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Indonésie Société

A Sulawesi, quand quinze flics boivent un coup de trop

A Manado, chef-lieu du nord de Sulawesi (ex-Célèbes), quinze flics éméchés ont menacé l’assistance de leurs armes et saccagé un bar.

Le grabuge, rapporte le Jakarta Globe le 2 mai, a commencé sur le parking du bar au moment où ce dernier s’apprêtait à fermer. Une voiture, propriété de l’un des policiers indonésiens, bloquait la sortie. «Mon ami leur a juste demandé de déplacer leur voiture. Ils l’ont frappé», a raconté un employé du bar. L’employé et quelques autres clients ont essayé de calmer la situation.

Non seulement ils ont essuyé des coups mais les flics ont, sur leur lancée, pénétré dans le bar, selon d’autres témoins, et se sont mis à frapper d’autres employés du bar. Quand ces derniers ont tenté de se défendre, les policiers «ont dégainé leurs armes et les ont pointées vers nous», a rapporté l’employé précité. «Nous nous sommes mis à courir», a-t-il ajouté.

Le manager du bar a rapporté l’incident à la police, laquelle a confirmé les faits. Un porte-parole du commandement local de la police pour la province a affirmé qu’une enquête avait été lancée. Les policiers «pourraient être démis de leurs fonctions et renvoyés», a-t-il estimé. Des sanctions sont rarement prises en Indonésie. L’histoire ne dit pas l’endroit où les flics se sont saoulés. Etaient-ils de service ? Si ce n’était pas le cas, pourquoi étaient-ils armés ?

 

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Asie Indonésie Société

Un éléphant sauvage empoisonné par des paysans

Dans le district d’Atjeh Jaya, à Sumatra, un éléphant s’est effondré après plusieurs heures de souffrance. Des paysans l’auraient empoisonné.

Il s’agit d’une femelle d’une vingtaine d’années. «Nous l’avons vue chanceler avant de s’effondrer», a déclaré un garde forestier au Jakarta Post. Elle était accompagnée d’un éléphanteau de trois ans retrouvé près de la carcasse de sa mère. L’incident s’est produit sur une plantation de palmiers à huile, en bordure d’une forêt où vivent encore une quarantaine d’éléphants sauvages et à proximité d’une piste d’éléphants.

Le remplacement des forêts par des plantations a considérablement réduit l’habitat des éléphants sauvages en Indonésie. Les éléphants circulent donc sur dans les plantations, ou dans les fermes, et s’en prennent parfois à l’habitat humain. Pour éviter les destructions, la procédure prévue par les gardes, le cas échéant, est de les chasser à l’aide d’éléphants domestiqués. Mais encore faut-il que les paysans ou planteurs avertissent les gardes forestiers de leur présence.

Ce qui n’est pas toujours le cas. Des planteurs, pour s’en débarrasser définitivement, préfèrent parfois les empoisonner plutôt que d’alerter les autorités. «Nous pensons que la présence de l’éléphant n’a jamais été rapportée parce que les résidents voulaient l’abattre eux-mêmes», a déclaré un responsable local, tout en précisant que le fait était rare. Une autopsie a été ordonnée et les résultats permettront de savoir les causes de la mort.

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Indonésie Société

De plus en plus de fumeurs en Indonésie

Les bénéfices des grandes marques de cigarettes ne cessent d’augmenter en Indonésie. Et ce n’est pas fini.

Les campagnes et les mesures anti-tabac ont beau se multiplier en Indonésie, les fumeurs y sont de plus en plus nombreux. Rien n’y fait. En 2011, Aldi Rizal, âgé de 2 ans, avait fait sensation en consommant deux parquets de cigarette par jour (il a arrêté depuis). Plus de 400 000 enfants âgés de 10 à 14 ans fumaient en 2010 (contre 71 000 en 1995). Selon le Jakarta Globe, la Commission nationale pour la protection de l’enfance pense que leur nombre était le double voilà deux ans.

