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Mise en garde de l’Asean concernant l’Etat Rakhine

Le secrétaire général de l’Asean demande aux Etats membres  de se montrer pro-actifs face à la  résurgence des violences inter-communautaires dans l’ouest birman.

Politologue de formation et Malais musulman originaire de Nakhon Sri Thammarat, dans le sud de la Thaïlande, Surin Pitsuwan a passé sa vie à étudier les communautés musulmanes d’Asie du sud-est. Aussi la mise en garde qu’il a lancée aux gouvernements de l’Asean dans un entretien publiée par  le Bangkok Post émane-t-elle d’un homme politique régional de poids mais également d’un expert des questions musulmanes. Surin ne mâche pas ses mots : «la situation se détériore et il y a maintenant un risque de radicalisation des Rohingyas. Ce qui n’est bon pour personne», dit-il. Pour lui, présenter le conflit entre Rohingyas musulmans et Rakhines bouddhistes comme l’effet de l’islamisme envenime la situation. Et comme cela s’est produit dans d’autres endroits, à force de crier au loup, le loup risque de finir par venir.

D’ores et déjà, Surin estime que l’intensification des violences dans l’Etat Rakhine est le défi majeur qui se pose à la Birmanie (Myanmar) pendant cette phase initiale d’ouverture. Mais le Thaïlandais va plus loin. «[Le conflit] pourrait avoir des implications plus larges au niveau de la sécurité pour la région», dit-il, en ajoutant : «pouvez-vous imaginer le détroit de Malacca devenant une zone de violence comme le sont les eaux au large de la Somalie ? Cela compromettrait l’Asie orientale et la sécurité de l’économie de l’Asie du sud-est». A ses yeux, les gouvernements de l’Asean doivent suivre une approche d’engagement vis-à-vis de la question des Rohingyas comme ils l’avaient fait en 2008 après le passage du  cyclone Nargis, lequel avait dévasté le delta de l’Irawaddy. Sollicitée par Surin, la présidence cambodgienne de l’Asean a proposé une rencontre des  ministres des Affaires étrangères de l’Association sur la question des Rohingyas, mais la Birmanie a refusé, affirmant que la situation était sous contrôle. Après une première série d’affrontements entre Rakhines bouddhistes et Rohingyas musulmans en juin qui avaient fait au moins 90 morts, les violences ont repris depuis le 21 octobre avec un bilan provisoire de 67 morts.

 

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Asie du sud-est : Chine-Amérique, le choc inévitable

Deux observateurs français analysent le «duel du siècle» : entre la Chine et l’Amérique, le choc est inévitable, pas la guerre. Explication de texte.

Voici un exposé clair, précis, à la lecture facile, de la relation très complexe entre les deux géants qui vont dominer le XXI° siècle. Frontalière de la Chine, abritant les voies maritimes entre Proche et Extrême Orients, l’Asie du sud-est  est concernée au premier chef. Les pays du sous-continent le savent d’autant plus que, face à la volonté chinoise de redevenir l’élément central de l’architecture de l’Asie, ils apprécient le pivotement en cours des Etats-Unis.

Après un hiatus humiliant de plus de cent ans, la Chine reprend sa place. «Son intégration dans le système international, depuis la fin des années 1970, lui a permis de doubler sa richesse nationale tous les sept ans et de devenir, en 2011, la deuxième économie du monde», résume les deux auteurs. Sa place en haut de la pyramide est son intérêt ainsi que celui, au moins aux yeux des Chinois, du reste de la de la planète car la Chine a beau être opaque, elle n’est pas hégémoniste, contrairement à l’Amérique. Parallèlement, elle tend à développer une doctrine chinoise de Monroe : l’Asie aux Asiatiques, à commencer par l’Asie de l’Est, avec la Chine au centre. Et cela ne regarde personne d’autre.

Si l’on ajoute que «la concurrence devrait s’exacerber dans un monde aux ressources limitées», le choc est inévitable car les Etats-Unis disposent d’une avance considérable et que beaucoup d’Américains ne se perçoivent pas sur le déclin. Aux yeux des Chinois, l’Amérique est agressive, subversive. Aux yeux des Américains, les Chinois ne jouent pas le jeu. Mais les uns et les autres se tiennent par la barbichette : en achetant la dette américaine, la Chine donne les moyens aux Etats-Unis d’acheter la production chinoise.

