Catégories
Société Viêtnam

Vietnam : lendemains qui déchantent pour un fermier modèle

La spéculation foncière et immobilière est source de graves conflits. Le Vietnam, où la terre est théoriquement propriété de l’Etat, n’échappe pas à la règle.

Doan Van Vuon était donc un exploitant catholique qualifié de « modèle » (élevage de poissons et crustacés) sur le territoire de la ville de Haiphong, jusqu’au jour de janvier 2012 où la police locale a monté un raid pour le chasser de ses terres et que, dans la foulée, son habitation a été détruite par des hommes de main. Il y a eu résistance armée (4 policiers et 2 soldats blessés), ce qui, en d’autres temps, aurait condamné Vuon et ses acolytes.

Mais les médias ont suivi l’affaire, devenue un scandale national. Le Premier ministre Nguyên Tân Dung a été contraint d’intervenir personnellement. La récupération des terres de Vuon a été déclarée «forcée et illégale», la presse a été félicitée par un collaborateur du Premier ministre et une solution juste annoncée.

Deux mois plus tard, l’optimisme n’est plus de mise, rapporte le site des Missions étrangères de Paris. «Le manque d’objectivité et d’impartialité» des médias a été dénoncé publiquement par un membre du gouvernement. Tout en reconnaissant l’illégalité du raid de la police, le comité populaire (mairie) de Haiphong a, le 3 avril, dénoncé «des infractions commises par l’exploitant exproprié» (utilisation de terrains non alloués, destruction d’un bois, négligence dans le paiement des impôts). Loin des caméras, rien ne se règle.

Catégories
Asie Brunei Indonésie Viêtnam

Investissements: la palme à l’Indonésie et au Vietnam

L’Asie du sud-est demeure une destination favorite parmi les investisseurs. Mais cinq pays sur dix raflent la majorité de la mise.

Quel est le pays préféré par les investisseurs en Asie du sud-est ? L’Indonésie se situe en tête (50%) devant le Vietnam (46%), Singapour (43%), la Malaisie et la Thaïlande (42%). Les autres Etats membres de l’Asean sont moins bien perçus : Philippines (27%), Laos et Cambodge (26%), Birmanie/Myanmar (25%), Brunei (17%). Tels sont les résultats d’un sondage du Business Advisory Council de l’Asean réalisé auprès de 405 patrons et dont le Jakarta Globe a donné les résultats le 7 avril. Le questionnaire, qui autorisait les réponses multiples, souligne le net clivage au sein de l’Association (le petit sultanat de Brunei est un cas à part : il est assis sur une mine d’or noir).

88% des personnes interrogées ont l’intention de renforcer leurs investissements dans la zone Asean dans les trois années à venir. Cette zone est jugée plus «attrayante» que la Chine. En tête des obstacles à surmonter : la corruption et les incertitudes légales ; le déficit d’infrastructures (Indonésie et surtout Philippines) ; l’instabilité politique (Thaïlande).

La mesure du pouvoir d’attraction de ces économies, calculée sur une échelle de 0 à 10, donne des résultats concordants : Indonésie (6,89), Vietnam (6,29), Singapour (6,07), Thaïlande (6,04) et Malaisie (5,69). L’Indonésie est la première économie de la région.

Catégories
Indonésie Société

L’odeur de la kretek

Le lobby anti-tabac américain est furieux : l’Organisation mondiale du commerce a dénoncé l’interdiction d’importer la kretek, fameuse cigarette de l’Indonésie.

Dégoût des uns, régal des autres, l’odeur du clou de girofle qui crépite en se consumant est le symbole, la mémoire de l’Indonésie. N’importe où, cette odeur signifie la présence d’un amateur de kretek, cigarette inventée en 1880 par un javanais asthmatique et qu’il avait truffée de clous de girofle dont le contenu en eugénol soulageait ses douleurs de poitrine. Les fabriques de kretek emploient aujourd’hui 180.000 personnes et cette cigarette est consommée par 90%  des fumeurs indonésiens, y compris ceux qui ont émigré aux Etats-Unis.

