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Vietnam : le crime d’une faute professionnelle de journaliste

En prouvant la corruption d’un agent de police, un journaliste s’est retrouvé accusé lui-même de corruption. Verdict : 4 ans de prison (et 5 ans pour le policier).

L’affaire remonte à juin 2011 à Hochiminh-Ville. Hoang Khuong, aujourd’hui âgé de 37 ans, réputé et primé pour la pugnacité de ses reportages sur la corruption des flics au Vietnam, a appris qu’un agent de la circulation, Huynh Minh Duc, s’est laissé soudoyer (plus de cent €) par un ami de Khuong, Tôn That Hoa, pour rendre un camion semi-remorque pris en faute.

Quand un autre ami du journaliste, Trân Minh Hoa, voit sa moto confisquée à la suite d’une violation du code de la route par Duc, Khuong décide de prouver la corruption du policier : Hoa, qui connaît Duc, accepte de jouer une deuxième fois les intermédiaires et remet à Duc la somme demandée (l’équivalent, cette fois, de plus de 500 €) pour récupérer la moto.

La suite : un article de Hoang Khuong, le 10 juillet, dans le quotidien de langue vietnamienne Tuoi Tre, pour lequel il travaille, repris par le site anglophone tuoitrenews.vn. Le résultat : les acteurs de ce scénario et leurs complices vont finir par se retrouver au trou en attendant de passer devant le juge au cours du procès qui a eu lieu les 6 et 7 septembre à Hochiminh-Ville.

Khuong a été sanctionné sur-le-champ par la direction de Tuoi Tre pour faute professionnelle. Toutefois, le procureur l’a accusé de corruption, un «crime», pour avoir tenté et réussi à faire refiler un pot-de-vin à un policier (et Hoa, un chef d’entreprise, a été accusé de complicité). Le procureur a réclamé de 6 à 7 ans de prison contre le journaliste. Verdict : 4 ans de prison pour le journaliste ; 2 ans pour son complice Hoa ; 5 ans pour le policier Duc ; 5 ans pour le propriétaire de la moto ; 4 ans pour un beau-frère de Khuong, jugé également complice. En ce qui concerne Khuong, la faute professionnelle, donc non criminelle, n’a pas été retenue.

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Hillary Clinton à Pékin : une réception peu chaleureuse

La mer de Chine du Sud ne sera pas le théâtre d’une guerre entre la Chine et les Etats-Unis mais Pékin redit à Washington de cesser de se mêler de ce contentieux.

A Jakarta, puis à Pékin où elle a séjourné les 4 et 5 septembre, la secrétaire d’Etat américaine a réitéré que l’intérêt général est le lancement par «la Chine et l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est d’un processus diplomatique vers le but partagé d’un Code de conduite», ainsi qu’elle l’a répété à Pékin après y avoir été reçue le 5 septembre par le président Hu Jintao.

En Indonésie, avant de s’envoler pour Pékin, Mme Clinton a redemandé aux Etats membres de l’Asean d’adopter une position commune sur la mer de Chine du Sud, ce qu’ils n’avaient pas réussi à faire lors de la conférence annuelle de leurs ministres des affaires étrangères à Phnom Penh en juillet. C’est surtout cet appel qui a irrité la Chine, qui revendique 80% des eaux de la mer de Chine du Sud et veut négocier individuellement ses contentieux avec les quatre Etats de l’Asean qui sont riverains, à savoir le Vietnam, les Philippines, la Malaisie et Bruneï.

Pour souligner leur mauvaise humeur, les Chinois ont supprimé à la dernière minute une audience que devait accorder à Mme Clinton le vice-président chinois Xi Jinping, successeur présumé de Hu Jintao. L’agence officielle Xinhua a demandé aux Etats-Unis de cesser de jouer «à la dérobée, les fauteurs de trouble»  et le Global Times, organe également officiel, a reproché à Mme Clinton de manifester de «l’antipahtie» à l’égard de la Chine. Hu Jintao a néanmoins rectifié le tir en saluant les «efforts» de la secrétaire d’Etat américain «pour faire progresser la relation sino-américaine.»

