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Indonésie Société

L’islamisation légale se renforce en Indonésie

Atjeh est la seule province indonésienne où la charia est légale. Mais des éléments de la loi islamique sont adoptés un peu partout à travers l’archipel.

Tout en évoquant la croyance en un seul dieu, la Constitution indonésienne est séculière. L’Indonésie n’est pas un Etat religieux et la seule province où la charia est légale est, depuis 1999, celle d’Atjeh, à l’extrémité nord de l’île de Sumatra, qui bénéficie d’une autonomie spéciale. Toutefois, depuis le début du siècle, les arrêtés des municipalités et des régences (districts) introduisent des éléments de la loi islamique : port du voile, interdiction d’alcool, autorisation de sortie, etc.

En-dehors d’Atjeh, qui ne regroupe que 5 millions sur les 240 millions d’Indonésiens, le Jakarta Post a recensé, dans ses éditions du 5 juin 2012, 79 de ces arrêtés islamiques, essentiellement sur les grandes îles de Java et de Sumatra. Mais certains ont également été décrétés à Kalimantan (partie indonésienne de l’île de Bornéo),  à Sulawesi (Célèbes) ou dans l’est de l’archipel.

Le gouvernement et le Parlement de Jakarta manifestant une grande passivité, les administrations locales continuent de prendre des mesures contraires à la Constitution. Leur application est plus problématique dans un pays à forte majorité musulmane mais qui compte des minorités religieuses (entre 10% et 15% de la population) dont les aspirations sont de moins en moins respectées. La police évite également d’intervenir.

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Société Viêtnam

Prostitution haut de gamme à Ho-Chi-Minh-Ville

La police a réussi, ces derniers jours, deux coups de filet contre des réseaux de prostituées de luxe dans la mégapole méridionale du Vietnam et dans la capitale.

Reines de beauté, mannequins et jeunes femmes particulièrement sexy faisaient partie d’un réseau de prostituées que la police a démantelé à Ho-Chi-Minh-Ville le 2 juin à l’occasion d’un raid «dans un grand hôtel du 1er arrondissement», selon le quotidien Tuoi Tre. C’est dans ce quartier que se trouvent les cinq étoiles du principal centre économique du Vietnam. Le réseau était dirigé par une femme âgée de 40 ans, Trân Quang Mai, censée avoir également fourni à un «riche client» une ancienne reine de beauté du delta du Mékong, âgée de 27 ans, Vo Thi My Xuân. Le prix de la passe se serait élevé à 2 000 dollars (1 500€), la moitié de la somme revenant à la prostituée.

Xuân avait été couronnée Miss Mékong du Sud en 2009. Dans la foulée, elle avait participé à des défilés de mannequins et posé pour des magazines. Elle travaillait pour une compagnie de marketing. La police de Ho-Chi-Minh-Ville a également arrêté, le même jour, une prostituée de luxe fournie par Mai (2 500 dollars la passe) ainsi qu’une étudiante (250 dollars la passe).

A Hanoi, dans un hôtel du district de Ba Dinh, la police a pris sur les faits deux couples. Parmi les détenues figurerait Hong Ha, une actrice et mannequin, supposée se faire payer de 1 000 à 1500 dollars la passe. Elle a joué dans plusieurs films au Vietnam et à l’étranger.

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Philippines Politique

Des servantes victimes de la crise entre Manille et Pékin

La dispute concernant le récif de Scarborough en mer de Chine du Sud ne fait pas l’affaire des employées de maison philippines en Chine. Elles se terrent.

Selon les statistiques officielles philippines, elles étaient un peu plus de douze mille en Chine en 2011. En fait, elles sont plus nombreuses. Les nouveaux riches chinois apprécient leurs services et afficher une domestique philippine est affaire de statut social, même si elle coûte deux fois plus chère qu’une chinoise. En outre, les Philippines parlent l’anglais et acceptent à la fois de faire le ménage et de s’occuper des enfants (contrairement à la plupart des domestiques chinoises).

