Catégories
Analyse Asie Brunei Malaisie Philippines Politique Viêtnam

En mer de Chine du Sud, un face-à-face et ses limites

Le ton monte entre Pékin et Manille. Le face-à-face naval à Scarborough peut encore dégénérer. Toutefois, le contraire est plus plausible.

Pékin a réagi vivement aux petites manifestations anti-chinoises organisées, le 11 mai, par des Philippins à Manille et dans d’autres villes, y compris à l’extérieur des Philippines. La Chine a accusé le gouvernement philippin d’avoir «encouragé» le mouvement, ce que ce dernier a démenti. Pékin a pris des mesures de rétorsion : contrôle plus stricts de produits philippins importés et quarantaine pour les fruits ; contingentement des touristes chinois se rendant aux Philippines.

Entre-temps, à proximité du récif de Scarborough revendiqué par les deux pays, le face-à-face entre bateaux armés se poursuit depuis plus d’un mois. Chacun campe sur ses positions, mais sans annoncer de renforts, lesquels pourraient être dépêchés sur place, il est vrai, très rapidement. Ce qui n’est pas le cas pour l’instant. La marine philippine ne fait pas le poids face à la chinoise.

Certes, des dérapages sont toujours possibles quand deux adversaires se placent, au moins en partie, sur un pied de guerre. Et, sur le fond, la Chine dénonce ce que le quotidien de l’armée populaire qualifie de «changement de cap stratégique, de la part des Etats-Unis, vers l’Est», une allusion, en particulier, à l’installation progressive de 2.500 fusiliers-marins américains dans le nord de l’Australie. Depuis 2010, ajoute le journal, l’«intervention» des Etats-Unis «dans le débat sur la mer de Chine du Sud a offert aux Philippines un espace pour manœuvrer et a, dans une certaine mesure, renforcé leur main à notre égard, les encourageant à suivre une voie risquée».

Réserves dans les deux camps

Toutefois, s’il est exact qu’une alliance existe entre les Etats-Unis et les Philippines et que des centaines de soldats américains sont en quasi-permanence sur le territoire philippin depuis le début du siècle, Washingon est demeuré en retrait dans la dispute de Scarborough, se contentant d’exiger le non recours à la force pour la régler. Les Philippins se feraient quelques illusions en estimant qu’ils pourraient bénéficier de l’appui solide des Etats-Unis et de la société internationale dans cette affaire. Même l’Asean, dont Manille est l’un des membres fondateurs, est paralysée par des divisions dans le contentieux territorial qui oppose, en mer de Chine du Sud, la Chine à quatre de ses membres (outre les Philippines, Brunei, la Malaisie et, surtout, le Vietnam).

De leur côté, les Chinois n’ont pas davantage envie d’une confrontation. Le PC chinois est en pleine campagne pour le renouvellement de sa direction en 2013, une campagne très dure si l’on s’en tient à l’affaire Bo Xilai. La Chine est également confrontée à un effritement de son modèle de croissance rapide. Même si une opération de diversion peut être la bienvenue, Pékin souhaite éviter un conflit en mer de Chine du Sud tout en faisant comprendre aux Philippins, sans ménagement, qu’ils doivent revoir leur copie avant de monter au créneau.

Enfin et surtout, les deux principales puissances de l’Asie-Pacifique ont beau être méfiantes l’une vis-à-vis de l’autre, elles cherchent néanmoins une entente sur certaines règles de jeu. Faits sans précédents depuis 1971, c’est-à-dire depuis l’établissement de premiers contacts directs lors du voyage clandestin de Henry Kissinger en Chine, deux ressortissants chinois ont été remis, en 2012, aux autorités chinoises après s’être réfugiés dans des légations diplomatiques américaines. Certes, les deux cas sont bien différents et le sort de Chen Guangcheng, le dissident aveugle, n’est pas encore résolu. Mais que Pékin et Washington puissent aujourd’hui parvenir à gérer de telles crises laisse au moins entendre qu’il en faudrait plus pour déboucher sur un divorce. Et les contentieux en mer de Chine du Sud, si graves soient-ils à long terme, n’en seront pas, pour le moment, l’objet.