Avec l’effondrement de l’Union soviétique, dont la seule existence rapprochait Pékin et Washington, les frictions entre les deux géants restants se sont multipliées. Ne demeurent que deux silhouettes à l’horizon. Les «stratèges américains»  estiment aujourd’hui avoir «perdu» une décennie – la première du XXIème siècle – à gaspiller de vastes énergies en Irak et en Afghanistan. La priorité était la Chine, non Al-Qaïda. Depuis, les «intérêts vitaux» de la Chine incluent, selon Pékin, non seulement le Tibet, le Xinjiang et Taiwan (leur «Alsace-Lorraine») mais également la Mer de Chine, où ils croisent les «intérêts vitaux» des Etats-Unis.

Le choc est donc «inévitable» et un dérapage ne peut être exclu. A partir de là, tout s’entremêle. Il y a, en cas de conflit et en raison des armes nucléaires, la MAED (en français, destruction économique mutuelle assurée), qui garantirait un état de «ni guerre ni paix». Il y a aussi la possibilité de «petites guerres», limitées par la MAED. Il y a également des Chinois pour penser que la présence américaine en Asie, en rassurant les voisins de la Chine, contribue à stabiliser la région.  La guerre n’est pas inéluctable. Riche en anecdotes, en exemples, en nuances, cet ouvrage est le fruit d’une collaboration entre d’anciens directeurs de la rédaction du Monde, tous deux spécialistes des relations internationales.

Alain Frachon et Daniel Vernet, La Chine conte l’Amérique, le duel du siècle (Grasset, 2012).

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Asie Philippines Politique Société

Philippines : nouveau cardinal, nouvelle génération

Rome a annoncé que Luis Antonio Tagle, archevêque de Manille, sera créé cardinal lors du consistoire du 24 novembre 2012. Il représente une nouvelle génération.

L’église catholique des Philippines, la première d’Asie, n’avait plus de cardinal depuis la disparition de Jaime Sin en 2005, soit deux ans après son abandon de ses fonctions d’archevêque de Manille pour raisons d’âge et de santé. Le Pape vient d’annoncer la création du septième cardinal d’un archipel où les conversions ont commencé voilà cinq siècles avec la conquête espagnole et où, de nos jours, plus de 80% d’une population de près de cent millions d’habitants se réclament de la religion catholique.

Le nouveau cardinal , Mgr Tagle, âgé de 55 ans, est devenu archevêque de Manille en décembre 2011 seulement. Eglises d’Asie, l’agence des Missions étrangères de Paris, rapporte sur son site ( eglasie.mepasie.org ) qu’interrogé par Radio-Vatican depuis Rome où il participe au Synode pour la nouvelle évangélisation, Mgr Tagle a déclaré avoir été «surpris par cet honneur», auquel il n’était «pas préparé», mais qu’il le recevait comme «le signe que l’Eglise des Philippines avait un rôle important à jouer pour la mission dans l’Asie tout entière».

L’église catholique a joué un rôle en politique, notamment quand le cardinal Sin avait offert son soutien aux manifestants qui, en 1986, ont mis fin au règne de Ferdinand et Imelda Marcos, les obligeant à s’exiler à Hawaï. Aujourd’hui, la hiérarchie catholique est confrontée à un autre débat, celui concernant des mesures appuyées par le président Noynoy Aquino (notamment, le recours aux préservatifs) pour réduire le taux d’expansion démographique. Pour l’instant, Mgr Tagle s’est contenté d’affirmer avoir «conscience que dans certaines régions de l’Asie, la pondération voire le quasi-silence avec laquelle l’Eglise s’exprime sont interprétés comme la peur d’affirmer nos convictions mais c’est faux. Il s’agit seulement de rendre l’Eglise plus crédible ».

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Asie Cambodge Philippines Politique Singapour

M. Ayrault en Asie du Sud-Est : quid de l’adieu à Sihanouk?

Après une escale à Singapour, le premier ministre passe le week-end à Manille. Au programme : contrats commerciaux. Fera-t-il, au retour, le détour par Phnom Penh ?

Fixé bien avant l’annonce du décès de Sihanouk, le voyage en Asie du Sud-Est, du 18 au 22 octobre, concerne deux pays intéressants, Singapour et les Philippines. La cité-Etat est le troisième partenaire commercial asiatique de la France, derrière la Chine et le Japon. Singapour est le QG régional de nombreuses sociétés françaises et la communauté française, essentiellement des cadres supérieurs, y a doublé en cinq ans pour atteindre les dix mille expatriés.