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Politique Viêtnam

Vietnam: l’ancien PDG de Vinalines arrêté et extradé

En fuite depuis la mi-mai et l’objet d’un mandat d’arrêt international pour détournement de fonds, Duong Chi Dung a été retrouvé à l’étranger et extradé.

L’ancien patron de Vinalines, entreprise publique de transport maritime, a été repéré «dans un pays de l’Asean», a rapporté le quotidien Thanh Nien, après une cavale de près de quatre mois.  Il a été trouvé «dans un pays voisin» du Vietnam, donc soit le Cambodge soit le Laos, et aussitôt extradé avec l’aide d’Interpol.

Agé de 55 ans, Dung a dirigé Vinalines de 2005 jusqu’au début de 2012, quand il a été nommé directeur de l’administration maritime. Il faisait l’objet d’un mandat d’arrêt pour corruption lancé le 18 mai, au même titre que deux autres dirigeants de la compagnie, Mai Van Phuc, ancien directeur général, et Tran Huu Chieu, ancien directeur général adjoint, tous deux placés sous les verrous. Dung s’était enfui.

Une enquête officielle avait été lancée à la suite de la découverte d’irrégularités et de fraudes commises de 2007 à 2010, y compris à l’occasion de l’achat de bâtiments d’occasion. En juin, un rapport du gouvernement  a estimé que Vinalines était dans une situation financière «très difficile», ayant accumulé près de deux milliards d’€ de dettes. Avec Vinashin (chantiers navals) et EVN (électricité), Vinalines est l’une des entreprises publiques dont des dirigeants ont été arrêtés pour corruption.

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Les Travailleurs indochinois de la Deuxième Guerre mondiale

Le 6 septembre sera, à Sorgues, une journée du souvenir, en hommage aux cinq mille Indochinois qui s’épuisèrent, pendant la guerre, dans l’immense poudrerie locale.

C’est un pan de l’histoire mal connue des vingt mille «Travailleurs indochinois» envoyés en France en 1939-1940 pour suppléer, dans les usines de guerre, la main-d’œuvre locale mobilisée. La guerre est vite perdue et les Indochinois, envoyés du Cambodge, du Laos et surtout du Vietnam,  se retrouvent bloqués en Métropole sous le régime de Vichy. A Sorgues, cinq mille d’entre eux ont été affectés à «une immense usine de fabrication de poudres et d’explosifs», rappelle Pierre Daum, auteur de Immigrés de force, les travailleurs indochinois, 1939-1952 (Actes Sud, 2009).

En juin 1940, la poudrerie cesse de fonctionner mais sept compagnies de travailleurs indochinois y stationnent et sont affectées à divers travaux dans la région. Avec l’occupation de la zone Sud en novembre 1942, la poudrerie reprend du service pour le compte, cette fois-ci, des Allemands. Sans salaires. Il reste 1.800 Vietnamiens à Sorgues. Beaucoup se retrouveront, après la guerre, bloqués en Métropole, en partie en raison des hostilités en Indochine.

La ville de Sorgues – aujourd’hui, un bourg de vingt mille habitants – se souvient, même si seule une poignée de ces travailleurs sont encore en vie (notamment un peintre connu, Lê Ba Dang, âgé aujourd’hui de 91 ans, qui a été l’un des pionniers de la culture irriguée du riz en Camargue à partir de 1941, donc pendant la guerre). Et même si la population a élu députée la petite-fille de Jean-Marie Le Pen. Après la guerre, «d’un statut de supplétifs, ils deviendront alors des hôtes à surveiller, voire pour certains à neutraliser», rappelle Pierre Daum.

Expositions et débats, pose d’une plaque commémorative, seront suivis de la projection en avant-première et en présence du réalisateur du film que Lam Lê a consacré à ces travailleurs, Cong Binh, la longue nuit indochinoise. (www.travailleurs-indochinois.org)

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Histoire Viêtnam

Vietnam : contamination par la dioxine plus grave que prévu

Des analyses de sang effectuées à Danang se sont toutes révélées positives à la dioxine. L’aéroport local avait abrité un dépôt d’agent orange pendant la guerre.

