKI (PC indonésien) en 1965-1966 représentent «une grossière violation des droits de l’homme».

Au nom de la lutte contre le communisme, a relevé Kommas HAM, de nombreux crimes ont été commis par les militaires : meurtres, expulsions, torture, viols et autres abus. Leo Nababan rétorque que les enseignements du communisme (et le PKI) étant toujours officiellement bannis depuis 1966, il n’y a aucune raison qu’une suite soit donnée au rapport de Kommas Ham par des services de l’Etat, contrairement à l’ordre donné par le président Susilo Bambang Yudhoyono à l’Attorney general.

Le Golkar (pour Golongan Karya ou «groupes fonctionnels») est le mouvement sur lequel l’autocrate Suharto s’est appuyé pour gouverner. A la fin du règne de Suharto (1966-1998), lequel est considéré comme le principal responsable des massacres de 1965-1966, le Golkar a emporté jusqu’à 70% des suffrages lors d’élections générales strictement contrôlées. Le problème est que le Golkar ne s’est pas effondré après le limogeage de Suharto voilà quatorze ans et que cette machine électorale a assez bien survécu pour se retrouver aujourd’hui en tête, de peu il est vrai, dans les sondages.

Leo Nababan n’est pas le seul à réclamer que cette sinistre page d’histoire soit oubliée. Priyo Budi Santoso, vice-président du Golkar, en a fait autant voilà quelques semaines en demandant au pays d’oublier ces massacres. Une frange politique de l’Indonésie s’oppose donc encore à ce que la lumière soit faite alors que deux générations d’Indonésiens ont été privées de leurs droits civiques, leurs biens étant saisis et les descendants des victimes étant, par exemple, longtemps interdits d’emploi ou même d’école.

Peu après ces massacres, donc avant la tragédie des Khmers rouges au Cambodge (1975-1979), un rapport interne de la CIA américaine avait conclu qu’ils ont été parmi les pires du XX° siècle, à ranger aux côtés des «purges soviétiques des années 1930, des crimes nazis pendant la Deuxième guerre mondiale, et du bain de sang maoïste au début des années 1950». Si le Golkar, qui soutient le gouvernement actuel, revient au pouvoir à l’occasion des élections de 2014 (présidentielle et législatives), le déni de mémoire se prolongera encore au moins quelques années, en dépit de l’indignation affichée par les militants des droits de l’homme.

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Cambodge Politique Thaïlande

Musulmans du Cambodge : RAS selon la diplomatie thaïlandaise

Le gouvernement thaïlandais tente d’atténuer les récents propos du chef de l’armée sur l’implication de Cambodgiens musulmans dans l’insurrection séparatiste dans le Sud de la Thaïlande.

C’était une de ces déclarations maladroites dont le bouillant général Prayuth Chan-Ocha, chef de l’armée de terre de Thaïlande, est coutumier. Il avait déclaré, le 21 août, qu’il pensait que des Cambodgiens musulmans étaient impliqués dans l’insurrection séparatiste qui secoue le Sud à majorité musulmane de la Thaïlande. La preuve avancée par l’officier était plutôt légère : « Nous savons que tous les Cambodgiens qui arrivent en Thaïlande ne rentrent pas au Cambodge ». Le ministère des Affaires étrangères du Cambodge avait réagi rapidement en protestant contre ces propos. Et le chef de la diplomatie thaïlandaise, Surapong Tovichakchaikul a, comme souvent, été obligé de recoller les morceaux, en niant que le gouvernement de Bangkok soupçonnait les voyageurs cambodgiens musulmans de participation à l’insurrection. Pour la plupart, a-t-il dit, ceux-ci traversent la Thaïlande et passent la frontière sud du pays pour se rendre en Malaisie, soit pour y travailler, soit pour visiter des parents qui y travaillent.

Du simple bon sens, mais qui a échappé au plus brillant des militaires de Thaïlande. Les accusations d’implication de musulmans étrangers dans l’insurrection séparatiste ne sont pas nouvelles. Les Chams du Cambodge et les Atjehnais d’Indonésie ont longtemps étaient des cibles favorites. Après la résurgence de l’insurrection en 2004, le général Kitti Rattanachaya, un ancien commandant de la 4ème armée en charge du Sud, faisait aussi les gros titres de la presse par ses déclarations sur les liens entre la Jemaah Islamiya (le réseau terroriste basé en Indonésie) et les insurgés Malais musulmans du Sud. La plupart des analystes du conflit insistent néanmoins sur le caractère très peu internationalisé de la rébellion.

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Politique Thaïlande

Thaïlande: 10 000 rebelles dans le Sud musulman, selon l’armée

L’armée thaïlandaise a publié un manuel en deux volumes où elle explique la structure et les objectifs du mouvement séparatiste qui a refait surface en 2004 dans le Sud à majorité musulmane.

Le titre – « Ordre de bataille » – pourrait annoncer un film d’action à grand spectacle avec des vedettes hollywoodiennes, mais il s’agit plus prosaïquement d’un manuel en deux volumes publié par l’armée thaïlandaise, qui décrit sur 500 pages l’organisation de l’insurrection séparatiste. Selon la journaliste du Bangkok Post spécialisée dans les affaires militaires, Wassana Nanuam, le deuxième volume est le plus frappant : il dresse une liste de quelque 10.000 membres de l’insurrection, allant des politiciens de niveau national aux simples villageois en passant par les chefs d’écoles religieuses locales. Sur ce total, 866 personnes citées sont l’objet de mandats d’arrêt. Le réseau insurrectionnel serait coordonné par un conseil central de 20 personnes, appelé le Dewan Pimpinan, dont le secrétaire-général est, selon le manuel, Sapae-ing Basor, un ancien directeur d’école coranique recherché par les autorités.

Le premier volume décrit l’organisation du réseau insurrectionnel en brossant d’abord un tableau de la rébellion séparatiste avant janvier 2004 et de son évolution après. Une source militaire citée par Wassana Nanuam indique que plusieurs factions séparatistes sont en concurrence au sein de cette nébuleuse. L’insurrection séparatiste avait connu une résurgence en janvier 2004 après un audacieux raid organisé par une nouvelle génération de rebelles sur un camp militaire dans la province de Narathiwat. Depuis, les violences ont causé la mort d’environ 5.200 personnes. Les informations publiées par l’armée dans ce manuel sont à prendre avec certaines précautions. En 2010, l’armée avait publié, au plus fort des tensions entre le gouvernement et les Chemises rouges (adversaires de l’establishment traditionnel), le schéma d’un « réseau anti-monarchiste » – schéma qui s’était révélé par la suite largement fantaisiste.