Le dernier membre d’un gouvernement français à visiter officiellement les Philippines a été, en 1991 ou 1992, Edwige Avice, ministre de la coopération et du développement dans le cabinet d’Edith Cresson. Au passage, elle était alors accompagnée de Paul Jean-Ortiz,  membre de son cabinet et aujourd’hui sherpa à l’Elysée. Renouer avec cet archipel oublié semble donc judicieux.

Le président Noynoy Aquino, élu en 2010, a donné une chance à son pays de redémarrer. L’expansion économique a repris et, pour la première fois, la corruption officielle y recule. Manille vient de signer un accord-cadre de paix avec des rebelles musulmans. Les investissements étrangers reprennent, y compris les français qui ont augmenté, pour leur part, de 90% en 2011. On ignore souvent que la communauté française de Manille compte déjà 3.000 membres et ne cesse de gonfler.

Jean-Marc Ayrault est accompagné d’hommes  d’affaires (Alstom, EADS, RATP, PSA et Eiffage) qui participent, le 20 octobre, à un forum d’affaires franco-philippin à l’occasion duquel plusieurs contrats commerciaux doivent être signés. Doit être notamment annoncé l’achat par Philippines Airlines de dix Airbus pour un total de 2,5 milliards d’euros. On parle aussi d’équipement militaire dont l’armée philippine a besoin pour se refaire une santé. Le président Aquino devrait se rendre en visite officielle en France en 2013. Tout cela est de la «diplomatie économique», comme l’on dit aujourd’hui, dans une région où les Français sont de plus en plus nombreux.

Mais ces initiatives, de bon aloi à l’occasion du premier voyage hors d’Europe du premier ministre français, ne peuvent faire oublier que la France officielle se doit d’aller s’incliner, à moins de trois heures de vol de Manille et sur le chemin du retour, devant la dépouille de Norodom Sihanouk, celui qui a été l’asiatique francophone le plus francophile. A la fin de 1990, une fois Sihanouk en meilleure santé et remonté sur son trône, Jacques Chirac lui avait offert une dernière visite d’Etat à Paris, qui l’avait bouleversé. L’absence, en ce moment, de la France à Phnom Penh doit être, d’une manière ou d’une autre, comblée.

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Asie

Claude Cheysson (1920-2012) : un Asiate au Quai d’Orsay

Décédé le 15 octobre 2012 à son domicile parisien, le ministre des relations extérieures (1981-1984) de François Mitterrand a été, d’abord, un amoureux de l’Asie.

Les gens qui s’en souviennent encore gardent l’image d’un Cheysson « brillant » (Laurent Fabius), au cursus universitaire exceptionnel (Polytechnique, en dépit de la Deuxième guerre mondiale, l’ENA). Et au parcours tout aussi exemplaire : il a fui la France en 1943 pour s’engager dans les Forces françaises libres. Il a été en 1955 le chef de cabinet de Pierre Mendès-France, alors Président du conseil. Il a été pendant huit ans (1973-1981) un Commissaire européen chargé des pays en voie de développement  et, à une époque où l’Europe a des moyens, a multiplié les programmes de développement. Enfin, il a été, dans la foulée et pendant plus de trois ans, le chef d’une diplomatie qui, il est vrai, s’élaborait avant tout à l’Elysée.

La face mal connue d’un personnage très actif, sourcilleux, a été son faible pour l’Asie, né d’un séjour à Saigon, au Vietnam du Sud, comme conseiller du gouvernement, de 1952 à 1954. Cheysson est séduit, charmé. Il en garde un souvenir ébloui. Il continue à suivre le dossier lorsqu’il rejoint le cabinet de Pierre Mendès-France en participant aux négociations de Genève. Par la suite, et surtout lorsqu’il est devenu ministre dans les cabinets de Pierre Mauroy puis de Laurent Fabius, il a resserré ses liens avec les pays d’Indochine. Son épouse, dans les années 1990, a entrepris de parrainer une ONG caritative au Cambodge.

Claude Cheysson effectuera un deuxième long séjour en Asie en tant qu’ambassadeur à Jakarta, de 1966 à 1969, dans une période bien tourmentée avec, comme entrée en matière, les massacres de gens suspectés de communisme (un demi-million de victimes) et, durant la deuxième moitié de son séjour, la remise sur pied d’une Indonésie violentée et affrontant la pénurie.  Il reste l’un des rares patrons du Quai d’Orsay à avoir été asiate.

