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ASEAN Asie Politique

Une zone régionale libre d’armes nucléaires demeure boudée

La zone « libre d’armes nucléaires » voulue dès 1995 par l’Asean demeure boudée par les grandes puissances. Aucun accord ne semble se dégager sur ce point.

Sans attendre l’intégration de la Birmanie et du Laos (1997), ainsi que celle du Cambodge (1999), les Etats membres de l’Association des nations de l’Asie du sud-est (Asean) s’étaient entendus en 1995 sur la création d’une zone « libre d’armes nucléaires » (Seanwfz , pour Southeast Asian Nuclear Weapons Free Zone treaty). Dix-sept ans plus tard, alors que se réunissent à Phnom Penh les journées annuelles de l’Asean et son Forum sur les questions de sécurité, ce traité demeure boudé par les grandes puissances nucléaires.

Ce traité est un engagement des Etats membres à ne pas developper ou acquérir des armes nucléaires, à interdire tout test d’arme nucléaire dans (ou à l’extérieur) de la zone couverte par le traité et qui comprend les territoires, les plateaux continentaux, les zones maritimes économiques exclusives. Les négociations engagées dans la foulée par l’Asean avec ses «partenaires de dialogue», qui seront représentés du 11 au 13 juillet à Phnom Penh, n’ont pas abouti. Les Etats-Unis et la Russie refusent toute limitation à la circulation de leurs armes nucléaires. La Chine fait valoir que la «zone libre d’armes nucléaires» pourrait empiéter sur les eaux chinoises et violer sa souveraineté. La Grande-Bretagne et la France ont des réserves sur la définition elle-même de la zone dénucléarisée.

Aucun espoir de trouver un compromis ne semble pouvoir se dessiner car les réserves exprimées par les puissances nucléaires remettent en cause la substance du traité. Entre-temps, la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton a annoncé qu’elle profiterait de son passage au Cambodge pour se rendre également pour la première fois au Laos et pour retourner brièvement au Vietnam.

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Viêtnam

Maladie cutanée mortelle au Vietnam : le mystère demeure

L’origine d’une maladie qui a déjà fait 23 victimes dans le centre du Vietnam demeure une inconnue. Les recherches se poursuivent.

Accompagnés par une équipe médicale vietnamienne de Ho Chi Minh-Ville, deux médecins belges, un épidémiologiste et un expert des maladies du foie, se sont rendus début juillet dans le district de Ba To, province de Quang Ngai, dans le Vietnam central, pour tenter de percer le mystère de la maladie cutanée qui a affecté 239 personnes et fait 23 victimes. Ils procèdent à l’analyse du riz consommé et des champignons qui le couvrent. Ils ont également contrôlé les sources d’eau, les conditions de vie et les médicaments donnés aux victimes.

La maladie provoque des ulcères aux mains et aux pieds, ainsi que d’intenses brulures. Dans un deuxième temps, les membres sont victimes d’ankylose et la maladie attaque des organes vitaux, comme le foie ou les poumons. Les experts ont observé que la maladie se répandait de novembre à avril et que seulement deux cas supplémentaires ont été recensés en juin 2012.

La maladie a été baptisée Hyperkeratosis palmoplantaire inflammatoire par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). « Nous ignorons les causes du syndrome, ou sa source de transmission, et l’identification de la cause peut prendre davantage de temps qu’anticipé et se révéler insaisissable», a estimé le Dr Takeshi Kasai, représentant de l’OMS au Vietnam, selon le quotidien Thanh Nien.

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Politique Timor Leste

Timor Leste: Xanana Gusmao devrait rester aux commandes

Le parti du héros de la résistance anti-indonésienne s’est placé en tête lors du scrutin législatif du 7 juillet. Xanana devrait demeurer premier ministre.

Le Congrès national pour la reconstruction du Timor Leste (CNRT), présidé par Xanana Gusmao, serait arrivé en tête lors des élections législatives du 7 juillet, avec 36% des suffrages.  Le Fretilin (Frente Revolucionaria de Timor-Leste independente) serait en deuxième position avec un peu plus de 30% des votes exprimés. En troisième position, avec 10% des suffrages, se placerait le Parti démocratique (PD), qui est représenté au sein de l’actuel gouvernement dirigé par Xanana Gusmao.

L’ancien héros de la résistance à l’occupation militaire par l’Indonésie (1975-1999) devrait donc être reconduit à la tête d’une coalition gouvernementale une fois que la Commission électorale aura confirmé des résultats qui, pour l’instant, portent sur le dépouillement de 95% des bulletins de vote. En mars et avril 2012, les deux tours du scrutin présidentiel, emporté par Taur Matan Rauk, ainsi que le vote législatif du 7 juillet se sont déroulés dans le plus grand calme, ce qui laisse prévoir le retrait des bérets bleus de l’ONU et des petits contingents australien et néo-zélandais en charge de la sécurité.