Les tests de 62 individus choisis au hasard dans une zone qui jouxte l’aéroport, où se trouvait l’aire de stockage de l’agent orange, ont tous été positifs à la dioxine, qui est à la base du très puissant défoliant dont les avions américains ont, selon Hanoï, déversé 80 millions de litres sur la moitié sud du Vietnam de 1961 à 1971.

Aucun des individus testés entre 2006 et 2012 n’a participé à la guerre ou n’a vécu dans les zones où l’aviation américaine a déversé le défoliant. Leurs seuls points communs, selon le quotidien Thanh Nien : ils étaient âgés de plus de 18 ans lors des tests et résident depuis au moins cinq ans à proximité de l’aéroport où l’agent orange a été stocké. L’un d’entre eux, Vo Duoc, âgé de 58 ans, a déclaré que les 18 membres de sa famille élargie vivaient près de l’aéroport et que les résultats pourraient signifier «une catastrophe pour les enfants». Ces résultats ont déjà provoqué une vive inquiétude dans un secteur où résident des milliers de gens.

Le projet, dans lequel s’inscrivent les tests, est parrainé par la Fondation Ford et Hatfield Consultants, une société environnementaliste canadienne. 25 parmi les individus testés vont être envoyés dans un hôpital militaire de Hanoï pour y bénéficier, gratuitement, d’un traitement déjà testé sur des anciens combattants.

L’aéroport de Danang, dans le centre du Vietnam, est la première de trois anciennes aires de stockage de l’agent orange que les Américains ont commencé à décontaminer le 9 août dernier en collaboration avec l’armée vietnamienne. Les deux autres aires sont les anciens aéroports de Bien Hoa, près de Hochiminh-Ville, et de Phu Cat, dans la province de Vinh Binh (au sud de Danang).

De 2,1 millions à 4,8 millions de Vietnamiens ont été directement exposés à l’agent orange et à d’autres produits chimiques liés à des cancers, à des malformations à la naissance ou à des maladies chroniques, notamment respiratoires. Depuis la fin de la guerre, la dioxine représente un danger supplémentaire en raison de l’influence de la contamination de sols sur la chaîne de consommation alimentaire. Un organisme américano-vietnamien a estimé à 450 millions de dollars le montant nécessaire à l’élimination de la dioxine et à l’aide aux victimes.

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Politique Viêtnam

Electricité du Vietnam sur la sellette

Les entreprises publiques au Vietnam ont des problèmes de trésorerie. Après Vinashin et Vinalines, EVN – Electricité du Vietnam – aurait de lourdes dettes.

Début août, le site du quotidien Thanh Nien a rapporté que Southern Power Corporation, filiale d’EVN, avait annulé un projet d’envoyer 400 de ses cadres en voyage de formation à l’étranger. Deux de ces séjours ont bien eu lieu en août mais douze autres ont été supprimés. L’intérêt de ces séjours de cinq à huit jours est, en effet, d’autant plus en question qu’EVN croule sous les dettes (un déficit de plus de 160 millions de dollars en 2011, à telle enseigne que le prix de l’électricité a été relevé de 5% en août de cette année pour tenter de limiter les pertes).

Ces dernières années, EVN a investi dans plusieurs secteurs – banques, assurances, immobilier, télécommunications – et rend responsable d’une partie de ses pertes la chute de la bourse, laquelle affecte son portefeuille d’actions. Le gouvernement a ordonné aux entreprises publiques de mener une politique de désinvestissement d’ici à 2015 dans les secteurs qui ne constituent pas leur principale activité. Début juillet, EVN a reçu l’ordre d’augmenter ses prix afin de ne plus vendre à perte en 2013.

Dao Van Hung, alors PDG d’EVN, a été limogé en février pour sa responsabilité dans des pertes jugées colossales. Un contrôle officiel a, selon le Saigon Times, conclut que les dettes d’EVN s’élevaient à 11,5 milliards de dollars fin 2010, soit près de trois fois les pertes de Vinashin (chantiers navals) à la même date. En décembre 2012, les pertes de production d’EVN auraient été de douze fois supérieures au montant rapporté officiellement par l’entreprise, selon le quotidien Tuoi Tre.