Jean-Claude Pomonti

Catégories
Asie Brunei Philippines Politique

Pékin n’a pas peur d’une escalade en Mer de Chine du Sud

Accusant Manille d’avoir commis de «sérieuses erreurs», la Chine s’est «préparée à répondre à toute escalade» en Mer de Chine du Sud. Si tu veux la paix…

Pékin ne reculera pas, tel est le message transmis par Fu Ying, une vice-ministre chinoise des affaires étrangères, aux Philippines à propos d’un face-à-face maritime qui dure depuis un mois auprès du récif disputé de Scarborough, à 220 km au large de l’île philippine de Luçon. «Ne jamais faire de compromis» lorsque la souveraineté chinoise est en jeu, titre, de son côté, le China Daily. Le message est valable également pour le Vietnam et les autres pays d’Asie du sud-est (Malaisie, Brunei) qui sont présents dans ces eaux ou en revendiquent une part.

Autrement dit, la ligne officielle chinoise est de répondre aux «provocations continues» attribuées à Manille dont la faible flotte a tenté, sans succès, d’empêcher des chalutiers chinois de piller ses réserves de poissons. Dans un communiqué diffusé le 8 mai, Fu Ying a accusé le gouvernement philippin d’avoir émis des commentaires «erronés» sur la situation.

Toutefois, souligne le Christian Science Monitor, Washington a fait part de sa neutralité dans le face-à-face, «un geste apprécié à Pékin». Le China Daily a estimé que la neutralité américaine «contribuait à la stabilité». Enfin, le président philippin Benigno Aquino aurait décidé d’autoriser dans ces eaux l’exploration (gaz et pétrole) par des compagnies chinoises afin de «séparer dispute politique et opérations commerciales», toujours selon le Christian Science Monitor.

 

Catégories
Asie Philippines Politique

Washington rassure Manille sur sa sécurité

Alors qu’un face-à-face entre Chinois et Philippins se poursuit en Mer de Chine du Sud, l’Amérique s’engage à renforcer la faible marine de guerre de Manille.

Depuis le 8 avril, un face-à-face sino-philippin a lieu dans l’est de la Mer de Chine du Sud à proximité des récifs de Scarborough, donc à 220 km à l’ouest de Luçon, le nord de l’archipel des Philippines. Aussi, la réunion, le 2 mai à Washington, une sorte de conseil de guerre américano-philippin n’a pas manqué d’attirer l’attention. Hillary Clinton, secrétaire d’Etat, et Léon Panetta, secrétaire à la défense, y ont reçu leurs homologues philippins, Albert del Rosario et Voltaire Gazmin.

Pékin et Manille se disputent la propriété de Scarborough. Le 2 mai, les Etats-Unis ont réitéré leur neutralité en ce qui concerne la controverse sur la souveraineté. Mais Hillary Clinton a rappelé que Washington était contre le recours à la force pour régler les contentieux en Mer de Chine du Sud. Les Etats-Unis vont continuer d’aider l’indigente marine de guerre philippine à se renforcer et entendent «demeurer en étroit contact avec notre allié, les Philippines», a ajouté Hillary Clinton.

La longueur inhabituelle du face-à-face entre Chinois et Philippins comporte le risque d’abcès de fixation. Celui d’une issue brutale au conflit – ou d’une bavure – ne peut être totalement écarté. Le secrétaire d’Etat del Rosario a rappelé, pour sa part, que les Etats-Unis étaient liés aux Philippines par «un traité de défense mutuelle».

Catégories
Philippines

Sortie de torpeur aux Philippines

Le prudent et sérieux Financial Times fait l’éloge des Philippines. L’économie a démarré, à l’image du «lama qui se met à trotter», estime-t-il.

L’image des Philippines à la traine, mauvais élève de l’Asie du sud-est qui ne parvient pas à sortir de la pauvreté, est en train de s’estomper.  L’archipel aux près de cent millions d’habitants (douzième population de la planète) «a pris un tournant», écrit, le 25 avril, le quotidien londonien.

La dette extérieure de Manille est aujourd’hui inférieure à ses réserves de devises, évaluées à environ 60 milliards d’€. Les Philippines sont devenues un créditeur net. La raison : l’argent envoyé par quelque 8 millions de travailleurs à l’étranger a pratiquement triplé en huit ans, pour atteindre 15 milliards d’€ par an. En outre, dans ce pays en partie anglophone, l’externalisation des ressources est un succès aussi impressionnant qu’en Inde. En l’espace six ans, les recettes ont « quintuplé » pour dépasser les 8 milliards d’€ par an.

