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Indonésie Politique

Indonésie : La traque de 3 Français soupçonnés de terrorisme

La police française aurait informé Jakarta que trois ressortissants français soupçonnés de terrorisme tentaient de se réfugier en Indonésie.

Ansyaad Mbai, patron de l’Agence nationale de lutte contre le terrorisme, a déclaré le 26 août au Jakarta Post que la police française avait averti l’Indonésie que trois Français tentaient de se réfugier dans le pensionnat musulman de Ngruki, à Solo (Surakarta, Java Central). Parmi eux figurerait Frédéric C. Jean Salvi, 41 ans, dit Ali, converti à l’islam voilà douze ans lors d’un séjour en prison, recherché par Interpol et qui aurait trempé dans des attentats anti-indonésiens en France. Salvi avait démenti voilà deux ans, dans un entretien accordé par courriel à France-Soir, toute activité terroriste.

A Ngruki, dans la banlieue de Solo, se trouve la fameuse école coranique Al-Mukmin fondée voilà plus de quarante ans par Abou Bakar Baachir, un prédicateur âgé de 73 ans et qui purge aujourd’hui une peine de 15 ans de prison pour avoir financé un camp d’entraînement de terroristes dans la province d’Atjeh, dans le nord de Sumatra. Baachir est censé avoir été l’émir de la Jemaah Islamiyah, groupe terroriste de l’Asie du Sud-Est lié à Al-Qaïdah, selon les services de renseignements occidentaux et indonésiens. Salvi aurait rencontré Baachir au Pakistan avant de se rendre en Indonésie y passer plusieurs années dans les milieux islamistes. A ce titre, selon Ansyaad Mbai, il figure depuis 2010 sur la liste des fugitifs les plus dangereux établie par Jakarta.

Salvi est soupçonné, selon le Jakarta Post, d’entretenir «des liens avec le réseau terroriste» responsable de la mort de sept personnes à Toulouse en mars 2012 et dont l’un des membres, Mohamed Merah, a été abattu par la police française. De son côté, Ngruki est considéré comme un foyer islamiste et plusieurs anciens élèves d’Al-Mukmin ont été impliqués dans des attentats terroristes, notamment celui qui a fait plus de 200 victimes à Bali en octobre 2002. «Nous surveillons de près le pensionnat de Ngruki et sommes en contact permanent avec les autorités françaises. Nous enquêtons sur la façon dont ces trois citoyens français sont rentrés en contact avec l’école et sur les raisons de leur projet de s’y rendre», a également déclaré Ansyaad Mbai, tout en ne fournissant aucune indication sur les deux compatriotes de Salvi.

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Analyse Cambodge Histoire Indonésie Politique

Indonésie : un parti influent prône le déni de mémoire

Si le public indonésien se pose de sérieuses questions sur les massacres de 1965, le Golkar, parti en tête dans les sondages, refuse ce devoir de mémoire.

«Que veulent-ils de plus ? Cela suffit, non ?». Telle est la réponse, selon le Jakarta Globe, de Leo Nababan, secrétaire général adjoint du Golkar, à propos des survivants des massacres de 1965-1966 en Indonésie (plus d’un demi-million de victimes) dont les droits civiques ont été progressivement restaurés depuis la chute de Suharto en 1998. Leo Nababan s’oppose à ce qu’un suivi officiel soit donné au rapport de Kommas HAM, la Commission nationale des droits de l’homme, qui a conclu quatre années d’enquête en estimant que la persécution et les meurtres des membres présumés du PKI (PC indonésien) en 1965-1966 représentent «une grossière violation des droits de l’homme».

Au nom de la lutte contre le communisme, a relevé Kommas HAM, de nombreux crimes ont été commis par les militaires : meurtres, expulsions, torture, viols et autres abus. Leo Nababan rétorque que les enseignements du communisme (et le PKI) étant toujours officiellement bannis depuis 1966, il n’y a aucune raison qu’une suite soit donnée au rapport de Kommas Ham par des services de l’Etat, contrairement à l’ordre donné par le président Susilo Bambang Yudhoyono à l’Attorney general.

Le Golkar (pour Golongan Karya ou «groupes fonctionnels») est le mouvement sur lequel l’autocrate Suharto s’est appuyé pour gouverner. A la fin du règne de Suharto (1966-1998), lequel est considéré comme le principal responsable des massacres de 1965-1966, le Golkar a emporté jusqu’à 70% des suffrages lors d’élections générales strictement contrôlées. Le problème est que le Golkar ne s’est pas effondré après le limogeage de Suharto voilà quatorze ans et que cette machine électorale a assez bien survécu pour se retrouver aujourd’hui en tête, de peu il est vrai, dans les sondages.