Selon le Jakarta Post, le premier fabricant de cigarettes, Hanjaya Mandala Sapoerna, a vu les recettes de ses ventes augmenter de 31,56% pendant le premier trimestre de 2012 (et ses bénéfices augmenter de 37,74% par rapport au premier trimestre 2011). Le deuxième fabricant national, Gudang Garam, a vu les siennes croître de 21,07% (et ses bénéfices de 10%).

L’une des raisons: alors que le pouvoir d’achat augmente régulièrement dans une économie à la croissance solide, le prix des cigarettes reste peu élevé, ce qui permet aux fabricants de reporter sur le consommateur le poids de taxes supplémentaires (déjà + 16% en 2012). Le paquet de cigarettes le plus populaire coûte moins d’un euro (contre plus de 3 € à Singapour). La deuxième raison : les mises en garde contre les effets du tabac sur la santé ont une influence encore très limitée. Dans le quatrième pays le plus peuple du monde, avec 240 millions d’habitants, deux cent mille individus sont morts en 2011 de maladies liées à la consommation de tabac.

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Asie Philippines Politique

Washington rassure Manille sur sa sécurité

Alors qu’un face-à-face entre Chinois et Philippins se poursuit en Mer de Chine du Sud, l’Amérique s’engage à renforcer la faible marine de guerre de Manille.

Depuis le 8 avril, un face-à-face sino-philippin a lieu dans l’est de la Mer de Chine du Sud à proximité des récifs de Scarborough, donc à 220 km à l’ouest de Luçon, le nord de l’archipel des Philippines. Aussi, la réunion, le 2 mai à Washington, une sorte de conseil de guerre américano-philippin n’a pas manqué d’attirer l’attention. Hillary Clinton, secrétaire d’Etat, et Léon Panetta, secrétaire à la défense, y ont reçu leurs homologues philippins, Albert del Rosario et Voltaire Gazmin.

Pékin et Manille se disputent la propriété de Scarborough. Le 2 mai, les Etats-Unis ont réitéré leur neutralité en ce qui concerne la controverse sur la souveraineté. Mais Hillary Clinton a rappelé que Washington était contre le recours à la force pour régler les contentieux en Mer de Chine du Sud. Les Etats-Unis vont continuer d’aider l’indigente marine de guerre philippine à se renforcer et entendent «demeurer en étroit contact avec notre allié, les Philippines», a ajouté Hillary Clinton.

La longueur inhabituelle du face-à-face entre Chinois et Philippins comporte le risque d’abcès de fixation. Celui d’une issue brutale au conflit – ou d’une bavure – ne peut être totalement écarté. Le secrétaire d’Etat del Rosario a rappelé, pour sa part, que les Etats-Unis étaient liés aux Philippines par «un traité de défense mutuelle».

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Indonésie Société

L’appel public à la prière: le débat s’ouvre à Jakarta

Le vice-président indonésien a dénoncé la cacophonie des appels à la prière à Jakarta. Politiquement incorrect ? L’accueil n’est pas pour autant négatif.

Qui se souvient de l’époque où Jakarta, capitale de la becak, feu le cyclo-pousse indonésien, était bercée par l’appel un peu lointaine du muezzin à la prière ? Depuis le milieu des années 80, des moyens plus puissants de diffusion,  la construction de centaines de mosquées supplémentaires, les appels préenregistrés à la prière, cinq fois par jour, à quelques secondes d’intervalle, ont fini par déboucher sur une cacophonie. Seule protection efficace : l’addition de double vitrages et de la climatisation,  privilèges de riches.

Le vice-président Boediono a pris son courage à deux mains et soulevé la question, le 27 avril, dans son discours d’ouverture du sixième Conseil des mosquées de l’Indonésie. «Trop bruyant», a-t-il dit, en réclamant des mesures pour limiter le son des haut-parleurs. Selon le Jakarta Post, Ahmad Suaedy, président de l’Institut Wahid (ONG musulmane prônant le pluralisme), l’a félicité d’avoir abordé un «sujet tabou».