Mais, en raison de la crise entre Pékin et Manille à propos de la souveraineté sur les eaux de la mer de Chine du Sud, les servantes philippines en Chine se cachent, surtout quand leurs papiers ne sont pas en règle. Selon le Straits Times de Singapour, un règlement chinois en date de 1996 interdit l’emploi de travailleurs étrangers par des individus ou des foyers à domicile. Les domestiques étrangers sont donc souvent déclarés comme employés de sociétés.

Catholiques pratiquantes, les Philippines renoncent même à fréquenter l’église le dimanche. Elles ont peur qu’un contrôle les contraigne à prendre l’avion de Manille. En outre, des Chinois ont affirmé qu’ils avaient, par nationalisme, renvoyé leur personnel philippin.

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Birmanie Politique

Tensions inter-religieuses en Birmanie

Après des violences meurtrières contre des musulmans dans le nord-ouest de la Birmanie, le gouvernement tente d’apaiser les tensions.

Le gouvernement birman a mis en garde contre tous «débordements anarchiques» après des incidents violents le 3 juin qui ont causé la mort de dix musulmans dans l’Etat Rakhine, où les relations entre bouddhistes et musulmans sont traditionnellement mauvaises. La télévision d’Etat a averti que ceux qui enfreignent la loi seraient sévèrement punis. Le 3 juin, 300 bouddhistes, enflammés par un cas de viol et de meurtre d’une des leurs, ont stoppé un autocar transportant des pèlerins musulmans près de la ville de Taunggoke, à 300 km au nord de Rangoon, puis ont battu à mort neuf passagers ainsi qu’un dixième qui accompagnait l’autocar en voiture.

Parallèlement, une douzaine de bouddhistes parmi plusieurs centaines qui encerclaient un poste de police ont été blessés le même jour, à Sittwe, la capitale de l’Etat Rakhine, après que les forces de l’ordre eurent lancé des grenades lacrymogènes et tiré en l’air. Les tensions entre les Arakanais bouddhistes et les musulmans locaux, appelés les Rohingyas, existent depuis des décennies. Les Rohingyas, descendants d’Indiens musulmans amenés en Birmanie par les Britanniques à l’époque coloniale, sont dépourvus de nombreux droits et se voient refuser la nationalité birmane. Selon un militant des droits de l’Homme dans l’Etat Rakhine, aucun des musulmans tués le 3 juin n’était un Rohingya. Ces confrontations sont les premières à avoir lieu depuis que le gouvernement du président Thein Sein a autorisé sous certaines conditions – notamment l’obtention d’une autorisation cinq jours à l’avance – les manifestations publiques.

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Viêtnam

Vietnam: détournement de l’aide danoise

Le Danemark a suspendu le financement de trois projets de recherche sur le changement climatique à la suite de fraudes. Hanoi enquête et promet des sanctions.

Pham Vinh Binh, ministre des affaires étrangères du Vietnam, a promis, le 4 juin, de punir sévèrement, s’il y a lieu, les fonctionnaires impliqués dans le détournement de l’aide officielle danoise. Trois jours auparavant, selon le quotidien Thanh Nien, le ministère danois des affaires étrangères avait publié un audit de Price Waterhouse Coopers (PWC) faisant état de l’utilisation inappropriée de 547 000 dollars d’aide danoise à la recherche concernant le changement climatique. Le Vietnam est l’un des pays les plus exposés à ce changement. Les deux ministères vietnamiens en charge de ces projets sont celui de la Science et de la Technologie et celui de l’Agriculture et du Développement rural.

Selon PWC, les irrégularités affecteraient 23% du budget total des projets  et auraient été commises par des participants vietnamiens. La plupart des impropriétés concerneraient des salaires, des bonus et des remboursements de frais. L’un des cas les plus flagrants aurait été l’octroi d’une bourse à la fille du coordinateur d’un projet, avec l’accord du directeur du projet.

Le précédent le plus récent concernant l’aide étrangère au Vietnam avait été la condamnation à la prison à vie de Huynh Ngoc Si, un haut fonctionnaire de la municipalité de Ho-Chi-Minh-Ville, qui avait accepté un pot-de-vin de 262 000 $ (environ 200 000€). Cette affaire avait conduit Tokyo a suspendre son aide au développement de décembre 2008 à février 2009.

