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Birmanie: le coup de chapeau du président à Mme Suu Kyi

Dans son discours à l’ONU, le 27 septembre, Thein Sein a affirmé que la démocratisation était irréversible en Birmanie et tressé des lauriers à Mme Suu Kyi.

Qui aurait pu croire, voilà encore quelques semaines, que le président de la Birmanie (Myanmar) aurait profité de son discours devant l’Assemblée générale de l’ONU, à New York, pour tirer un coup de chapeau à Aung San Suu Kyi ? D’autant que cette adresse – une première – a été retransmise en direct par la télévision birmane. C’est pourtant ce qu’a fait Thein Sein, un militaire qui a troqué l’uniforme contre un habit civil pour occuper la présidence en 2011 et lancer une série de réformes.

Jamais auparavant, Thein Sein n’avait félicité Mme Suu Kyi, l’ancienne adversaire de la junte au pouvoir, ou fait allusion au Prix Nobel de la paix qui lui a été décerné en 1991. «En tant que citoyen du Myanmar, je voudrais la féliciter pour les honneurs qu’elle a reçus dans ce pays en reconnaissance de ses efforts en faveur de la démocratie», a dit Thein Sein à la tribune de l’ONU à New York. Mme Suu Kyi se trouve encore aux Etats-Unis où elle a été reçue par le président Barack Obama et où lui a été remise la plus haute distinction décernée par le Congrès.

En marge de sa participation à l’Assemblée générale de l’ONU, le président birman a rencontré le 26 septembre Hillary Clinton, qui avait annoncé auparavant la levée de l’interdiction des importations en provenance de Birmanie, sous réserve d’une approbation du Congrès. Dans son discours, Thein Sein a également mis en avant les «changements étonnants» intervenus dans son pays depuis 2011. Il a affirmé que «la transition démocratique et le processus de réformes» y sont l’objet de «pas irréversibles», y compris de la part des forces armées, encore très influentes.

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Les écologistes de Birmanie font grise mine

Un projet sino-birman de mine de cuivre dans le nord de la Birmanie a provoqué des manifestations des habitants des environs, épaulés par des environnementalistes.

La mine de cuivre est située dans la chaîne de montagnes de Letpadaung, à 24 kilomètres à l’est de Monywa, principale ville de la division de Sagaing, dans le nord de la Birmanie. Pour l’exploiter, le conglomérat militaire birman Myanmar Economics Holding Ltd s’est allié à la firme chinoise Wan Bao Mining. Selon le magazine online Irrawaddy, les habitants des villages alentour sont mobilisés depuis un mois et demi contre le projet, non seulement à cause des risques environnementaux qu’il présente, mais aussi parce qu’il a d’ores et déjà conduit à des confiscations de terrains. Une unité anti-émeute de la police a été dépêchée sur place après que des villageois eurent bloqué le passage de bulldozers pour stopper les travaux. Une douzaine de personnes ont été arrêtées et trois femmes sont toujours en détention. L’affaire a désormais un retentissement national et des militants des droits de l’Homme et de protection de l’environnement sont venus prêter main forte aux protestataires.

Le 11 septembre, une marche pour demander la libération des trois détenues a rassemblé 1.500 personnes à Monywa dont une vingtaine d’étudiants venus de Mandalay. Le lendemain, toujours selon le site Irrawaddy, 300 habitants de douze villages proches de l’emplacement de la future mine ont organisé un rassemblement pour demander l’annulation du projet. Des membres du groupe Generation 88 sont venus les soutenir, notamment Jimmy l’un des leaders de ce mouvement ayant manifesté en 1988 contre les militaires au pouvoir. Les villageois se sont entretenus avec le « chief minister » de la division de Sagaing, Thar Aye, qui a promis de relâcher les trois détenues, mais en respectant la procédure légale. En revanche, il a dit n’avoir pas l’autorité pour décider de l’annulation du projet de mine de cuivre et a suggéré aux protestataires de contacter le gouvernement à Naypyidaw. Le même jour, une députée locale de la Ligue nationale pour la démocratie d’Aung San Suu Kyi est venue discuter avec les protestataires.