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Analyse Asie Chine Politique Viêtnam

Vietnam : une diplomatie multipolaire, Russie comprise

En contrepoids à la puissance de son voisin chinois, le Vietnam a opté pour la multipolarité. Cette stratégie rend une place à la Russie de Vladimir Poutine.

Quelques mois après sa réélection, Poutine a accueilli, début septembre à Vladivostok, le sommet annuel de l’APEC (Asia Pacific Economic Cooperation) et en a profité pour rappeler que la Russie tenait à son rôle de premier plan en Asie-Pacifique. De son côté, le Vietnam a commencé à se réarmer face à la montée en puissance de la Chine, notamment en Mer de Chine du Sud. Il s’est donc adressé à Moscou, son pourvoyeur d’armes pendant la Guerre froide. En outre, la diplomatie multipolaire de Hanoï est freinée parce que la négociation d’un «partenariat stratégique» avec Washington traine en longueur.

Universitaire américain enseignant à Canberra et considéré comme un observateur averti du Vietnam, Carlyle Thayer estime que le «partenariat stratégique compréhensif», signé, le 27 juillet à Sotchi par Poutine et son homologue vietnamien Truong Tan Sang, s’appuie sur «quatre composantes majeures et de longue date» qui sont : «le pétrole et le gaz ; la coopération énergétique dans le domaine de l’hydroélectricité et du nucléaire ; l’équipement et la technologie militaire ; le commerce et l’investissement». Dans une analyse publiée sur le site d’East Asia Forum, Thayer ajoute trois domaines qu’il juge «importants» : «la science et la technologie ; l’enseignement et la formation ; la culture et le tourisme».

La Russie est ainsi devenue «le premier pourvoyeur d’armes, d’équipement et de technologie» du Vietnam. Les deux pays vont coproduire des missiles de croisière. Le Vietnam devrait commander davantage d’avions d’attaque Sukhoi Su-30. En août dernier, la Russie a lancé le premier des six sous-marins de la classe Kilo commandés par le Vietnam et qui seront livrés d’ici à 2015. Pour procéder à la maintenance du matériel et à la formation des équipages vietnamiens des sous-marins, les Russes auront accès au complexe aéroportuaire de Cam Ranh, aménagé par les Américains et où les Soviétiques se sont installés de 1978 à 2003.

Concernant le pétrole, le gaz et l’énergie, les Russes ont hérité d’une société d’économie mixte formée par les Soviétiques en 1981 : Vietsovpetro est devenue Rusvietpetro. Moscou a également accordé à Hanoï un crédit de près de 8 milliards d’€, dans des conditions avantageuses, pour construire sa premier centrale nucléaire (Ninh Thuan 1).

La Russie est devenue, en 2001, le premier partenaire stratégique du Vietnam . Que «leurs relations bilatérales se soient développées progressivement jusqu’au niveau de partenaires stratégiques compréhensifs est un développement naturel», estime Thayer. Toutefois, après 2001, Hanoï a passé des accords de partenariat stratégique avec plusieurs Etats : «Japon, Inde, Chine, Corée du Sud, Espagne, Royaume-Uni, Allemagne». Surtout, le Vietnam a attendu d’avoir signé, en 2009, un accord de partenariat compréhensif avec son puissant et redouté voisin chinois pour en faire autant avec Moscou.

Ces développements annoncent des manœuvres serrées et délicates. Pour les Russes, Pékin et Hanoï sont de gros clients dans le domaine de l’armement. Mais les Chinois doivent voir d’un mauvais œil Moscou renforcer «les capacités de défense du Vietnam et lui permettre de développer sa propre version de l’interdiction de l’accès à l’archipel des Spratleys», où les deux Etats disposent actuellement de bases (avec la Malaisie et Taïwan, deux autres pays riverains).

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Asie Indonésie Malaisie Philippines Thaïlande Viêtnam

Asie du sud-est : la croissance demeure substantielle

Le FMI a réduit d’un demi-point ses prévisions de croissance en Asie du sud-est : elle devrait être de 5,5% en 2012 et de 5,75% en 2013. Une performance honorable.

Selon le dernier rapport du Fonds monétaire international publié le 8 octobre et repris par le Nation (Bangkok), la croissance dans les cinq principaux pays de l’Asean (Indonésie, Malaisie, Philippines, Thaïlande et Vietnam) devrait atteindre 5,75% en 2013, en très légère progression donc (5,5% en 2012). Si le Vietnam est freiné par une crise bancaire et politique depuis 2010, l’économie thaïlandaise s’est nettement remise de la catastrophe consécutive aux inondations de l’année précédente (un taux d’expansion de 5,6% en 2012, et sans doute de 6% en 2013).