Elu triomphalement président en 2002, Xanana Gusmao, aujourd’hui âgé de 66 ans, avait renoncé à solliciter un deuxième mandat en 2007 pour participer aux élections législatives à la tête du CNRT. Il est premier ministre depuis août 2007. En mars-avril 2012, il a soutenu la candidature à la présidence de Taur Matan Rauk, un de ses anciens lieutenants. Un nouveau mandat lui offrira une chance supplémentaire de tenter de sortir son petit pays de la pauvreté.

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Politique Société Viêtnam

Vietnam : brutalités contre des catholiques au Nghê An

Des voyous, parfois en uniforme, s’en sont pris à la petite communauté catholique de Con Cuông. Des fidèles ont été blessés et une statue de la Vierge brisée.

Des agressions ont eu lieu en juin mais, à ce jour, les brutalités les plus graves ont été commises le 1er juillet quand une cinquantaine d’individus ont occupé la chapelle de Con Cuông, battu les fidèles présents, vandalisé les lieux, brisant au passage une statue de la Vierge et contraint un prêtre à dire la messe du dimanche en plein air dans «un brouhaha indescriptible». Selon Eglises d’Asie,  site des Missions étrangères de Paris, «cadres et voyous s’engouffrèrent dans la chapelle en brisant tout sur leur passage.»  Con Cuông est un district de la province de Nghê An, dans le centre du Vietnam.

«Les agresseurs, ajoute Eglises d’Asie, ont reçu du renfort, des unités de la police et de l’armée les ayant rejoints, l’arme pointée vers la chapelle.» L’après-midi, de longues négociations avec les autorités locales débouchèrent sur des «excuses officielles» présentées par le vice-président du district après la reconnaissance, par les autorités, «qu’elles avaient été les commanditaires de troubles perpétrés dans un lieu de culte.»

Le 4 juillet, un communiqué de l’évêché local a condamné «la profanation» du lieu de culte et l’évêque Mgr Paul Nguyên Thai Hop, alors en voyage à l’étranger, a affirmé sa «communion avec les catholiques persécutés.» Dans son communiqué, l’évêché estime que les incidents du 1er juillet sont «les résultats d’une stratégie mise en place depuis longtemps et soigneusement montée par des forces obscures.» Ce communiqué ajoute que «des centaines de cadres administratifs, d’agents de la Sécurité, de militaires et de voyous» ont participé aux «troubles», indiquant ainsi que l’affaire est loin d’être classée. Les catholiques – de 6% à 7% de la population du Vietnam – forment une communauté soudée et influente.

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Analyse Politique Thaïlande

Chronique siamoise : le pouvoir mystérieux des mots

En Thaïlande, l’emploi d’expressions alambiquées pour évoquer des réalités dangereuses est un moyen de neutraliser leur pouvoir maléfique.

Le président du Parlement de Thaïlande Somsak Kiatsuranont s’est retrouvé en position embarrassante après la mise en ligne sur internet début juillet d’une allocution qu’il a prononcée devant ses partisans politiques lors d’une rencontre privée. Dans ce clip audio de cinq minutes, il indique avoir discuté à maintes reprises des débats parlementaires sur le vote d’amendements constitutionnels avec «une personne qui se trouve au loin» (khon tang klai). Tout le monde sait, bien sûr, à qui Somsak fait allusion, mais même dans ce cadre privé, le politicien a préféré ne pas prononcer le nom de l’ancien premier ministre Thaksin, exilé à Dubai depuis 2008.

L’histoire politique thaïlandaise est émaillée de ces formules soigneusement concoctées pour évoquer une réalité mystérieuse en évitant de la cerner de trop près. Dans une région donnée, le «pouvoir de l’ombre» (amnat meut) est l’expression consacrée pour désigner le parrain mafieux local. Quand les militaires agissent dans les coulisses du monde politique pour influencer le cours des évènements, on parlera de «main invisible» (meu thi mong mai hen) ou, si le journaliste ou l’orateur est plus audacieux, «d’hommes en uniforme». Le roi Bhumibol Adulyadej sera déguisé sous l’appellation neutre «d’institution» (sathabaan), expression d’origine sanskrite que l’on accompagne volontiers d’un mouvement des yeux vers le plafond à la manière de Louis de Funès dans Les gendarmes de Saint Tropez quand il évoque le grand homme de la Ve République.