En septembre 2011, le gouvernement birman, sous pression de la population locale et à cause des risques pour l’environnement, avait suspendu le projet de barrage-réservoir de Myintsone, situé dans l’Etat kachin dans le nord-est du pays et dont l’investisseur principal est la firme chinoise China Power Investment Corporation. C’était la première fois que le pouvoir birman, alors au début de sa phase de transition, donnait favorablement suite à une demande exprimée par la population.

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La Thaïlande critiquée pour son traitement des réfugiés

Human Rights Watch accuse la Thaïlande d’agir de manière ad hoc et non transparente concernant les réfugiés étrangers.

Située au carrefour de l’Asie du Sud-Est continentale et de l’Asie du Sud-Est insulaire, la Thaïlande a été depuis des décennies une terre d’accueil des réfugiés, qu’il s’agisse des Cambodgiens, des Birmans, des Laotiens ou même d’arrivants venus d’horizons plus lointains comme l’Inde, l’Irak ou la Somalie. Mais malgré cette longue expérience, le royaume continue à traiter ces réfugiés de manière ad hoc et non transparente, laissant la porte ouverte à de multiples abus. C’est du moins la substance du rapport intitulé «Ad Hoc and Inadequate. Thailand’s Treatment of Refugees and Asylum Seekers» publié le 13 septembre par l’organisation de protection de droits de l’Homme Human Rights Watch (HRW). Le rapport s’étend notamment sur la situation des réfugiés birmans, qui, du fait des changements politiques dans leur pays d’origine, pourraient y rentrer dans un prochain futur.

«Nous sommes reconnaissants à la Thaïlande de ne pas pousser à un rapatriement hâtif», a déclaré Bill Frelick, directeur du programme réfugiés à HRW, avant d’ajouter : «Mais ces gens ne sont pas bien préparés à un prochain rapatriement. Ils ne sont pas reconnus comme réfugiés en Thaïlande». La Thaïlande n’a pas signé la Convention de Genève sur les réfugiés de 1951, mais elle accorde un statut de «personnes déplacées» à certains des étrangers réfugiés sur son sol s’ils ont fui leur pays par crainte de persécutions politiques. 50.000 Birmans sont considérés comme personnes déplacées en Thaïlande et vivent dans des camps isolés et fermés à côté de 50.000 autres Birmans qui n’ont aucun statut. «Ces personnes déplacées n’ont toutefois aucun droit. Elles n’ont pas le droit de travailler. Et si elles le font, elles sont exposées aux abus d’autorité de la police, à l’extorsion et à l’exploitation par les employeurs», a poursuivi Bill Frelick. Le rapport critique aussi vivement le Haut-Commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR), qui, selon les termes de M. Frelick, s’est laissé «marginaliser» par les autorités thaïlandaises et ressemble à «un mendiant quémandant avec son bol à aumônes».

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Une première en Birmanie : une femme ministre

La nouvelle ministre de la santé publique, Myat Myat Ohn Khin, est la première femme à accéder aux fonctions de ministre depuis l’indépendance de la Birmanie.

Comparée à ses voisins occidentaux – Bangladesh, Inde et Pakistan – et même à la Thaïlande, la Birmanie accuse un retard considérable dans le domaine de l’accès des femmes aux fonctions gouvernementales – ce qui ne laisse pas d’être paradoxal quand on connaît le charisme et la popularité de la cheffe de l’opposition parlementaire Aung San Suu Kyi. Un premier petit pas a été fait pour commencer à combler ce déficit, le 4 août dernier, lors de la nomination par le président Thein Sein de Myat Myat Ohn Khin au poste de ministre de la Santé publique, a indiqué le 10 septembre le site d’information online Mizzima, quelques jours après la prestation de serment des nouveaux ministres. « Autant que je sache, Khin Kyi [la mère d’Aung San Suu Kyi] a occupé le plus haut poste [pour une femme] dans l’histoire moderne de la Birmanie en tant qu’ambassadrice en Inde », commente Win Tin, membre de la direction de la Ligue nationale pour la démocratie, principale formation d’opposition, citée par Mizzima. Le gouvernement birman comprend 36 ministres.

