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Obama en Birmanie : le double signal de l’Amérique

Le dessin de Stephff

Selon le Washington Post, la visite d’Obama en Birmanie illustre sa détermination à continuer de pivoter vers l’Asie et adresse un message aux Etats-voyous.

La Maison blanche établit «avec une rapidité étonnante» des liens avec un pays qui a été longtemps un «paria international» et «vient juste d’entreprendre des réformes», relève le quotidien de Washington. Sans précédent. Entre le moment où le gouvernement de Pretoria a tourné le dos à l’apartheid (1990) et la première visite d’un président américain (Bill Clinton, 1998), huit années se sont écoulées. Depuis le renversement du président Slobodan Milosevic, aucun président américain n’a visité la Serbie. Depuis la décision de la Libye d’abandonner son programme nucléaire (2003), aucun chef d’Etat américain ne s’est rendu sur place.

Dans le cas de la Birmanie (Myanmar), vingt mois seulement se seront écoulés entre le premier signal fort annonçant la fin du régime militaire (mars 2011) et la visite attendue de Barack Obama le 19 novembre. Les sanctions les plus accablantes ont été levées entre-temps. A titre de comparaison régionale, après la défaite de 1975 au Vietnam, Washington a attendu dix-neuf ans pour mettre fin à son embargo économique et vingt ans pour établir des relations diplomatiques avec Hanoï.

Toutefois, de nos jours, donc à une époque où l’Amérique «pivote» vers l’Asie, Washington aurait probablement reconnu le régime communiste vietnamien beaucoup plus vite. En tout cas, le Washington Post estime que le renforcement rapide de la collaboration avec le nouveau régime birman est «largement» lié au «pivot» américain vers l’Asie, lui-même l’expression de la gestion américaine de la montée en puissance de la Chine. La Birmanie a fait un geste décisif en prenant, dès 2011, des distances à l’égard de son ancien protecteur chinois. Le Washington Post évoque l’«effort» américain «pour intégrer les pays de l’Asie du sud-est, qui ne sont pas enthousiasmés par l’influence croissante de la Chine mais ont besoin d’un peu d’aide pour s’unir contre le géant qui est leur voisin».

Le Washington Post ajoute que le gouvernement de Barack Obama «voit peut-être aujourd’hui une ouverture pour affirmer son leadership régional, à un moment où les approches diplomatiques de la Chine demeurent peu convaincantes». Le quotidien de Washington estime qu’en précipitant la détente avec la Birmanie, la Maison Blanche adresse «un autre message» aux Etats «voyous» : «ceux qui s’ouvriront pourraient s’attendre à des récompenses de la part des Américains, et promptement».  Certes, les relations de l’Amérique avec, par exemple, l’Iran sont beaucoup plus difficiles à gérer. «Vous pouvez tout de même vous demander, conclut le Washington Post, comment tout cela est vu de Caracas, de Riad et même de Téhéran».

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Un tourbillon américain en Asie du sud-est

Le patron du Pentagone est venu en éclaireur. Accompagné de Hillary Clinton, Barack Obama passe le weekend à Bangkok, le lundi en Birmanie et le mardi au Cambodge.

Curieux marathon pour la première tournée à l’étranger d’un président réélu voilà deux semaines seulement à la suite d’une épuisante campagne électorale. Leon Panetta, le secrétaire américain à la défense, a donné le ton en signant, peu après avoir débarqué en Thaïlande le 15 novembre, une «alliance de défense» dont le label est éloquent : «un partenariat de sécurité pour le XXIème siècle».

La Thaïlande et les Etats-Unis ne se seraient donc apparemment jamais quittés au cours du dernier demi-siècle malgré les mouvements divers observés à Bangkok au lendemain de l’humiliation américaine du 30 avril 1975 au Vietnam. Et, comme en Australie, où un premier contingent de fusiliers-marins américains s’installe, Washington n’aurait pas abandonné l’idée d’essayer de stationner un peu de monde dans le royaume qui fut la base arrière de la guerre au Vietnam.

Barack Obama semble s’être engagé, tête baissée, dans une série de premières qui doivent ancrer un mouvement auquel il tient : l’Amérique accentue son «pivot» en direction de l’Asie-Pacifique même si deux des artisans de cette réorientation, Léon Panetta et Hillary Clinton, s’apprêtent à quitter l’équipe présidentielle. Obama sera le premier président américain à se rendre au Myanmar (Birmanie), le 19 novembre, et au Cambodge, le 20 novembre. Au passage, il aura été reçu, audience fort rare, par le roi de Thaïlande, âgé de 84 ans, qui vit dans un hôpital et ne se déplace plus qu’en chaise roulante.

A Phnom Penh, où il passera une nuit avant de participer, le 20 novembre, au septième sommet de l’Asie de l’est, il aura des entretiens bilatéraux avec  le premier ministre Wen Jiabao (un Chinois sur le départ) et le premier ministre Yoshihiko Noda (le Japonais de service). Il sera, surtout, contraint d’engager son autorité dans les querelles maritimes qui empoisonnent les relations de la Chine avec ses voisins. Ce sommet, lui aussi, sera dominé par les relations entre Pékin et Washington.

En effet, le changement intervient rapidement. La Birmanie passait encore, voilà deux ans, pour une chasse gardée chinoise. Aujourd’hui, la concurrence entre les deux Grands de l’Asie-Pacifique s’y annonce rude. Au Cambodge, partenaire de la Chine, il sera intéressant de jauger l’influence de Washington. Obama souhaite emballer la machine et, surtout, qu’on n’oublie pas dans quelques semaines ce premier voyage à l’étranger de son deuxième mandat. Dès novembre 2011, dans un discours à Melbourne devant le Parlement australien, il avait annoncé la couleur : «en tant que nation du Pacifique, les Etats-Unis joueront un rôle plus large et de long terme dans le façonnement de la région et de son futur».

Nous y voilà donc. L’Amérique renforce ses liens militaires avec les voisins de la Chine – comme les Philippines, la Corée du Sud, le Vietnam, dont les relations avec Pékin sont plus difficiles. Elle conforte ses liens avec Singapour, la Thaïlande ou l’Indonésie. Les Chinois se disent encerclés. Aux yeux de Washingon, l’Asie orientale est désormais la priorité et, pour peu que des dérapages soient limités au Proche Orient ou en Afghanistan, le deuxième mandat d’Obama est lancé.