Amidan, président de l’officieux mais influent Conseil indonésien des Oulémas, à majorité islamiste, a exprimé son désaccord tout en reconnaissant que les mosquées devraient s’entendre en ce qui concerne leurs appels, à l’image de ce qui se pratique au Caire depuis 2006.  En outre, selon une réglementation adoptée en 1978, les haut-parleurs extérieurs ne devraient être utilisés que pour les appels à la prière, en cas d’alerte ou pour les sermons exceptionnels lors de fêtes musulmanes. Ce qui n’est pas le cas.

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Asie Indonésie Malaisie Philippines Singapour Thaïlande Viêtnam

Des Japonais en quête de refuge

Les Japonais sont de plus en plus nombreux à s’installer en Asie du sud-est. La cause : les nombreuses facettes d’une grave crise que traverse leur archipel.

Appelons-le Naoya, discret, élégant, poli, bientôt la quarantaine. Il est venu enseigner en Thaïlande voilà cinq ans – le terme normal de l’expatriation – au lycée japonais de Bangkok. Il doit donc soit regagner son pays soit trouver  un poste dans une école privée, avec un salaire nettement moins élevé. Il a épousé une collègue thaïlandaise et le couple a deux très jeunes enfants. Au Japon, la vie sera difficile : la froideur inévitable de sa famille à l’égard de son épouse ; le rejet probable des enfants par leurs camarades de classe. Il a renoncé à rentrer chez lui.

Beaucoup de Japonais en Thaïlande sont dans une situation similaire : leurs enfants ont beau parler le japonais, les métis sont mal accueillis dans un pays culturellement fermé. Le Japon n’a pas de politique d’immigration, même sélective. A la fin des années 70, il s’est révélé, parmi les pays riches, le plus frileux à l’égard des boat people qui ont fui le Vietnam. Bref, on ne devient pas Japonais.

L’empire du Soleil levant se dépeuple. Il a perdu, en 2011, un quart de million de gens, conséquence de la chute du taux des naissances mais aussi de départs à l’étranger. Si la tendance actuelle se confirme, le Japon, 127 millions d’habitants aujourd’hui, n’en comptera pas plus de 87 millions en 2060, dont 40% âgés de plus de 65 ans. Un effondrement démographique.

Surtout depuis le boom économique des années 70, des centaines d’entreprises nippones se sont délocalisées en Asie du sud-est. Le Japon a été le premier donateur et, avec les Etats-Unis, l’un des premiers investisseurs dans la région.  En avril encore, Tokyo a accordé plus de 5 milliards d’€ aux cinq pays de la Commission du Mékong. Les expatriés japonais sont donc traditionnellement très nombreux dans la région, avec leurs clubs de golf, leurs boites de nuit exclusives, leurs écoles, leurs restaurants  et même leurs épiceries.

Multiplication des petits Tokyo

A Jakarta-Sud, depuis 2010, le fameux et immense centre commercial Blok M, qui a retrouvé un peu de son allure, accueille chaque année un festival japonais de  plus en plus populaire (en 2012,  le 30 juin et le 1er juillet).  Le quartier lui-même a été rebaptisé «le petit Tokyo» en raison de l’abondance de bars, restaurants, boîtes de nuit, karaoké à clientèle japonaise. Le thème du festival sera «Arigato Kokoro No Tomo» (‘Merci, véritables amis’), à l’intention des étrangers qui ont aidé les Japonais, en 2011, à la suite de la catastrophe de Fukishima et des dévastations causées par les tsunamis.

Un autre courant s’est amorcé à la suite de ces désastres de 2011 – avec, en prime, la peur permanente d’un nouvel accident nucléaire – et l’Asie du sud-est en est l’une des destinations. Jusqu’alors, des retraités fortunés s’installaient dans la région, notamment en Malaisie. Cette fois, les déménagements à l’extérieur du Japon sont beaucoup plus nombreux et il ne s’agit pas que de retraités, mais de gens encore actifs en quête de sécurité ou de meilleurs conditions de travail.