Quatre femmes figurent parmi les 15 vice-ministres. La faible proportion des femmes en politique est particulièrement criante dans les deux chambres du Parlement. Ainsi, il n’y a que 25 femmes députées dans la Chambre basse qui comprend 440 sièges et 4 dans la Chambre haute pourvue de 224 sièges. Selon un rapport du Parlement, la Birmanie se situe au 134e rang sur 143 pays listés en ce qui concerne la participation des femmes au Parlement. Il n’y a pas non plus de femmes parmi les sept juges de la Cour suprême.

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La loi sur les investissements étrangers est votée en Birmanie

Le parlement de Birmanie a voté le 7 septembre une loi assez libérale pour encadrer les investissements étrangers dans le pays.

Un vif débat avait opposé les partisans d’une loi assez souple pour les investisseurs étrangers à ceux qui désiraient de fortes mesures de protection des entreprises locales. Selon le quotidien thaïlandais Bangkok Post, c’est le premier groupe qui a prévalu. Ainsi, le niveau minimum d’investissements, qui avait été fixé dans un premier temps à 4 millions d’euros a été abaissé afin de ne pas dissuader les petits et moyen entrepreneurs. De même, le seuil maximal des parts d’un investisseur étranger a été porté de 49 % à 50 % – sauf dans les secteurs sensibles comme l’agriculture et la pêche -, et même au-delà dans certains secteurs (comme, semble-t-il, celui des hautes technologies). Enfin les baux fonciers pour les étrangers dans le cadre d’un investissement ont été portés de 35 ans à 50 ans avec possibilité d’une extension de 50 ans.

Le président Thein Sein doit encore promulguer la loi ou la renvoyer au Parlement pour modification. Mais, selon le Bangkok Post, comme Thein Sein faisait partie du groupe de ceux qui s’opposaient à une loi trop restrictive, il est probable qu’il la promulgue tel quel. Les investissements des pays occidentaux sont pratiquement inexistants en Birmanie depuis le début des années Soixante, d’abord du fait de la politique isolationniste de la dictature de Ne Win, puis, à partir de 1988, à cause des sanctions économiques occidentales. Seules de rares firmes occidentales, comme Total, Alsthom, Diethelm et Siemens avaient, malgré le contexte politique, investi dans le pays.

 

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Total renforce sa position en Birmanie

En acquérant 40 % dans un bloc gazier, Total, longtemps vilipendé pour ses investissements en Birmanie, consolide ses positions.

La firme Total S.A. continue à avancer ses pions en Birmanie en acquérant 40% du bloc gazier M 11, opéré par le Thaïlandais PTTEP, au large des côtes sud-est de Birmanie, non loin du gisement de Yadana dont la firme française est l’opératrice depuis les années 90. Le troisième partenaire du bloc M 11 est le Japonais JX Nippon Oil and Gas Exploration Corp avec 15% des parts. En 2011, Total avait atteint une production cumulée en Birmanie de 15.000 barils équivalent pétrole par jour.

Selon la firme d’analyse économique Zacks Investment Research, la décision de la firme française semble motivée par la possibilité de découverte de nouveaux gisements dans la zone et par le fait que les pays de la région deviennent des consommateurs d’énergie de plus en plus importants. La grande majorité du gaz extrait du gisement de Yadana alimente les centrales électriques de Thaïlande.