Leo Nababan n’est pas le seul à réclamer que cette sinistre page d’histoire soit oubliée. Priyo Budi Santoso, vice-président du Golkar, en a fait autant voilà quelques semaines en demandant au pays d’oublier ces massacres. Une frange politique de l’Indonésie s’oppose donc encore à ce que la lumière soit faite alors que deux générations d’Indonésiens ont été privées de leurs droits civiques, leurs biens étant saisis et les descendants des victimes étant, par exemple, longtemps interdits d’emploi ou même d’école.

Peu après ces massacres, donc avant la tragédie des Khmers rouges au Cambodge (1975-1979), un rapport interne de la CIA américaine avait conclu qu’ils ont été parmi les pires du XX° siècle, à ranger aux côtés des «purges soviétiques des années 1930, des crimes nazis pendant la Deuxième guerre mondiale, et du bain de sang maoïste au début des années 1950». Si le Golkar, qui soutient le gouvernement actuel, revient au pouvoir à l’occasion des élections de 2014 (présidentielle et législatives), le déni de mémoire se prolongera encore au moins quelques années, en dépit de l’indignation affichée par les militants des droits de l’homme.

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Cambodge Politique Thaïlande

Musulmans du Cambodge : RAS selon la diplomatie thaïlandaise

Le gouvernement thaïlandais tente d’atténuer les récents propos du chef de l’armée sur l’implication de Cambodgiens musulmans dans l’insurrection séparatiste dans le Sud de la Thaïlande.

C’était une de ces déclarations maladroites dont le bouillant général Prayuth Chan-Ocha, chef de l’armée de terre de Thaïlande, est coutumier. Il avait déclaré, le 21 août, qu’il pensait que des Cambodgiens musulmans étaient impliqués dans l’insurrection séparatiste qui secoue le Sud à majorité musulmane de la Thaïlande. La preuve avancée par l’officier était plutôt légère : « Nous savons que tous les Cambodgiens qui arrivent en Thaïlande ne rentrent pas au Cambodge ». Le ministère des Affaires étrangères du Cambodge avait réagi rapidement en protestant contre ces propos. Et le chef de la diplomatie thaïlandaise, Surapong Tovichakchaikul a, comme souvent, été obligé de recoller les morceaux, en niant que le gouvernement de Bangkok soupçonnait les voyageurs cambodgiens musulmans de participation à l’insurrection. Pour la plupart, a-t-il dit, ceux-ci traversent la Thaïlande et passent la frontière sud du pays pour se rendre en Malaisie, soit pour y travailler, soit pour visiter des parents qui y travaillent.

Du simple bon sens, mais qui a échappé au plus brillant des militaires de Thaïlande. Les accusations d’implication de musulmans étrangers dans l’insurrection séparatiste ne sont pas nouvelles. Les Chams du Cambodge et les Atjehnais d’Indonésie ont longtemps étaient des cibles favorites. Après la résurgence de l’insurrection en 2004, le général Kitti Rattanachaya, un ancien commandant de la 4ème armée en charge du Sud, faisait aussi les gros titres de la presse par ses déclarations sur les liens entre la Jemaah Islamiya (le réseau terroriste basé en Indonésie) et les insurgés Malais musulmans du Sud. La plupart des analystes du conflit insistent néanmoins sur le caractère très peu internationalisé de la rébellion.

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Politique Thaïlande

Thaïlande: 10 000 rebelles dans le Sud musulman, selon l’armée

L’armée thaïlandaise a publié un manuel en deux volumes où elle explique la structure et les objectifs du mouvement séparatiste qui a refait surface en 2004 dans le Sud à majorité musulmane.

Le titre – « Ordre de bataille » – pourrait annoncer un film d’action à grand spectacle avec des vedettes hollywoodiennes, mais il s’agit plus prosaïquement d’un manuel en deux volumes publié par l’armée thaïlandaise, qui décrit sur 500 pages l’organisation de l’insurrection séparatiste. Selon la journaliste du Bangkok Post spécialisée dans les affaires militaires, Wassana Nanuam, le deuxième volume est le plus frappant : il dresse une liste de quelque 10.000 membres de l’insurrection, allant des politiciens de niveau national aux simples villageois en passant par les chefs d’écoles religieuses locales. Sur ce total, 866 personnes citées sont l’objet de mandats d’arrêt. Le réseau insurrectionnel serait coordonné par un conseil central de 20 personnes, appelé le Dewan Pimpinan, dont le secrétaire-général est, selon le manuel, Sapae-ing Basor, un ancien directeur d’école coranique recherché par les autorités.