Quand, en 2009, les Etats-Unis ont décidé de bannir les cigarettes parfumées – à la cannelle, à la fraise, à la cerise, censées séduire un public jeune –, la kretek n’a pas échappé au couperet. Mais les Indonésiens ont réagi en intervenant auprès de l’OMC, qui a fini par trancher, le 4 avril, en déboutant Washington. La raison : la cigarette mentholée, produite par d’influents fabricants américains, n’est pas interdite aux Etats-Unis. Que faire? Il est vrai que les amateurs de kretek aux Etats-Unis sont surtout des Indonésiens.

Comme les Indonésiens sont encore de gros fumeurs, le clou de girofle conserve un avenir. Originaire de Ternate aux Moluques, l’ancien «archipel aux épices»  le giroflier s’est répandu jusqu’à Madagascar, aux Comores et à Zanzibar. Mais l’Indonésie représente plus des deux tiers de la production mondiale de clous de girofle.

Catégories
Laos Société

Les Rameaux célébrés malgré un interdit dans deux villages

Le Laos, où le Parti populaire révolutionnaire règne sans partage depuis 1975, surveille de très près les religions, en particulier les protestants.

Deux petites communautés protestantes de la province de Savannakhet, au sud du pays à la frontière avec la Thaïlande, ont célébré les Rameaux, le 1er avril, devant leurs temples placés sous scellés par les autorités, rapporte le site d’information des Missions étrangères de Paris ( http://eglasie.mepasie.org/ ) en citant des ONG chrétiennes. La police n’est pas intervenue sur-le-champ. Sous prétexte «d’irrégularités dans les permis de construire», le temple du village de Kengweng (élevé voilà plus de quarante ans) a été placé sous scellés en février 2012 et celui de Dongpaiwan en septembre 2011. Ces petites communautés ont également reçu l’ordre de ne plus se réunir.

Une autre petite communauté protestante, celle du village de Nadaeng, dont le temple vieux d’un demi-siècle a été séquestré en décembre 2011, ne s’est pas encore réunie. Elle attend de voir ce qui se passera le dimanche de Pâques à Kengweng et à Dongpaiwan, jour où les chrétiens disent qu’ils lèveront les scellés. Les trois communautés réclament, en vain, la restitution de leurs lieux de culte. Le Laos compte «un peu plus d’1%» de chrétiens. L’immense majorité de la population se réclame du bouddhisme theravada. Toutes les églises sont étroitement surveillées par les services de sécurité.

Catégories
ASEAN Asie Politique

Consolidation au sommet de l’Asean

La réunion annuelle de l’Asean s’est déroulée sans anicroches dans la capitale du Cambodge. Le prochain rendez-vous régional aura lieu fin juillet.   

Débarrassée, pour le moment, du fardeau birman, l’Asean peaufine ses dossiers. En l’absence du président de l’Indonésie, retenu à Jakarta par une sérieuse crise, le vingtième sommet de l’Association des nations de l’Asie du sud-est, les 3 et 4 avril à Phnom Penh, s’est déroulé sans vagues.

A la tribune, le président des Philippines, Noynoy Aquino, a réclamé que les dix Etats membres de l’Association s’entendent d’abord sur le Code de conduite en Mer de Chine du sud, avant d’en discuter «avec la Chine». Mais cette formule n’a pas été reprise par la «déclaration de la présidence» de l’Asean, texte qui fait office de communiqué final. La «déclaration» du Cambodge, qui assure la présidence annuelle de l’Asean, appelle à une résolution «pacifique» du contentieux en Mer de Chine du sud, conformément à la Convention de l’ONU sur les droits de la mer promulguée en 1982. Le texte cambodgien réclame également la négociation du Code de conduite dont le principe avait été adopté dès 2002, y compris par la Chine. En clair, les Etats de l’Asean ne sont pas encore prêts à adopter une position commune sur ce conflit face à Pékin.

La «démocratisation» de la Birmanie (Myanmar)  ayant franchi «un pas significatif» supplémentaire le 1er avril, l’Asean a réclamé la levée de «toutes les sanctions» imposées par les Occidentaux.

