Catégories
Viêtnam

Vietnam : des rizières gommées, futur centre de Saïgon

L’aménagement de l’intérieur de la boucle de la rivière de Saïgon, face au centre-ville actuel, avance. Thu Thiêm sera le cœur de la mégapole de demain.

Quand les Français ont planifié la ville de Saïgon, voilà désormais plus d’un siècle, ils ont regardé en direction du Plateau, légèrement surélevé par rapport à la rivière et où se distinguent encore, de nos jours, la silhouette de la cathédrale en briques rouges et, à ses côtés, celle d’une superbe Poste de style Effel. Autrefois, empruntant la rue Catinat (aujourd’hui rebaptisée Dông Khoi), les calèches, puis le automobiles, remontaient des quais aménagés à l’extérieur de la boucle de la rivière de Saïgon vers le Plateau. Et c’est aux alentours de cette rue plutôt étroite et très ombragée que s’est organisé le centre-ville actuel : l’Hôtel de ville, le théâtre municipal, des hôtels et, un plus loin, les marchés.

Curieusement, l’intérieur de la boucle, lieu-dit de Thu-Thiêm pourtant si proche de ce centre,  1er arrondissement de la mégapole méridionale du Vietnam, n’a pas été exploité. Les marécages ont simplement été transformés en rizières. Sur la rive, de très grands panneaux publicitaires ont obstrué la vue sur un paysage demeuré bucolique. A leurs pieds s’est installée, dans des casemates tenant parfois du bidonville, une population formée en partie des parasites du 1er arrondissement : vendeurs de billets de loterie, marchands ambulants, cireurs de souliers. Il y a quelque temps encore, seul un vieux bac et de petites embarcations faisaient la navette entre les deux villes.

Cette époque est révolue. Trois ponts et un tunnel relient aujourd’hui Thu Thiêm au centre-ville. L’intérieur de la boucle est déjà devenu le 2° arrondissement de Hochiminh-Ville. La petite population sur la rive de la rivière – en fait, un large fleuve – a été, au fil des années, indemnisée et déplacée ailleurs. Le plan-maître d’aménagement prévoit une urbanisation susceptible d’accueillir une population d’un demi-million d’habitants.

Selon le site de Tuoi Tre, les espaces verts seront nombreux, dont un parc de vingt hectares sur la rivière, avec des aménagements  en plein air pour manifestations sociales, culturelles, politiques. Le long de la berge sera également créée une aire de neuf hectares pour les loisirs à destination des habitants et des touristes. Pour éviter les embouteillages, le maître-plan fait également place à des voies routières surélevées, des parkings, des rues piétonnes.

Thu Thiêm accueillait aussi des drogués, des sans-papiers et des manutentionnaires du port. Du temps de la colonisation, le lieu-dit servait de refuge à des militants de l’indépendance fuyant la sûreté française.  Ces différents passés s’effaceront devant la modernité et la logique de construire l’endroit le mieux placé pour faire au moins partie du nouveau centre-ville, puisqu’il se trouve dans le prolongement de Nam-Saïgon, Saïgon-Sud, dont la réalisation est beaucoup plus avancée, et qu’il sera directement relié au futur aéroport de Long Thanh, dont l’ouverture est prévue en 2020.

Catégories
Asie

Claude Cheysson (1920-2012) : un Asiate au Quai d’Orsay

Décédé le 15 octobre 2012 à son domicile parisien, le ministre des relations extérieures (1981-1984) de François Mitterrand a été, d’abord, un amoureux de l’Asie.

Les gens qui s’en souviennent encore gardent l’image d’un Cheysson « brillant » (Laurent Fabius), au cursus universitaire exceptionnel (Polytechnique, en dépit de la Deuxième guerre mondiale, l’ENA). Et au parcours tout aussi exemplaire : il a fui la France en 1943 pour s’engager dans les Forces françaises libres. Il a été en 1955 le chef de cabinet de Pierre Mendès-France, alors Président du conseil. Il a été pendant huit ans (1973-1981) un Commissaire européen chargé des pays en voie de développement  et, à une époque où l’Europe a des moyens, a multiplié les programmes de développement. Enfin, il a été, dans la foulée et pendant plus de trois ans, le chef d’une diplomatie qui, il est vrai, s’élaborait avant tout à l’Elysée.

La face mal connue d’un personnage très actif, sourcilleux, a été son faible pour l’Asie, né d’un séjour à Saigon, au Vietnam du Sud, comme conseiller du gouvernement, de 1952 à 1954. Cheysson est séduit, charmé. Il en garde un souvenir ébloui. Il continue à suivre le dossier lorsqu’il rejoint le cabinet de Pierre Mendès-France en participant aux négociations de Genève. Par la suite, et surtout lorsqu’il est devenu ministre dans les cabinets de Pierre Mauroy puis de Laurent Fabius, il a resserré ses liens avec les pays d’Indochine. Son épouse, dans les années 1990, a entrepris de parrainer une ONG caritative au Cambodge.