Le premier volume décrit l’organisation du réseau insurrectionnel en brossant d’abord un tableau de la rébellion séparatiste avant janvier 2004 et de son évolution après. Une source militaire citée par Wassana Nanuam indique que plusieurs factions séparatistes sont en concurrence au sein de cette nébuleuse. L’insurrection séparatiste avait connu une résurgence en janvier 2004 après un audacieux raid organisé par une nouvelle génération de rebelles sur un camp militaire dans la province de Narathiwat. Depuis, les violences ont causé la mort d’environ 5.200 personnes. Les informations publiées par l’armée dans ce manuel sont à prendre avec certaines précautions. En 2010, l’armée avait publié, au plus fort des tensions entre le gouvernement et les Chemises rouges (adversaires de l’establishment traditionnel), le schéma d’un « réseau anti-monarchiste » – schéma qui s’était révélé par la suite largement fantaisiste.

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Analyse Thaïlande

Chronique de Thaïlande : un bouddhisme prêt à la consommation

Un mouvement bouddhique thaïlandais, qui revendique 100.000 fidèles, séduit les classes moyennes urbaines et transforme le bouddhisme pratiqué dans le pays.

Le temple bouddhique Dhammakaya, situé à une vingtaine de kilomètres au nord de Bangkok, dans la province de Pathum Thani, est revenu récemment sous les feux de la rampe et dans les colonnes des journaux, en diffusant sur sa chaîne cablée et sur son site internet (www.dmc.tv) une bizarre série de sermons sur le thème « Où est Steve Jobs ? ». Comme le souligne Sanitsuda Ekkachai, dans le quotidien Bangkok Post, si cette ahurissante présentation – où l’on apprend que le fondateur d’Apple décédé l’an dernier est aujourd’hui un Thepphabhut Phumadeva (une divinité) de rang moyen, qui habite un immeuble de six étages fait d’argent et de cristal – venait d’un groupement marginal, on pourrait en rire et l’oublier. Mais la plaisanterie, ici, éprouve du mal à passer, quand on sait que le temple Dhammakaya est le mouvement bouddhique le plus riche et le plus influent du pays à l’heure actuelle. Dans son éditorial du 23 août, Sanitsuda Ekkachai, auteure d’un livre sur le bouddhisme thaïlandais, affirme que le mouvement Dhammakaya est sur le point de « prendre le contrôle du clergé bouddhique » de Thaïlande.

Cette mise en garde est peut-être un peu alarmiste, mais il est néanmoins sûr que le temple Dhammakaya, sérieusement ébranlé à la fin des années 1990 par des accusations de spoliation de terres et de distorsion des enseignements du Bouddha, a considérablement renforcé sa position. Le prince héritier de Thaïlande Vajiralongkorn n’a jamais hésité à s’afficher avec les leaders du mouvement. Le temple aurait aussi d’excellents contacts avec l’ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra, exilé depuis 2008. Il s’est rangé du côté des Chemises rouges (adversaires de l’establishment traditionnel) dans la lutte actuelle pour déterminer l’orientation politique du royaume.

Il peut être utile de rappeler quelques données sur l’origine du temple Dhammakaya et sur son histoire pour replacer sa position de force actuelle dans un continuum. Le temple a été fondé en 1969 par une nonne et quelques étudiants qui étaient des disciples du célèbre bonze thaïlandais Phra Mongkol Thep Muni (ou Luang Po Sout) dont on peut voir le portrait dans de très nombreux magasins de Bangkok. Luang Po Sout, décédé en 1959, avait redécouvert une ancienne méthode de méditation, parmi les nombreuses existantes, qui consiste à visualiser une boule de cristal, ou parfois un bouddha de cristal, se déplaçant à l’intérieur de son corps. C’est la méthode Dhammakaya ( » le corps méthaphorique du Bouddha  » ou « la collection des qualités du Bouddha », selon des historiens du bouddhisme), qui s’inspire de l’école bouddhique Mahayana et non du bouddhisme ancien Theravada, lequel est suivi par une majorité des Thaïlandais.

Relativement facile à mettre en œuvre, cette technique de méditation permet d’aboutir avec un entrainement sérieux à un état d’extase que les bonzes du temple disent être un premier pas vers le nirvana (ou nibhan en pali). Cette concrétisation du nirvana, qui est un état de non-existence selon le canon bouddhique, semble différer considérablement avec les enseignements du bouddhisme ancien. « Ils ont complétement dérivé par rapport à l’enseignement de Luang Po Sout. Maintenant, ils font dans la psychologie de masse », notait en 1995 l’universitaire Chatsumarn Kabilsingh, devenue depuis la première moine-femme de Thaïlande.