«De plus en plus de gens disent qu’ils veulent déplacer leurs résidences ailleurs en Asie, là où il y a davantage de possibilités de faire des affaires», a expliqué Masanori Fujimura, patron du consultant en investissements Gaim, dans les colonnes du Japan Times. Du coup, les «petits Tokyo » se multiplient en Asie du sud-est. Selon Gaim, dans le secteur de l’immobilier, les demandes de clients japonais ont augmenté rapidement depuis mars 2011.

Une ville japonaise de dix mille âmes

Sur l’île de Cebu, au centre des Philippines, un complexe de 500 appartements – avec visas de long séjour pour retraités – a été vendu par Gaim en quarante-huit heures. Un autre complexe de taille identique, en construction à Ayutthaya, au nord de Bangkok, s’est vendu en l’espace d’une seule journée.

Encore plus ambitieux s’annonce, à long terme, un projet à Johor, Etat malaisien frontalier de Singapour. Les 300 premières unités, en construction, d’un ensemble réservé exclusivement à des Japonais ont été vendues, selon le Japan Times. S’installeront sur place notamment des commerces japonais et une clinique avec un médecin japonais.  Le développement ultérieur du projet permettra l’accueil, dans cinq ans, de dix mille Japonais, en créant ainsi un autre «petit Tokyo».

Auparavant, la Malaisie avait déjà lancé, surtout à l’intention de la riche clientèle japonaise, un programme «My Second Home» (Mon deuxième chez moi) proposant aux étrangers fortunés, candidats à l’achat immobilier, des visas de séjour de dix ans. La Thaïlande et l’Indonésie, qui acceptent déjà des retraités âgés de plus de 50 ans, envisagent également de viser les Japonais fortunés.

Jean-Claude Pomonti

 

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Analyse Thaïlande

Chronique Siamoise : théâtre masqué à Bangkok

Retour sur la rencontre Yingluck Shinawatra – Prem Tinsulanonda, jeudi 26 avril. Un rendez-vous où l’improvisation n’avait pas sa place.

Le Ramakien, version siamoise du Ramayana indien, est un ballet codifié où costumes et gestuelle suivent des règles strictes et immuables. Chaque élément du costume a une signification.  Chaque posture exprime une attitude. Point n’est besoin de paroles, même si les déclamations du prince Rama ou de Tosakhan, le roi des démons, emplissent la salle du théâtre Chalermkrung. La chorégraphie soutenue par la musique traditionnelle d’un orchestre de cinq instruments, dont le ranad, série de planchettes reliées entre elles et que l’on frappe à l’aide de deux baguettes, suffit, d’autant que l’audience connait à peu près l’intrigue d’avance (les scènes représentées sont expliquées dans le programme).

Le ballet auquel ont participé le président du Conseil privé du roi de Thaïlande, Prem Tinsulanonda, et la cheffe du gouvernement Yingluck Shinawatra entourée de ministres choisis a, de la même façon, suivi un script préparé à l’avance : on n’entre pas sur scène pour improviser. Les couleurs d’abord. Le rose pour l’équipe gouvernementale, avec Yingluck vêtue d’un élégant tailleur rose pastel. Les vice-Premier ministres Yongyuth Wichaidit et Kittirat na Ranong, eux aussi arborent cette couleur bénigne, mais dans un ton un peu plus vif.

Quant au ministre de la Défense Yutthasak Sasiphrapa qui avait dû perdre le  programme, il s’est avancé en uniforme blanc. Le rose est une des couleurs associées au roi Bhumibol Adulyadej. Du côté du général Prem, une « chemise Prem » en soie d’un orange un peu criard : l’orange est la couleur du jeudi selon le calendrier astrologique thaï, jour où a eu lieu la rencontre. Si la rencontre avait eu lieu un dimanche ou un lundi, rouge et jaune auraient été de rigueur. Ce qui aurait fait désordre.

La gestuelle ensuite. Yingluck, redevenue la sage étudiante de Chiang Mai, mains respectueusement jointes à hauteur de la taille, paumes vers le haut, courbée légèrement vers l’avant comme une dévote devant la Vierge. Le regard est fixé sur l’hôte, empreint de soumission. Le général nonagénaire dans son costume fruité pavoise sur le seuil, le buste droit. Il dispense ses oracles et ses conseils. Son regard ne porte pas sur ses interlocuteurs mais se perd au loin, fixé, sans doute, sur l’avenir de la Nation, la grandeur de la Monarchie. Le wai de Yingluck est une splendeur, laquelle résulte d’une longue habitude des bienséances ; il fait montre d’une maîtrise corporelle parfaite.