Total a été longtemps critiqué pour ses investissements en Birmanie, initiés dès le début des années 1990, et pour certaines violations alléguées des droits de l’Homme notamment aux alentours du gazoduc reliant le gisement de Yadana à la Thaïlande. Un règlement à l’amiable avait mis un terme à une action judiciaire concernant l’emploi de travail forcé sur le chantier du gazoduc.

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Crise institutionnelle en Birmanie

La Birmanie a connu, avec la démission le 6 septembre des neufs juges constitutionnels, sa première crise institutionnelle depuis l’ouverture politique au début de 2011.

C’était une première épreuve pour la démocratie embryonnaire de la Birmanie. Le fait qu’elle ait pu la surmonter sans répercussions négatives majeures est un signe rassurant. Un arrêt de la Cour constitutionnelle saisie par le président Thein Sein et statuant que les comités parlementaires n’ont pas le droit de remettre en cause les amendements aux lois effectués par l’exécutif, ni de convoquer les ministres pour les questionner, est à l’origine du conflit. Jeudi 6 septembre, les deux tiers des députés de la Chambre basse du parlement – ceux de la Ligne nationale pour la démocratie (LND) d’Aung San Suu Kyi, comme ceux du Parti de la solidarité et du développement de l’union (USDP) majoritaire – ont voté la destitution des neuf juges constitutionnels. Ceux-ci ont démissionné dans la soirée du même jour après avoir consulté Thein Sein. Seuls les députés militaires, qui occupent de droit 25 % des sièges de la Chambre basse, avaient voté contre la destitution ou s’étaient abstenus.

Cette mini-crise montre qu’un véritable jeu institutionnel existe et que les députés du parti majoritaire n’obéissent pas au doigt et à l’œil du gouvernement. Elle témoigne aussi des tensions entre le président Thein Sein et celui qui apparaît comme son principal rival dans le camp des anciens de la junte, l’ex-général Thura Shwe Mann, président de la Chambre basse. Réputé ambitieux et corrompu, il viserait à se porter candidat à la succession de Thein Sein aux élections de 2015 – ou même avant si ce dernier a un accident de santé. Ce chassé-croisé constitutionnel lui a permis de se positionner comme défenseur des libertés parlementaires, tout en montrant que le nouveau système birman était capable de gérer une crise sans à-coups majeurs.

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Un proche de l’ex-chef de la junte nominé vice-président de Birmanie

Les députés militaires ont nominé le 10 juillet Myint Swe, un général à la retraite proche de Than Shwe, l’ancien leader de la junte, pour prendre le poste de vice-président.

L’image de Myint Swe, qui va très probablement devenir le nouveau vice-président de Birmanie, est contrastée. Il est considéré comme relativement propre, notamment quand on le compare à son prédécesseur le très corrompu Tin Aung Myint Oo, lequel avait démissionné au début mai pour raisons de santé. Mais Myint Swe, âgé de 60 ans, a aussi été l’officier en charge de la sécurité dans la région de Rangoon lors de la répression de la «révolution safran» à la fin de l’été 2007. Selon le magazine Irrawaddy, basé en Thaïlande, «il a été directement impliqué dans la répression condamnée internationalement» et «sa campagne pour pacifier les bonzes en leur offrant de l’argent a échoué».

Dans les années 2000, Myint Swe a collaboré étroitement avec les généraux Than Shwe et Maung Aye, deux des leaders du régime militaire. Il est aussi l’organisateur de deux opérations délicates : l’arrestation des membres de la famille de l’ancien dictateur Ne Win en 2002 (soupçonnés de fomenter un coup d’Etat) et l’arrestation de l’ex-chef des services de renseignements militaires Khin Nyunt en 2004. Malgré son rôle lors de la révolte des bonzes, Myint Swe passe, auprès de certains observateurs, pour un homme pragmatique, qui pourrait jouer un rôle de pont entre les partisans d’une ligne dure et les réformateurs – un profil assez proche de celui du président Thein Sein.

Un quart des sièges au Parlement de Birmanie est occupé d’office par des militaires, auxquels revient le droit de nominer le vice-président.