Quoiqu’il en soit, le temple Dhammakaya a très bien su remodeler le bouddhisme siamois pour créer une formule attractive pour les classes moyennes urbaines, notamment celles de Bangkok. Le haut niveau d’études des bonzes (80 % ont une licence), les équipements du temple – du parking géant souterrain aux supermarchés pour acheter les offrandes – et la gestion ordonnée des lieux (pas de chiens pouilleux ici) séduisent les familles bangkokiennes. Elles viennent, habillées de blanc, méditer le dimanche matin, avant leur sortie de l’après-midi. Surtout, le temple Dhammakaya insiste beaucoup sur les bénéfices matériels et psychologiques immédiats que l’on peut retirer de la méditation, laquelle n’est considérée dans le bouddhisme Theravada que comme un moyen pour accéder progressivement à la sagesse. Pour couronner le tout, des techniques agressives de marketing poussent les fidèles à effectuer d’importantes donations pour garantir leur karma. « Dhammakaya dit à la classe moyenne influencée par la globalisation qu’elle peut avoir le beurre et l’argent du beurre. Le temple transforme le bouddhisme pour le rendre compatible avec le capitalisme et le consumérisme », expliquait en 1999 l’universitaire Suwanna Satha-Anand au New York Times.

De fait, les transformations apportées par Dhammakaya, qui est implanté dans une douzaine de pays dont les Etats-Unis et envisage de devenir « le centre mondial du bouddhisme », sont profondes. Elles pourraient même constituer les prémisses d’un nouveau mouvement bouddhique, à connotation matérialiste et missionnaire, comme cela a été le cas après les grandes scissions de l’histoire. Le Conseil des anciens, l’autorité ultime du bouddhisme thaïlandais, semble en tous les cas très hésitant à tancer le mouvement Dhammakaya sur les manquements à la discipline et les fautes. Les déclarations de Phra Dhammachayo, l’abbé de Dhammakaya, affirmant être la « tête de Bouddha » et posséder des pouvoirs surnaturels sont, par exemple, une des cinq infractions graves justifiant l’exclusion de la communauté monastique.

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Société Viêtnam

Vietnam : des instructions pour se suicider sur la Toile

Des Vietnamiens ont récemment découvert sur la Toile, à la portée d’adolescents, des sites qui décrivent différentes façons de se suicider. Un véritable choc.

«Manuel pour se suicider», «Guide pour la mort», «Enseignement gratuit en ligne de la manière de se suicider», telles sont les propositions avancées par des sites en langue vietnamienne, rapporte le site d’information VietnamNet en se gardant de les mentionner. Ces sites décrivent les méthodes pour  se donner la mort : en mettant le feu à de l’essence, en recourant à un choc électrique dans une baignoire… Après avoir aligné leurs instructions, de soi-disant «experts» avertissent leurs lecteurs qu’il ne faut pas suivre les exemples donnés.

Au Vietnam, sur des réseaux sociaux, des appels désespérés d’adolescents sont enregistrés. «Je suis totalement déprimé car je suis soupçonné d’être un chapardeur dans ma classe. Donnez-moi un conseil», écrit un élève de onzième (l’équivalent d’une première française). «Aidez-moi ! Je suis désespéré, je ne sais plus quoi faire», écrit un autre. «J’ai une famille, ce que l’on qualifie d’habitude de foyer, mais c’est un enfer pour moi. Car c’est seulement en enfer que chaque individu n’agit que pour lui-même et que les gens se haïssent. Mes parents se balancent des insultes tous les jours. Je hais réellement cette vie», écrit un troisième.

Récemment, dans la province de Ha Tinh, un élève de onzième (première) s’est immolé par le feu parce que l’aveu de son amour a été rejeté par sa belle. A Hanoï, des gens sont intervenus à temps pour empêcher une écolière de se jeter dans le Fleuve rouge à partir du pont Long Biên (l’ex-Paul Doumer). Dans une société imprégnée de romantisme, les adolescents sont particulièrement sensibles : un amour déçu, une insulte, une dispute suffisent à les déprimer. Des «experts», sur ces sites, vont jusqu’à leur suggérer une «mort romantique» : «dormir dans une pièce fermée avec un million de roses». Ecœurant.

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Histoire Viêtnam

Vietnam : une lettre fascinante de Hô Chi Minh datant de 1921

Une lettre du révolutionnaire vietnamien, adressée à un pasteur protestant, a été découverte et authentifiée par Pascal Bourdeaux. Elle date de 1921.