De surcroît, les impôts commencent à rentrer. Le déficit budgétaire, de 6%  voilà dix ans, a été ramené à 2%. Contrairement à ce qui se passe en Indonésie, les subventions à l’essence ont été supprimées voilà des années. Le taux de croissance est honorable : de 4% à 5% depuis 2006, avec une pointe à 7,6% en 2010 (et une baisse à 3,7% en 2011). Le pays est encore pauvre mais la population est jeunes (50% de moins de 25 ans). Enfin, le gouvernement actuel a plutôt tendance à décourager la corruption, ce qui n’a pas été le cas auparavant.

 

Catégories
Analyse Histoire Philippines

Symbole d’une époque dite révolue, Luisita n’existe plus

La Cour suprême des Philippines a ordonné, le 24 avril, la distribution aux fermiers de la moitié de l’Hacienda Luisita, propriété de parents du président Aquino.

Le verdict a été voté à l’unanimité. Comme c’est souvent le cas aux Philippines, la décision populaire a été suivie d’une messe de grâces dite par Mgr Carlito Cenzon, évêque de Baguio, où siège la Cour suprême. Cenzon s’est empressé de conseiller aux fermiers de continuer de cultiver la terre. Quant à l’archevêque José Palma, président de la très influente Conférence des évêques des Philippines, il s’est félicité d’une distribution de cinq mille hectares de terres, soit la moitié de la superficie de Luisita, à 6 300 fermiers. Un conflit de trente ans a donc pris fin. Il a parfois été sanglant, comme le 6 novembre 2004, quand douze paysans et deux enfants ont été tués – et des centaines de gens blessés – lors de la répression d’une manifestation par la police et l’armée.

Cette plantation de cannes à sucre est de la taille d’une ville moyenne dans le centre de l’île de Luçon, à proximité du chef-lieu de Tarlac. Dans cette région, une insurrection avait été matée – celle des Huks communistes – au début des années 50 par Ramon Magsaysay, avec l’aide du futur général Edward Lansdale. Ce dernier, spécialiste américain de la contre-guérilla émigrera ensuite, après la chute de Diên Biên Phu, à Saigon où il dirige de la mission militaire américaine et propulse Ngô Dinh Diêm au pouvoir (Graham Greene en a fait le héros malheureux de son fameux roman, Un Américain bien tranquille).

Luisita est alors en vente et Ramon Magsaysay, élu président en 1953, veut éviter son achat par un de ses adversaires politiques. Peu avant d’être tué dans un accident d’avion en 1957, Magsaysay propose donc au riche José Cogjuanco de lui en faciliter l’achat à l’aide d’un crédit de l’Etat. José est le beau-père de Ninoy Aquino, l’adversaire le plus dangereux de Ferdinand Marcos (Ninoy sera assassiné en 1983). José est donc le père de Cory Aquino, la dame en jaune (présidente de 1986 à 1992) et le grand-père de l’actuel président Noynoy, élu en 2010. Après avoir été un brillant reporter de guerre en Corée, Ninoy a plongé dans la politique sous la protection de Magsaysay, ce qui explique pourquoi le président de l’époque a proposé à José Cogjuanco de l’aider à acheter Luisita. L’opération s’est finalement réalisée en 1958.

Les deux cents familles et la réforme agraire

En 1969, soit onze ans plus tard, lors de la réélection de Ferdinand Marcos, Ninoy Aquino, alors jeune sénateur, m’a emmené à Luisita. A l’aube, il est venu me chercher à mon hôtel à Manille à bord d’une grosse limousine américaine. Sur la banquette avant, deux gardes du corps étaient assis à côté du chauffeur, mitraillette sur les genoux. Pendant les quatre heures de trajet, Ninoy s’est expliqué. Les deux cents familles qui dominent alors les Philippines sont, pour la plupart, de grands propriétaires terriens. Les rejetons de ces familles, dont lui-même, peuplent les deux chambres. Aucune réforme n’est concevable sans leur accord (ce qui est encore en grande partie le cas de nos jours). Luisita était, par sa superficie, la deuxième propriété foncière privée de l’archipel. Que José Cogjuanco ait sorti les fermiers de l’esclavage dans lequel ils se trouvaient, en améliorant leurs conditions de vie, ne changeait rien à l’équation : pour développer les Philippines, il fallait commencer par une réforme agraire.