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Histoire Politique Viêtnam

Vietnam : le général Giap, 101 ans et un musée

Le général Giap, 101 ans depuis le 25 août, est dans un état de santé dit «stable». Les autorités proposent de lui consacrer, de son vivant, un musée.

 Vo Nguyên Giap, né en 1911, a reçu les délégations officielles venues lui présenter leur vœux dans son lit d’hôpital à Hanoï. A cette occasion, le Musée d’histoire et l’Association de la science historique ont proposé de créer un musée consacré à celui qui a pris le camp retranché français de Diên Biên Phu, le 7 mai 1954, et mené l’offensive militaire qui s’est terminée avec la capitulation de Saigon le 30 avril 1975.  Certains proposent de transformer en musée la résidence du général, une villa de style indochinois sur l’emplacement de l’ancienne citadelle de Thang Long, dans la capitale du Vietnam.

Ancien professeur d’histoire et admirateur du général Bonaparte, le général Giap a été l’un des grands capitaines du XXème siècle. Il s’est inspiré, pour prendre le camp de Diên Biên Phu, des stratèges vietnamiens qui, au fil des siècles, ont infligé de sévères défaites aux envahisseurs chinois. Il s’est également inspiré de la campagne d’Italie de Bonaparte. En 1975, jouant à la fois de l’effet de surprise, de la rapidité et de l’indécision du général Nguyên Van Thiêu, il a désorganisé les défenses de ses adversaires sud-vietnamiens, transformant en déroute leur retraite. Dans les deux cas, il s’est révélé un roi de la logistique auquel ses commandants de division obéissaient au doigt et à l’œil.

Le général Giap a connu une traversée du désert à la suite de ses désaccords avec d’autres membres du bureau politique du PC Vietnamien en 1966. Il n’a récupéré son commandement opérationnel qu’en 1972, pour défendre Hanoï et le Nord contre les raids des B-52 américains. La campagne qu’il a menée en 1975 pour prendre Saigon a duré 55 jours,  soit un jour de plus que le siège de Diên Biên Phu.

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Asie du Sud-Est : Hillary Clinton seule à la barre

La secrétaire d’Etat américaine reprend le chemin de l’Asie de l’Est où les disputes territoriales ne perdent rien de leur acuité. Une dernière grande tournée ?

Hillary Clinton s’est envolée le 30 août pour les îles Cook, où elle participe à un forum avant de gagner l’Indonésie, la Chine, Timor Leste, le sultanat de Brunei. Sa dernière étape sera Vladivostok, en Russie, afin d’y participer, sur l’île Rousski, au sommet annuel de l’Apec les 8 et 9 septembre. Elle y représentera le président Barack Obama, retenu par sa campagne électorale pour un deuxième mandat.

L’étape la plus importante de cette tournée sera vraisemblablement une visite à Pékin, les 4 et 5 septembre, dont le programme n’a pas encore été fixé. Mme Clinton compte aborder avec les dirigeants chinois, selon sa porte-parole Victoria Nuland, «un large éventail de sujets importants pour les relations sino-américaines» avant le renouvellement de la direction chinoise prévu à l’automne. «Nous continuons de réclamer, a-t-elle ajouté, des échanges multilatéraux à propos d’un Code de conduite en mer de Chine du Sud qui observe la loi internationale et le traité sur la Loi de la mer». Les eaux de la mer de Chine méridionale font l’objet de revendications non seulement de Pékin et de Taïwan mais aussi de quatre Etats de l’Asean (Vietnam, Philippines, Malaisie et Brunei).

Inaugurés par Bill Clinton en 1991, les sommets des 21 Etats ou entités de l’Apec (Asia-Pacific Economic Cooperation)  sont devenus les grands-messes annuelles d’une région qui regroupe 40% de l’humanité et représente 44% du commerce international. Elles ne sont pas l’occasion d’accords globaux mais d’échanges, notamment bilatéraux, qui ont une importance évidente. Mme Clinton ne rendra pas visite à deux alliés des Etats-Unis, le Japon et la Corée du Sud, séparés par un contentieux territorial.