Cette missive est donc postérieure au Congrès de Tours, où Hô Chi Minh a adhéré au PCF, choisissant donc les communistes contre les socialistes. Les témoignages sur l’évolution de celui qui se fait appeler à l’époque Nguyên ai Quôc (Nguyên le patriote) est mal connue. Il séjourne encore en France avant son départ pour Moscou. La lettre, tapée à la machine et signée d’une écriture «élégante, légèrement en italiques et soulignée à l’encre noire», est une réponse à Ulysse Soulier, pasteur protestant qui projette d’ouvrir une mission au Vietnam. Hô Chi Minh, de façon surprenante, l’encourage à le faire dans certaines conditions. Il existe, note-t-il, des éléments d’«émancipation»  dans le travail des missionnaires qu’il juge en contradiction totale avec la colonisation.

Cette lettre confirme qu’à l’époque, Hô Chi Minh entretenait des correspondances avec des «évangélistes dissidents», qu’il était à la fois un diplomate accompli et un patriote exigeant. C’est la période qui suit son appel au président Woodrow Wilson, lors de la conférence de Versailles en 1919, et sa participation à la fondation du PCF l’année suivante. Elle précède un processus rapide de radicalisation et de militarisation. «Une Indochine sous contrôle ne peut pas être réellement chrétienne», écrit le jeune révolutionnaire, alors âgé de 31 ans.

Spécialiste des religions en Asie du Sud-Est, auteur d’une remarquable thèse sur les sectes politico-religieuses dans le delta du Mékong, Bourdeaux a trouvé cette lettre en fouillant les archives de la Société évangélique missionnaire de Paris. Le texte de Hô Chi Minh et les minutieuses annotations de Bourdeaux, alors professeur associé à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes de Paris, ont été publiés en anglais dans le numéro de juillet du  Journal of Vietnamese Studies. La version française, donc originale, sera publiée dans le prochain numéro d’Etudes Théologiques et Religieuses (http://revue-etr.org/2012-numero-2.html)

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Analyse Politique Viêtnam

Vietnam : les arrestations se poursuivent dans les milieux financiers

Une série d’arrestations a lieu dans les milieux d’affaires alors que la bourse dégringole et que la dette des entreprises publiques devient très préoccupante.

La dernière arrestation en date est celle de Ly Xuân Hai, ancien PDG de l’Asia Commercial Bank (ACB). Agé de 47 ans, originaire de Hanoi et titulaire d’un master de Paris-Dauphine, Hai a été arrêté en début de soirée le 23 août, selon le site VietnamNet, à son domicile à Hochiminh-Ville. Son domicile et ses bureaux ont été fouillés. Il est accusé d’avoir «intentionnellement violé les règlements de l’Etat sur la gestion économique». Entre-temps, la Banque centrale est intervenue, comme annoncé, pour renflouer en liquidités l’ACB dont la clientèle s’est ruée pour retirer ses fonds et dont l’action en bourse a chuté de 20%. Hai, PDG depuis 2005, avait démissionné dans la matinée et a été aussitôt remplacé par l’un de ses adjoints.

Son arrestation est intervenue deux jours après celle de Nguyên Duc Kiên, l’un des fondateurs de l’ACB et l’une des grandes fortunes du Vietnam. Kiên a été arrêté pour des raisons qui, officiellement, n’ont rien à voir avec la gestion de l’ACB, quatrième banque commerciale du pays. D’autres arrestations avaient précédé, notamment celles, le 8 août, des deux ‘rois de l’acier’ à Haiphong, Pham Van Tu (le père) et Pham Hai Thanh (le fils), dont la compagnie Thai Son (import-export, chantiers navals, fabrication de l’acier) était censée être financièrement solide. En 2011, Thai Son figurait encore, selon VietnamNet, parmi les cinq cents sociétés privées les plus importantes. A la suite de la chute de 50% du prix de l’acier depuis la crise de 2008, Thai Son a connu de sérieux déboires, ne pouvant plus rembourser ses dettes.

La dette des entreprises publiques est évaluée, de son côté, à quelque 40 milliards d’€, ce qui est considérable. Il y a déjà eu les scandales des trous dans les budgets de Vinashin (chantiers navals) et Vinalines (transports maritimes). D’autres affaires pourraient exploser, mettant en cause un système de copinage qui rend l’âme. Les luttes de clans au sein du PC vietnamien, qui conserve le monopole du pouvoir politique, en sont déjà affectées.  Nguyên Duc Kiên passait, par exemple, pour être le partenaire en affaires de la fille du premier minisre Nguyên Tan Dung, considéré comme l’homme-clé du Bureau politique et du gouvernement.