Elle n’a pas eu lieu. Ninoy Aquino a été en prison, puis en exil, pour être assassiné à sa descente d’avion le jour de son retour (et, de toute façon, faute d’un passage au pouvoir, il demeure une énigme). A l’aide d’une loi martiale (1973-1983), Marcos est resté 21 ans au pouvoir (1965-1986). L’un de ses proches amis a été Danding Cojuangco, fils de José, ce qui a permis de mettre Luisita à l’abri de toute réforme. Quand elle a succédé à Marcos, Cory Aquino a distribué ses parts de propriété. Son fils Noynoy en fait autant lorsqu’il a été élu. Du coup, faute d’un démembrement, Luisita est devenue le symbole de ce qui ne devrait plus se faire car les autres membres de la famille Cogjuanco se sont accrochés à leur bien. Comme son père et sa mère autrefois, Noynoy se dit partisan d’une réforme agraire. Il reste à voir si son gouvernement peut et veut appliquer rapidement le verdict encourageant de la Cour suprême.

Jean-Claude Pomonti

Catégories
Asie Politique

Politique maritime: le désordre chinois

Le manque de coordination et la concurrence entre les administrations chinoises seraient l’une des raisons des tensions croissantes en Mer de Chine du Sud.

Pékin a besoin de ramener un peu d’ordre dans sa gestion du contentieux en Mer de Chine du Sud, souligne une enquête de l’International Crisis Group (ICG) dont les résultats ont été diffusés le 23 avril. «Seule administration à disposer d’un mandat de coordination, le ministère [chinois] des Affaires étrangères n’a ni l’autorité ni les moyens de gérer les autres acteurs», estime l’ICG.

La marine de guerre se sert des tensions «pour justifier sa modernisation». Mais le principal problème est «le nombre croissant de navires paramilitaires qui  jouent un rôle grandissant dans les zones disputées et en-dehors d’un cadre légal clair», poursuit le rapport, dans une allusion aux bateaux armés des services chinois des pêches. Ces bateaux ont, en particulier, été impliqués dans des incidents le long des côtes du Vietnam et dans le face-face récent, entre Pékin et Manille, autour du récif de Scarborough.

L’ICG note également que Pékin a trop souvent avancé l’argument nationaliste du caractère «indiscutable» de sa souveraineté sur 80% des eaux de la Mer de Chine du Sud pour pouvoir envisager une marche arrière sans se désavouer aux yeux du public chinois. L’ICG annonce un deuxième rapport sur les facteurs régionaux de la tension (course aux armements, nationalismes, intérêts économiques).

 

Catégories
Philippines Société

La lutte d’un religieux écologiste aux Philippines

Edwin Gariguez, prêtre philippin, a reçu, le 16 avril à San Francisco, le Goldman Environmental Prize, le «Prix Nobel vert». Mais la partie n’est pas gagnée.

Voilà deux décennies que, sur l’île de Mindoro aux Philippines, le P. Gariguez se bat en faveur des aborigènes mangyans dont le bien-être, le style de vie et la culture sont menacées par les activités d’Intex, société norvégienne autorisée à exploiter une mine de nickel «à ciel ouvert, selon une méthode d’extraction à l’acide, qui aurait produit des millions de tonnes de déchets toxiques», rapporte le site des Missions étrangères de Paris.

Le religieux a fondé Alamin (Alliance Against Mining). Il a obtenu des autorités locales en 2002 un moratoire de vingt-cinq ans sur l’exploitation minière à Mindoro, moratoire qui n’a pas été appliqué. Il s’est rendu en Norvège pour rallier à sa cause le lobby écologiste. En 2009 enfin, il a entrepris, en compagnie d’une vingtaine de militants, une grève de la faim. Au onzième jour, Manille a suspendu les activités d’Intex à Mindoro.

Toutefois, Intex a annoncé le 20 avril un accord avec le groupe chinois MCC8 concernant un investissement de 108 millions d’€, avec le soutien de «la très puissante CITIC-Gem Fund» norvégienne, dans le nickel à Mindoro. Le début de la production aurait lieu en 2015. La guerre continue.