Le taux de croissance de l’Asie du sud-est est supérieur à celui de l’économie mondiale, qui pourrait être, selon le FMI, de 3,3% en 2012 et de 3,6% en 2013. Mais les perspectives à moyen terme sont moins brillantes en raison d’un affaiblissement prévu de la demande extérieure et d’un tassement de la croissance en Chine (7,75% en 2012 et 8,25% en 2013) et en Inde (une fourchette de 5% à 6% en 2012-2013). «Une demande extérieure plus faible est le principal facteur d’une croissance légèrement plus faible des 5 de l’Asean», estime le FMI, à l’exception de la Thaïlande, où la croissance a rebondi.

En dehors de l’influence de facteurs extérieurs (la crise de la zone euro, les problèmes de fiscalité aux Etats-Unis),  l’un des risques pour l’Asie serait un «renversement» de la poussée récente des investissements en Chine. «Le résultat pourrait être, dans le futur, un ralentissement des investissements plus brutal que prévu [en Chine] ; un tel choc affecterait fortement les économies qui font partie d’un chaine de ravitaillement asiatique très imbriquée – par exemple, la Corée du sud, la Malaisie, Taïwan, la Thaïlande – et qui aurait des effets importants, indirectement, sur d’autres exportateurs majeurs, en particulier l’Allemagne et le Japon», note le FMI.

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Asie Indonésie Politique

Dix ans après : le carnage de Bali ou l’échec du terrorisme

202 tués, des centaines de blessés. Voilà dix ans, le double attentat de Bali a retourné l’opinion publique indonésienne contre le terrorisme.

Le soir du 12 octobre 2002, deux explosions de bombes puissantes dans une boîte nuit et devant un bar attenant de Kuta, à Bali, ont fait d’énormes dégâts. Elles ont tué de nombreux touristes étrangers, dont 88 Australiens, brisé de nombreuses familles, laissé des dizaines de gens handicapés à vie. Mais en Indonésie et, en règle plus générale, dans toute l’Asie, les réactions de dégoût ont été les plus fréquentes. Les musulmans – environ 200 millions de croyants en Indonésie – ont pris leurs distances à l’égard de petits groupes de fanatiques qui prêchent la haine contre les «infidèles» et le «satan américain».

Après Bali, les attentats se sont poursuivis : «Quatre attaques importantes ont ciblé des Occidentaux en Indonésie, causant la mort de 45 personnes», relève le Washington Post. La dernière, menée en 2009 contre deux palaces de Jakarta, le J. W. Marriott et le Riz-Carlton, ont tué 7 personnes. Mais entre-temps, avec des aides américaine et australienne, la lutte anti-terroriste a marqué de nombreux points. Une unité indonésienne anti-terroriste, le Détachement 88, aux méthodes à la fois efficaces et brutales, a éliminé des dizaines de terroristes. La Jemaah Islamiyah (J.I.), groupe terroriste clandestin régional et liée à Al-Qaïdah, a été démantelée. L’émir de la J.I., Abou Kabar Baachir, purge aujourd’hui une peine de quinze ans de prison pour avoir financé l’entrainement de terroristes. La plupart de ceux qui ont participé à l’attentat de Bali ont été arrêtés. Des dizaines de cadres de la J.I., ou des cellules terroristes qu’elle a engendrées, ont été tués.

Le plus probant a sans doute été l’indifférence manifestée par le public indonésien quand trois des responsables de l’attentat de Bali ont été condamnés à mort et exécutés. Si l’islamisation demeure un processus évident en Indonésie, les extrémistes n’en tirent guère profit. Les relations avec l’Australie n’ont jamais été si solides. «Les poseurs de bombes à Bali voulaient semer la haine entre les deux pays et c’est l’opposé qui s’est produit», vient d’estimer dans une chronique (The Age (Melbourne) John Howard, à l’époque premier ministre australien. En 2011, près de 800.000 touristes australiens se sont rendus à Bali, contre 268.000 en 2003 (et 346.000 en 2002). Si le terrorisme n’est pas à bout de souffle, il en sort bien affaibli : selon le Washington Post, ces deux dernières années, une quinzaine d’attaques «ont tué au total onze individus, tous des policiers, et blessés des douzaines de civils». Un bilan, certes, triste mais loin d’être inquiétant.