Claude Cheysson effectuera un deuxième long séjour en Asie en tant qu’ambassadeur à Jakarta, de 1966 à 1969, dans une période bien tourmentée avec, comme entrée en matière, les massacres de gens suspectés de communisme (un demi-million de victimes) et, durant la deuxième moitié de son séjour, la remise sur pied d’une Indonésie violentée et affrontant la pénurie.  Il reste l’un des rares patrons du Quai d’Orsay à avoir été asiate.

Catégories
Culture Histoire Viêtnam

Vietnam: la chanteuse aux pieds nus peut se produire à nouveau

Après 37 ans d’absence, Khanh Ly, la plus connue des interprètes de Trinh Công Son, est autorisée à se produire sur scène au Vietnam. Une page se rouvre.

Les deux noms sont indissociables. Trinh Công Son a été l’auteur-compositeur pacifiste de la deuxième guerre du Vietnam, l’américaine. Khanh Ly a été sa première interprète et la plus émouvante. Elle chantait pieds nus dans un petit cabaret plein de fumée et de mélancolie rue Tu Do, pour Liberté (ancienne rue Catinat, future rue Dong Khoi, pour Insurrection générale). Son vivait entre la maison familiale à Saigon et sa ville natale de Hué.

Les chansons pacifistes de Son, interprétées par Khanh Ly, étaient interdites d’antenne à Saigon comme à Hanoi. De quoi casser le moral des combattants, estimaient les gouvernants des deux bords. Mais elles circulaient à des millions d’exemplaires au nord comme au sud du dix-septième parallèle, ligne de démarcation entre les deux zones. Les guitares des soldats, dans les deux camps, les suivaient au «front». Les Vietnamiens ont la poésie musicale dans le sang.

En 1975, Khanh Ly s’est enfuie aux Etats-Unis. Elle y a poursuivi sa carrière de chanteuse. Trinh Công Son a été en «rééducation» non loin de Hué en attendant l’autorisation de rejoindre son domicile à Saigon. Il s’est remis à écrire, à chanter, et il s’est essayé à la peinture. Et puis, le temps a fait son œuvre, la guerre s’est éloignée, Son s’est éteint en 2001, laissant derrière lui plus de trois cents chansons/poèmes qui ont renouvelé la chanson au Vietnam. Quant à Khanh Ly, elle a refait sa vie aux Etats-Unis. Mais si les Vietnamiens du Vietnam la connaissent moins que Son, ils en repèrent souvent la voix.

A Hanoï, le ministère vietnamien de la Culture, des Sports et du Tourisme a accordé, selon le site Tuoi Tre, une licence à Khanh Ly, aujourd’hui âgée de 67 ans, l’autorisant à donner des représentations d’ici à la fin de l’année. Coïncidence ? 2012 marque les cinquante ans de  carrière de Khanh Ly alors que 2011 a été l’occasion de nombreuses manifestations lors du dixième anniversaire de la mort de Trinh Công Son. Une page qui se rouvre, riche en beauté. Et en nostalgie.

Catégories
Société Viêtnam

Vietnam : des voleurs prêts à tuer pour un ordinateur

L’ancien Saigon, rebaptisé Hochiminh-Ville en 1975, était le royaume des petits pickpockets. La ville devient le terrain de voleurs brutaux, parfois des tueurs.

Dans la mégapole méridionale du Vietnam, les enfants des rues ont toujours étonné par leur habileté à détrousser les passants, à leur vider les poches, à subtiliser un portefeuille dans une poche revolver à l’aide d’une lame de rasoir ou d’un cutter. Ils se manifestent beaucoup moins de nos jours, pour une raison évidente : avec l’enrichissement général des trois dernières décennies, ils sont beaucoup moins nombreux.

Mais ils semblent remplacés par des voleurs beaucoup plus dangereux. Le site VietnamNet  fait état de « plusieurs cas de vols au cours desquels les voleurs ont agressé, blessé leurs victimes, les ont même tuées à coups de couteaux ; ils ont même attaqué les policiers qui les ont poursuivis». VietnamNet  rapporte l’arrestation, le 17 septembre, d’un certain Cao Xuan Lap, âgé de 28 ans, qui a été inculpé de vol et d’homicide.

Réparateur électronicien, Lap aurait affirmé que son emploi était instable. A court d’argent, il était monté sur sa moto et s’était promené en ville, cherchant des victimes circulant avec leurs ordinateurs portables. A un carrefour, il est tombé sur un couple à motocyclette. Le jeune homme, Hoang Ngoc Tri, âgé de 22 ans, avait posé son laptop dans le porte-bagage accroché au guidon. Tri a hurlé quand Lap s’est emparé de l’ordinateur et l’a poursuivi. Non seulement Lap a tué Tri à coups de couteau mais il a grièvement blessé un agent de police avant d’être arrêté et désarmé.