Catégories
Analyse Asie Philippines Viêtnam

Loi du plus fort en mer de Chine du Sud

La Chine poursuit son grignotage en mer de Chine du Sud, quelles que soient les objections avancées par les autres pays riverains, beaucoup plus faibles.

Voilà quelques jours, à proximité de Scaborough, petit ensemble de bancs de sable et de récifs situé à proximité de Luçon, donc largement à l’intérieur de la zone économique exclusive des Philippines, un face-à-face s’est terminé de façon édifiante. Huit bateaux de pêche chinois ont pu repartir, leurs soutes pleines de poissons et coquillages, sous la protection de trois bâtiments chinois armés, dépendant officiellement d’un service chinois chargé de l’«application de la loi sur la pêche.» Manille ne fait pas le poids.

La position officielle de Pékin : plus de 80% des eaux de la mer de Chine du Sud nous appartiennent et nos bateaux ont le droit de pêcher où bon leur semble. Résultat : les eaux poissonneuses des Philippines sont pillées ; faute de moyens, un petit voisin de la grande Chine est contraint à une retraite qui n’est pas la première. Ironie de l’affaire : les manœuvres conjointes auxquelles participent ces jours-ci, sur la grande île philippine de Palawan, six mille soldats, dont quatre mille américains, n’ont pas empêché Pékin de poursuivre ses provocations.

Forte d’un budget militaire officiellement, cette année, de plus de 70 milliards d’€, la Chine continue son grignotage en mer de Chine du Sud. Le Vietnam est exaspéré : les bâtiments armés du service chinois de la pêche saisissent ses bateaux, avec leurs équipages, et les hommes arrêtés ne sont rendus que «contre rançon». Le 3 mars, la Chine a arraisonné deux bateaux de pêche vietnamiens dans les eaux de l’archipel des Paracels, à la hauteur du port de Da-Nang (Vietnam central), avec 21 hommes à bord, originaires du district de Ly Son, province de Quang Ngai. Les prisonniers ont rejoint dans les geôles chinoises 170 autres pêcheurs, originaires du même district, arrêtés en 2011 à bord de leurs onze bateaux.

Hydrocarbures

La Chine a fait objection à la signature, le 5 avril, d’un contrat entre le géant russe Gazprom et PetroVietnam concernant l’exploration conjointe de deux blocs qui se trouvent dans le bassin de Nam Con Son (Poulo Condore), soit au large du delta du Mékong et entièrement dans la zone économique exclusive du Vietnam. En 2009,  en dépit d’un accord avec Hanoi, British Petroleum avait renoncé à explorer ces deux blocs. Des câbles diplomatiques américains, diffusés par Wikileaks, ont révélé que les compagnies pétrolières occidentales présentes en Chine faisaient l’objet de fortes pressions chinoises pour ne pas intervenir en mer de Chine du Sud à la suite d’un contrat avec le Vietnam. En revanche, l’ONGC, compagnie d’Etat indienne, n’a pas renoncé à l’accord de coopération avec PetroVietnam signé en novembre 2011 et aussitôt dénoncé par Pékin.

La Chine continue de pousser ses pions en mer de Chine du Sud en se contentant de références historiques controversées. En 1974, donc avant la victoire communiste vietnamienne de 1975, l’armée chinoise avait chassé manu militari de l’archipel des Paracels une garnison sud-vietnamienne. Depuis ce raid accueilli par les Vietnamiens comme un coup de poignard dans le dos, Pékin a aménagé les Paracels et, plus récemment, intégré cet archipel dans son administration.

Dans l’archipel des Spratleys, plus au sud, sont présents cinq Etats : Chine, Vietnam, Philippines, Malaisie et Taïwan. Aucun règlement négocié ne se profile à l’horizon : comme l’Asean s’avère incapable d’adopter une position commune sur le différend, notamment en raison des pressions exercées par la Chine sur quelques membres, Pékin poursuit son grignotage. Jusqu’au jour où un incident plus grave que les autres incitera les Etats-Unis, qui ont déjà manifesté leur préoccupation en 2010, à s’intéresser de plus près à ce qui est déjà le plus grave contentieux maritime en Asie du sud-est.

Jean-Claude Pomonti