Catégories
Analyse ASEAN Asie Cambodge Politique

Comme le bambou, l’Asean plie sous le vent, sans rompre

Le vingtième sommet de l’Asean se tient à Phnom Penh, les 3 et 4 avril. Au menu : la Mer de Chine du Sud et le marché unique en 2015.

Développement révélateur : le président Hu Jintao effectue une visite officielle au Cambodge  à la veille du sommet de l’Association des nations de l’Asie du sud-est à Phnom Penh. La Chine rappelle, à cette occasion, qu’elle est le premier investisseur au Cambodge et se félicite de l’appui diplomatique que le Cambodge, qui assure la présidence de l’Asean en 2012, lui accorde sur les dossiers qui lui tiennent à cœur.

Pékin en a besoin.  Ces deux dernières années, l’agressivité de la marine chinoise en Mer de Chine du Sud a remué l’Asean plus que d’habitude. De leur côté, en 2010, les Etats-Unis ont pris le parti d’exprimer leur préoccupation à propos de ces eaux revendiquées par six Etats riverains (Chine, Vietnam, Philippines, Malaisie, Taïwan et Brunei) et par où transitent les deux tiers du commerce maritime entre les Extrême et Proche Orients. La présidence cambodgienne tentera de calmer le jeu face aux pressions exercées, notamment par le Vietnam et les Philippines, en faveur de l’adoption par l’Asean d’une position commune. En 2010 et 2011, les présidences vietnamienne puis indonésienne de l’Association avaient poussé en avant ce dossier. Les Cambodgiens n’en feront probablement pas autant.

Les réunions de l’Asean sont ainsi monopolisées par des questions dites d’actualité mais qui peuvent très bien – c’est le cas du contentieux en Mer de Chine du Sud – présenter de sérieux risques dans le long terme. Cette crise prend le relais de la question birmane qui, ces dernières années, avait empoisonné les sommets de l’Association ou les réunions que l’Asean organise régulièrement sur les questions de sécurité régionale avec ses «partenaires de dialogue», parmi lesquels figurent les grands de la planète.

Une forte capacité d’adaptation

Ainsi va l’organisation la plus ancienne de l’Asie, puisqu’elle a été formée en 1967, en pleine intervention militaire américaine au Vietnam, par les régimes anti-communistes d’Asie du sud-est – Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour et Thaïlande  – que le petit sultanat de Brunei a rejoint dès la proclamation de son indépendance en 1984. Un club de diplomates joueurs de golf. Il s’agissait surtout, à l’époque, d’empêcher que les tensions internes au groupe ne dégénèrent (une guerre avait été évitée de justesse en 1963, quand l’Indonésie avait menacé d’attaquer la Malaisie, tout juste indépendante).

L’Asean a montré une grande faculté d’adaptation. Elle s’est ouverte aux régimes communistes après la fin de la Guerre froide, intégrant le Vietnam en 1995, le Laos et la Birmanie (Myanmar) en 1997, et le Cambodge en 1999. Parallèlement, elle a commencé à mettre en place une zone de libre échange tout en négociant des accords de même type avec ses voisins, y compris la Chine. Aujourd’hui, elle se trouve dans la dernière ligne droite et propose de réaliser un marché unique en 2015, soit dans trois ans seulement.

Une dernière étape pleine d’embûches

L’Asie du sud-est bénéficie d’une expansion solide (dans une fourchette prévue de 5,6% à 6,3% en 2012, contre 4,5% en 2011) et l’économie de l’Asean serait la neuvième de la planète si elle était intégrée. Ce n’est pas le cas et l’ultime étape vers la réalisation d’un marché unique se heurte à de grosses difficultés. La gestion de l’Asean se retrouve dans les mains d’Etats aux capacités limitées et dont la priorité est non de créer un marché unique mais de combler leur retard sur les autres membres : Cambodge en 2012, Brunei en 2013, Birmanie en 2014, Laos en 2016. Avec une direction moins motivée et sans le pouvoir d’imposer, le plus difficile reste donc à faire dans les domaines des investissements, de l’ouverture du commerce et des services, des transports, des douanes…