A la mi-août, rapporte également VietnamNet, la police a arrêté deux voyous, âgés respectivement de 20 et de 19 ans, qui volaient à un carrefour particulièrement encombré le matin, quand les gens se rendent au bureau leur ordinateur sous le bras. Armés de ciseaux très aiguisés, ils coupaient les sangles des sacs à dos, revenus à la mode, avant de s’enfuir avec. Au troisième vol, ils ont été poursuivis par des passants et des policiers. Ils se sont défendus à l’aide de couteaux et, étant parvenus à saisir le revolver de l’un des policiers, ils l’ont déchargé sur leurs poursuivants, blessant deux passants et deux policiers.

Des incidents de cette gravité ne sont pas fréquents. Mais les criminels font preuve de davantage d’audace, semblent prêts à blesser leurs poursuivants et sont confiants dans leur capacité à s’enfuir au milieu de la foule. Il est arrivé à des policiers de les poursuivre dans les égouts de la ville où ils s’étaient réfugiés. La plupart de ceux qui se font arrêter sont des récidivistes.

Catégories
Histoire Politique Société Viêtnam

Renaissance du scoutisme au Vietnam

Une centaine de membres du scoutisme vietnamien ont soumis une demande officielle de reconnaissance du mouvement, à ce jour ni reconnu ni interdit.

Adressée à l’Assemblée nationale, au gouvernement et au PC du Vietnam, cette requête fait valoir que «la pratique scoute» devrait être reconnue «en tant qu’authentique méthode d’éducation de la jeunesse», annonce le 20 juin Eglises d’Asie, site des Missions étrangères de Paris. La veille, Dang Van Viet, qui dirige le scoutisme vietnamien, a déclaré à Radio Free Asia qu’«aucun texte officiel n’a signifié l’interdiction ou la dissolution du mouvement scout» et que «l’esprit de monopole qui a sévi ces dernières décennies (..) a fait son temps».

Apparu dans les années 1930 au Vietnam, le scoutisme s’est d’abord développé à Hanoi et à Saigon. Un premier rassemblement a eu lieu à Dalat en 1935. Une Fédération indochinoise des associations du scoutisme a été créée en 1937. Le scoutisme a connu son apogée pendant la Seconde guerre mondiale, sous le gouvernorat vichyste de l’amiral Decoux, ce qui n’a pas empêché des membres du mouvement de rejoindre le Vietminh en 1945. Par la suite, les activités des scouts ont beaucoup souffert des guerres.

Aujourd’hui, le scoutisme est inexistant dans le nord du pays et dans une bonne partie du centre. Il a poursuivi quelques activités dans le sud après 1975, mais de façon sporadique. Sa renaissance est liée en grande partie au renforcement de la communauté catholique, qui représente environ 6% d’une population proche de 90 millions d’habitants.

Catégories
Société Tourisme Viêtnam

Dalat, le petit Paris du Vietnam, menacé par la pollution

Station d’altitude à la fraîcheur recherchée, Dalat est en train de crouler sous la pollution. Le «petit Paris» du Vietnam risque de perdre de son charme.

Les coloniaux français s’y réfugiaient pour fuir la chaleur accablante de Saigon, surtout entre fin février et début mai. De nos jours, au Vietnam, les touristes locaux et étrangers en font autant. Mais Dalat, chef-lieu de la province de Lam Dông, souffre d’une gestion laxiste, rapporte les quotidiens Thanh Nien et Tuoi Tre.

A six km de la ville, le lac des Chagrins et sa pinède réputée pour la légèreté de sa brise et sa tranquillité, est de plus en plus pollué par les détritus du voisinage, notamment du village des Fleurs, aux petites fermes florales connues mais dont les bouteilles et paquets d’insecticides ou d’engrais chimiques trainent partout. «Quand il pleut, les détritus se retrouvent dans le lac», rapporte Thanh Nien. En outre, la superficie du lac continue de se réduire, passant de neuf hectares à trois seulement, en raison du déboisement et de l’érosion des sols. Les eaux boueuses des surfaces perdues sont immédiatement exploitées par des paysans.

A deux km de la ville, les fameuses chutes de Cam Ly sont contaminées par des ordures rejetées en amont. Quand les journées sont ensoleillées, une odeur putride fait fuir les visiteurs. Un Vietnamien qui loue des chevaux aux touristes n’ose plus laisser les animaux s’abreuver sur place. Enfin, la vallée de l’Amour, communauté qui se trouve à cinq km de Dalat et toujours fréquentée par les amateurs de lunes de miel, est menacée par les tunnels de mines sauvages d’étain. Des centaines de mètres de tunnels ont été creusés. Malgré le caractère illégal de ces activités, aucune action n’a été entreprise pour y mettre un terme.