Dans ce registre, un exemple frappant d’amortissement verbal de réalités trop abruptes a été le titre d’un article du Bangkok Post, publié le 19 juin : «Military bullets killed civilians». L’article nous apprend que l’enquête de la police a conclu que cinq des six personnes tuées le 19 mai 2010 dans l’enceinte de la pagode Pathum Wanaram, durant la répression des manifestations des Chemises rouges à Bangkok, ont été tuées par des balles provenant d’armes utilisées habituellement par l’armée thaïlandaise et que ces balles avaient été tirées «d’une position en hauteur». Il se trouve qu’une section de militaires thaïlandais a été photographiée par les médias alors qu’ils faisaient feu à partir du viaduc du métro aérien de Bangkok en direction de la pagode au moment même où les six victimes ont été tuées. Mais personne, du moins du côté des médias et des officiels, ne joint les pointillés. Et donc, ce sont des «balles militaires qui ont tué des civils». Pour faire le saut et déclarer que ce sont effectivement les militaires qui ont tué ces six malheureux dans l’enceinte du temple, il aurait sans doute fallu plusieurs témoins affirmant avoir vu les balles sortir du canon des armes tenues par les militaires, les avoir suivies durant toute leur trajectoire, puis les avoir vues se ficher dans la chair des victimes. En fait, tout le monde sait depuis le début ce qui s’est passé, mais tous (sauf les familles des victimes) admettent que cela ne suffit pas pour le dire. Les mots sont dangereux.

Peut-être du fait de la culture bouddhique mais vraisemblablement pour des raisons plus pragmatiques, les Thaïlandais tendent à croire qu’évoquer trop directement des phénomènes ou des personnages importants ou controversés entraîne des périls, car les humeurs de ces derniers sont changeantes. En revanche, enrober ces réalités d’un épais tissu de mots neutralise leur pouvoir potentiellement maléfique. Dans la Thaïlande traditionnelle, prononcer le nom d’un esprit versatile était le meilleur moyen de s’en attirer les foudres. Et il est courant qu’un Thaïlandais change son prénom officiel s’il le juge trop clinquant, de peur d’offenser des puissances du passé.

Prendre ses précautions vis-à-vis des mots peut être vu comme une attitude sage. Le philosophe anglais John Locke n’écrivait-il pas dès le XVIIe siècle qu’il fallait «prendre les mots pour ce qu’ils sont, des signes de nos idées seulement, et non pour les choses elles-mêmes» ? Mais à trop enrober, on accumule aussi les malentendus. Et ces malentendus peuvent parfois déboucher sur des explosions.

Bouffée d’air salutaire dans ce monde en demi-teintes, il y a aussi les Thaïlandais qui mettent les points sur les «i», comme le politicien Chuwit Kamolwisit avec son gros marteau sur l’épaule. Ex-patron d’une chaîne de massages coquins, Chuwit tire sa force de sa réputation de mauvais garçon. Il n’a donc pas à faire attention à son langage. Début juillet, lors d’un raid organisé par ses soins sur un casino clandestin protégé par la police, il a déclaré devant la presse : «Les casinos clandestins représentent la forme la plus visible de la corruption de la police.Vous les voyez partout». Ceux qui ont l’audace d’appeler un chat un chat, fût-il siamois, vivent dangereusement, mais ils acquièrent un certain respect notamment de la part des petites gens. Car l’emploi des circonvolutions et des euphémismes est le plus souvent le signe de la peur imposée par les puissants à ceux qui sont en bas de l’échelle.

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Politique Timor Leste

Timor Leste: le défi d’une complète indépendance

Des élections générales se déroulent le 7 juillet à Timor Leste. L’enjeu : le réel démarrage d’un pays vieux de dix ans seulement.

Le Parlement du Timor Leste, l’un des pays les plus pauvres d’Asie, se renouvelle le 7 juillet : 65 sièges disputés suivant la proportionnelle et selon un système de listes par une vingtaine de formations. Le scrutin est dominé par deux partis issus de la lutte contre l’occupation militaire de  l’Indonésie (1975-1999) : le Fretilin et le CNRT. Mais ni l’un ni l’autre ne semble assuré de la majorité absolue et une petite formation, comme le Parti démocratique, pourrait déterminer  l’orientation d’une inévitable coalition gouvernementale.

L’élection présidentielle à deux tours (les 16 mars et 16 avril) s’est déroulée dans le calme et la campagne pour les législatives en a fait autant. Si tout se passe bien, une fois de plus, lors du premier scrutin organisé sans l’assistance de l’ONU, 1.300 bérets bleus ainsi qu’un petit contingent militaire australien devraient  être retirés du Timor Leste d’ici à la fin de l’année. Le pays prendrait donc, pour la première fois, entièrement sa sécurité en mains.