Par contraste, cet épisode en rappelle un autre de l’interminable épopée qu’est la lutte pour le pouvoir politique en Thaïlande. C’était un peu avant l’inauguration du pont Rama VIII enjambant le fleuve Chao Phraya en mai 2002. Le roi Bhumibol visitait pour la première fois le pont accompagné du Premier ministre de l’époque Thaksin Shinawatra et de Samak Sundaravej, alors gouverneur de Bangkok. Au milieu du pont, le monarque, en costume de ville, s’adressait au gouverneur de Bangkok, héritier d’une vieille famille noble, et à ses adjoints. Derrière cette haie d’uniformes blanc, Thaksin, alors au pouvoir depuis un an et quelques mois, se haussait sur la pointe des pieds avec un sourire crispé pour être aperçu du souverain. L’image, là encore, était parlante, le commentaire superflu. Peut-on imaginer Tosakhan-Thaksin, s’humilier devant le vieil ermite Prem ? Rien n’est absolument exclu, mais le risque serait peut-être que les spectateurs perdent le fil du scénario.

 

«Chronique siamoise» porte un regard décalé sur l’actualité politique de la Thaïlande, mêlant des récits d’anecdotes et une lecture culturelle des événements.

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Birmanie Histoire

La Birmanie après Orwell : une inconnue

Les évènements intervenus récemment en Birmanie surprennent, tel un scénario illisible. Prophète, George Orwell s’était arrêté à la dictature militaire. Après ?

George Orwell n’a passé que cinq ans en Birmanie, de 1922 à 1927, dans la peau d’un flic colonial, «cinq années d’ennui, sans même le son des trompettes !». Il en a tiré le toujours célèbre portrait, bien peu flatteur mais rédigé avec «ferveur», de la colonie britannique,  Burmese Days (1934, Une histoire birmane). Une minuscule communauté de petits blancs britanniques, distante, comme portant des gants de peur de se salir (sauf en cas de nécessité biologique élémentaire). L’univers que décrit Orwell, avec son immense talent, est si loin de celui des petits blancs français, qui rêvent tant que tout devienne comme eux, sans idée de caste, la fameuse mission-prétexte civilisatrice.

Dans son introduction à Burmese Days (Penguin Classics),  Emma Larkin, journaliste américaine considérée comme l’autorité à propos de George Orwell, écrit qu’en y regardant de près, Orwell a tiré une trilogie de son séjour en Birmanie.  Les deux volets suivants sont  Animal Farm (1945, La ferme des animaux)  et 1984 (publié en 1948, soit deux ans avant sa mort de maladie à l’âge de 47 ans).

«Récit allégorique», Animal Farm rapporte une révolution qui tourne mal quand les cochons, après avoir renversé les êtres humains, conduisent la ferme à sa ruine. 1984 fait penser à ce que la Birmanie a souffert pendant des décennies d’une dictature militaire «tenace». «Une évocation glaciale», juge Emma. Elle rappelle également que les intellectuels birmans nomment Orwell «le prophète» puisque, disparu en 1950, il n’a pas connu les déboires d’une Union birmane victime d’un coup d’Etat en 1962 et, depuis, d’un demi-siècle de mal-administration en uniforme. A relire Burmese Days, Orwell ne donnait pas cher non plus des empires européens du XIXème siècle.

Ce qui ne nous dit rien du futur proche. Devenu le Myanmar officiellement en 1989, donc depuis plus de deux décennies, la Birmanie le devient également dans les faits avec son ouverture sur le reste du monde, ses «réformes» dont on ignore encore ce qu’elles sont, importantes ou illusoires.  Le talentueux prophète nous a laissé des chefs d’œuvre. Et une inconnue.

Jean-Claude Pomonti