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Cambodge Politique

Procès khmer rouge : un juge visait Chea Sim et Heng Samrin

Un juge d’instruction, depuis démissionnaire, voulait requérir la participation des présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale du Cambodge au procès khmer rouge.

Quatre dirigeants cambodgiens, parmi lesquels le président du Sénat Chea Sim et le président de l’Assemblée nationale Heng Samrin, avaient été cités comme «personnes d’intérêt» par un juge d’instruction, selon un document confidentiel du Tribunal pour juger les crimes khmers rouges obtenu par le quotidien australien The Age. Selon ce document, Chea Sim, Heng Samrin, ainsi que l’actuel chef de l’armée cambodgienne et un autre sénateur, occupaient des positions importantes au sein de l’armée khmère rouge au moment où celle-ci lançait des incursions meurtrières contre des villages vietnamiens dans le delta du Mékong en 1977 et 1978 et devraient détenir «des informations cruciales» sur ces opérations. Heng Samrin, qui était commandant en chef adjoint des troupes concernées, est considéré comme le mieux informé des quatre. Le document estimait que leur témoignage contribuerait grandement au dossier numéro trois, dans le cadre duquel l’ancien chef de l’armée de l’air khmère rouge Sou Meth et l’ancien chef de la marine khmère rouge Meas Muth, soupçonné entre autres d’avoir fait exécuter deux yachtsmen néo-zélandais, devaient être jugés.

Le gouvernement cambodgien a finalement «interdit» toute poursuite judiciaire au-delà du dossier numéro deux, c’est-à-dire du procès des trois ex-leaders khmers rouges actuellement en cours à Phnom Penh : l’ex-chef d’Etat Khieu Samphan, l’ex-chef de la diplomatie Ieng Sary et l’ex-numéro deux du régime Nuon Chea.

Heng Samrin et Chea Sim avaient déjà été convoqués comme témoins lors d’audiences concernant le rôle de Nuon Chea. Ils avaient refusé de répondre à la convocation. Le juge d’instruction auteur de ce document confidentiel, le Suisse Laurent Kasper-Ansermet, a démissionné de ses fonctions début mai car il estimait être «complétement bloqué dans son travail par le personnel cambodgien». Son prédécesseur avait lui-même démissionné en octobre 2011 à cause de ce qu’il avait qualifié «d’ingérences gouvernementales» dans l’instruction.

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Politique Société Viêtnam

Vietnam : report des exécutions de condamnés à mort

Le sort de centaines de condamnés à mort est suspendu depuis la décision de remplacer, en juillet 2011, les pelotons d’exécution par des injections mortelles.

Les autorités ne se sont pas encore décidées sur le poison à administrer aux condamnés à mort, selon le Gulf Times (Doha, Qatar), qui cite les médias du Vietnam. «Nous avons plus de quatre cents prisonniers condamnés à mort et nous ne pouvons pas les exécuter», aurait déclaré au quotidien Tuoi Tre (Jeunesse), un vice-ministre de la Sécurité, en ajoutant : «les dossiers de plus de cent d’entre eux sont complétés et leur exécution devrait avoir eu lieu, mais nous ne disposons pas de la drogue nécessaire pour y procéder.» L’abandon des pelotons d’exécution a été décidé en 2011 pour des «raisons humanitaires».

D’autre part, le porte-parole du ministère vietnamien des affaires étrangères, Luong Thanh Nghi, a rejeté «certains commentaires» du rapport sur les droits de l’homme au Vietnam qui vient d’être publié par le Département d’Etat américain, affirmant qu’ils se fondaient sur de «fausses informations.» Nghi a estimé qu’au cours des dernières années, les relations entre les Etats-Unis et le Vietnam avaient connu des «développements positifs, y compris dans le domaine des droits de l’homme».

Enfin, un tribunal a rejeté les appels de deux dissidents condamnés pour avoir «terni l’image du Parti communiste et du régime socialiste.» Ho Thi Bich Khuong, une bloggeuse, a été condamnée en décembre 2011 à cinq ans de prison suivis de trois ans d’assignation à résidence. Nguyên Truong Ton, un pasteur, a été condamné à deux ans de prison suivis de deux ans d’assignation à résidence.