Un autre handicap de l’Asie du sud-est, malgré son dynamisme, est de demeurer à la périphérie des centres de décision. Offrir une plate-forme en vue de faciliter des échanges – ce qui est le cas, depuis 1994, dans le cadre du Forum de l’Asean sur les questions de sécurité – ne signifie pas un transfert de pouvoir. Enfin, l’Asean n’a même pas franchi le pas d’une ébauche de pacte militaire, ce qui fait l’affaire de ses voisins, notamment de la Chine, laquelle joue sur l’absence d’une ligne commune des Etats de l’Asean, notamment dans le contentieux sur la Mer de Chine du Sud. Et devrait pouvoir continuer de le faire.

Jean-Claude Pomonti

Catégories
Indonésie

Des enseignants qui ne valent pas la moyenne

L’enseignement, en Indonésie, est un secteur en retard. Des tests de connaissances auxquels ont été soumis les enseignants le confirment.

Triste constat: des tests de compétence auxquels ont été soumis 98,3% des 285 884 enseignants indonésiens ont montré que leur note était de 4,2 sur 10, soit inférieure à la moyenne, a récemment rapporté le Jakarta Globe. «Le score moyen est médiocre. Toutefois, d’une certaine façon, je suis satisfait de la pléthore de mauvais résultats car cela prouve que ces derniers sont fiables. Si la moyenne avait été plus élevée, j’aurais eu des doutes », a réagi Muhammad Nuh, ministre indonésien de l’Éducation et de la culture.

L’éducation nationale, estime le quotidien anglophone de Jakarta, est « depuis longtemps la cible de critiques » : fabrication de «CV hors de propos» ; corruption ; tricheries très répandues lors des examens ; infrastructures insuffisantes. Cette fois, c’est le personnel qui n’est pas à la hauteur. La formation des enseignants va se renforcer, a annoncé Mohammad Nuh, notamment lors de stages prévus en mai et en juin.

Les meilleurs enseignants – ou les moins mauvais – sont à Yogyakarta, la ville universitaire. Viennent ensuite : Jakarta, Java Est, Java Central. En dernière position se trouvent les Moluques.

Fin décembre 2011, le président Susilo Bambang Yudhoyono avait jugé que l’instruction publique avait «fait de nombreux progrès mais qu’il restait encore bien des améliorations à réaliser.»

Catégories
Indonésie

Des minijupes jugées pornographiques

En Indonésie, le ministre chargé de l’application de la loi contre la pornographie est sans doute maladroit. Mais il est le reflet des aspirations de la présidence. 

Suryadharma Ali, ministre indonésien des affaires religieuses, insiste: toute jupe «qui ne recouvre pas les genoux sera jugée pornographique», a-t-il déclaré, selon le Jakarta Post du 28 mars, deux semaines après avoir été chargé par le président Susilo Bambang Yudhoyono (SBY) de la gestion d’un nouveau Comité d’application de la loi contre la pornographie votée en 2008. La mini-jupe fera donc partie des critères de pornographie. Le président du Parlement, Marzuki Alie, approuve. «Vous savez comment sont les hommes !», a-t-il dit selon le Sydney Morning Herald.

Suryadharma veut que les standards qui seront décidés pour le vêtement soient imposés à tout l’archipel, donc à quelque trois cents ethnies, y compris les Papous aux étuis péniens. Il lui arrive de déraper : il a traité en janvier les shiites d’ «hérétiques». Mais il est surtout le reflet du conservatisme religieux sensible dans l’entourage de SBY.

Commentaires de lecteurs : «un retour à l’âge de pierre» ; «bienvenue en Arabie saoudite». L’immense majorité des Indonésiens pratiquent un islam modéré. En février, la Commission pour la suppression de la corruption s’est interrogée sur le sort des intérêts – qui se comptent en millions d’euros – sur les dépôts des pèlerins à la Mecque faits auprès du ministère des affaires religieuses, lequel passe pour le plus riche en raison de la gestion de ces dépôts et de dons aux pauvres.