La très jeune population de l’ancien territoire portugais (deux tiers de moins de 30 ans) compte une bonne moitié de pauvres parmi son 1,1 million d’habitants. Le chômage est très élevé (au moins 20% en général et près de 50% chez les jeunes). Le taux d’alphabétisation est inférieur à 50%. Les recettes du pétrole (un Fonds riche de plus de 7 milliards d’€) et une aide internationale supérieure à un milliard d’€ n’ont pas encore permis de sortir de cette pauvreté. La corruption est, enfin, une dure réalité.

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ASEAN Asie Indonésie Malaisie Philippines Thaïlande Viêtnam

Les tigres d’Asie du sud-est rugissent à nouveau

La crise financière dévastatrice de 1997-1998 appartient à l’Histoire et le dynamisme retrouvé de la région va attirer les investisseurs étrangers.

L’Asie du sud-est souffre sans doute de désunion politique mais, sur le plan économique, les beaux jours sont revenus. La crise financière de 1997-1998 a, certes, laissé quelques traces mais elles s’effacent peu à peu. «Les tigres du Sud-Est asiatique rugissent de nouveau et, cette fois-ci, pour de bon», affirme un rapport de PricewaterhouseCoopers (PwC), firme respectée de consultants,  à la veille des réunions de haut niveau de l’Asean prévues du 9 au 13 juillet à Phnom Penh et auxquelles doit notamment participer Hillary Clinton, la secrétaire d’Etat américaine.

Ce rapport, selon le Wall Street Journal,  est un plaidoyer en faveur d’investissements étrangers dans les économies de la région à l’expansion la plus  robuste, à savoir «les Philippines, la Thaïlande, le Vietnam, la Malaisie et l’Indonésie.» Il fait état d’un «environnement parvenu à maturité et offrant des opportunités, même si complexité et défis ne manquent pas.» «Nous ne sommes plus en 1998», estime Harry Broadman, l’un des auteurs du rapport.

Certes, l’ombre de la Chine s’étend encore, notamment compte tenu de sa capacité à attirer les investisseurs étrangers. Mais la hausse des salaires en Chine contraint Pékin à se tourner vers l’«intérieur» et les contrées rurales pour maintenir sa compétitivité, selon Changyong Rhee, l’économiste de la Banque asiatique de développement. PwC cite le cas des Philippines : un taux de croissance de 6,4% pendant le premier trimestre de 2012 place l’archipel, sur ce plan-là, en deuxième position derrière la Chine.

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Politique Thaïlande

En Thaïlande, les victimes de l’ultra-royalisme se serrent les coudes

Un réseau d’entraide a été établi pour apporter un soutien aux parents des personnes accusées ou condamnées pour crimes de lèse-majesté en Thaïlande.

«Nous sommes un groupe d’entraide. N’ayez pas peur, joignez-vous à nous». C’est en ces termes que Sukanya Pruksakasemsuk, l’épouse du militant politique Somyot actuellement détenu et en cours de jugement pour crime de lèse-majesté a annoncé, lors d’une conférence de presse le 5 juillet à Bangkok, la création de ce Réseau des personnes affectées par l’article 112. Ce groupe qui comprend pour l’instant dix membres, tous parents de détenus pour crime de lèse-majesté, s’est fixé pour objectif de faire pression sur les autorités pour que les prisonniers, en cours de jugement, puissent bénéficier d’une libération sous caution, ainsi que de soutenir matériellement les familles de ces détenus. Il finance par exemple les visites de parents de détenus résidant en province.

Plusieurs dizaines de personnes, en grande majorité de nationalité thaïlandaise (mais on compte aussi un Américain et un Singapourien), ont été condamnés à des peines de prison allant de quelques années à vingt ans de prison pour avoir critiqué le roi, la reine ou le prince héritier. En Thaïlande, la famille royale est protégée des critiques et des insultes par l’article 112 du code pénal, lequel prévoit des peines cumulables allant de trois à quinze ans de prison. Le réseau souhaite aussi que les détenus pour crime de lèse-majesté soient considérés comme des prisonniers politiques ou des prisonniers de conscience, car ce qui leur est reproché est d’avoir exprimé publiquement leur opinion. Les détenus pour crimes de lèse-majesté sont parfois ciblés par le personnel pénitentiaire pour des brimades spéciales. Ainsi, Sukanya Pruksakasemsuk a indiqué que Da Torpedo, condamnée à vingt ans de prison, était obligée par les gardiens à deviner le nom de ses visiteurs. En cas d’erreur, le visiteur se voit interdire de la rencontrer.