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Analyse Politique Thaïlande

Chronique siamoise : le principe de relativité

L’image de la Birmane Aung San Suu Kyi discutant, pendant son récent séjour à Bangkok, avec le Thaïlandais Abhisit Vejjajiva inspire des sentiments mélangés. Ces deux brillants politiciens, tous deux diplômés dans la même discipline (Sciences politiques) de l’Université d’Oxford, tous deux des exemples de leaders asiatiques qui ont mûri dans le giron de la vieille Europe,  apparaissent aujourd’hui bien différents l’un de l’autre. Ce qui les sépare n’est pas seulement l’âge – Aung San Suu Kyi a 67 ans et Abhisit 48 ans -, mais aussi le chemin parcouru : Aung San Suu Kyi a émergé dans l’arène politique en prenant la tête, en 1988, d’un mouvement pro-démocratique écrasé sous la mitraille par les militaires birmans ; Abhisit, alors Premier ministre, a fait réprimer dans le sang par l’armée les manifestations de Bangkok en mai 2010. A quoi, il faut peut-être ajouter un parcours personnel et une approche culturelle que le passage par les allées boisées et venteuses de l’Oxfordshire n’a pas effacé.

Aung San Suu Kyi a passé une partie importante de sa jeunesse en Inde, où elle s’est imprégnée des écrits de Gandhi ; elle a fait sa propre synthèse de la philosophie d’action du Mahatma et en a tiré une morale politique basée sur la fidélité à des principes intangibles, posés d’entrée de jeu. Un manque de flexibilité qui, parfois, semble la placer en contradiction avec ses propres partisans. Devenu Premier ministre, Abhisit a, lui, vite tourné le dos aux «principes» pour verser dans les combines et les compromissions qui sont le lot quotidien de la politique thaïlandaise.

Non pas que les principes n’ont pas droit de cité dans le discours politique thaïlandais. Depuis son éviction du pouvoir par un coup d’Etat en septembre 2006, l’ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra a ainsi maintes fois invoqué la démocratie et la justice pour fustiger ses ennemis politiques. Mais ces principes sont le plus souvent invoqués a posteriori : c’est le même Thaksin qui, alors au pouvoir, déclarait en 2004 que la «démocratie n’était pas une fin en soi». Ils semblent être plus des instruments rangés et ressortis au gré des circonstances que des règles du jeu.

L’actuelle impasse de la politique thaïlandaise, rendue manifeste par les très fortes tensions autour du projet de loi de réconciliation, illustre ce point. Les mêmes politiciens, comme Abhisit et les autres dirigeants du Parti démocrate, qui ont profité du coup d’Etat de 2006 pour s’emparer du pouvoir, invoquent aujourd’hui l’inconstitutionnalité d’un projet de loi visant à permettre une réforme de la constitution. Mais les militaires, soutenus par les Chemises jaunes et alliés d’Abhisit n’ont-ils pas, en 2006, commis l’acte le plus grave qui soit contre un gouvernement élu et constitutionnel ? N’ont-ils pas d’un trait de plume aboli la constitution, saluée comme la plus démocratique de l’histoire de la Thaïlande, de 1997 ? Abhisit n’a-t-il pas été, tout au long, complice de ce viol éhonté de la légitimité constitutionnelle ? Il suffit d’ajouter que l’initiateur de ce projet de loi de réconciliation est celui-là même qui avait mené le coup de 2006 (le général Sonthi Boonyaratklin) pour compléter ce tableau surréaliste.

De combines en compromissions, la situation est devenue inextricable. Aucune voie de sortie n’est visible. Même les juges sont décrédibilisés, ayant trop longtemps préféré choisir l’option facile des «jugements politiques». La décision de la Cour constitutionnelle, juste après l’élection triomphale de Thaksin en 2001, de l’acquitter de l’accusation de fausse déclaration de patrimoine et de souscrire à son explication «d’erreur honnête» avait lancé la mécanique infernale qui continue aujourd’hui à tourner.